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''Corruption'', ''incompétence'' : à bout de souffle, le système de santé roumain cristallise tous les maux du pays

Le gouvernement et les oppositions s'adressent des procès réciproques en incompétence alors que la pandémie de Covid-19 peine à être maîtrisée. Usé, le système de santé est pointé du doigt et met en lumière les difficultés que traverse le pays.

Article rédigé par Louise Bodet - Paul Cosighian
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
L'hôpital Marius Nasta, que dirige actuellement Béatrice Mahler, à Bucarest, le 16 octobre 2008.
 (DANIEL MIHAILESCU / AFP)

Des patients placés sous oxygène, assis sur de simples chaises ou allongés sur des lits de fortune : ces images largement relayées sur les réseaux sociaux ont été tournées dans les couloirs encombrés de Matei Bals, le principal hôpital spécialisé en maladies infectieuses de Bucarest, la capitale roumaine. Les autorités excluent une remise sous cloche du pays comme au printemps et privilégient un confinement local, là où les foyers de contagion au coronavirus Covid-19 sont les plus importants.

L’opposition social-démocrate issue de l’ère communiste, évincée du pouvoir il y a un an, accuse le gouvernement d’incompétence, mais celui-ci rejette sur son prédécesseur la responsabilité de l’impéritie hospitalière. À Matei Bals, on trouve ainsi plus de 30 personnes en salle d’urgence pour moins de 20 lits d’hospitalisation.

24 heures d'attente pour un lit

Aussi, il faut attendre souvent plus de 24 heures pour qu’une place se libère, raconte le Dr Adrian Marinescu. "Nous n'avons pas assez de places alors que les patients ont besoin d’être aidés, soupire-t-il. C est vrai que nous improvisons. Mais ce qui est important, c'est que les patients sont soignés et surveillés comme dans une salle normale. Toutefois, il est clair que ce n'est pas la meilleure façon de les soigner." Et les centres de soins spécialisés ne sont pas les seuls saturés : "Tous les lits sont occupés, explique Béatrice Mahler qui dirige l’hôpital Marius Nasta à Bucarest. Le soir, en début de garde, on ne sait pas comment on va se débrouiller avec les patients qui arrivent la nuit."

C'est comme un corset dans lequel on se retrouve coincé. Si ça continue comme ça, le mois de décembre va être terrible et on va beaucoup pleurer.

Béatrice Mahler

à franceinfo

La crise du Covid-19 est le triste révélateur du délabrement avancé du système de santé : exode massif des médecins vers de meilleurs salaires en Europe de l’ouest, infrastructures vétustes faute d’investissements depuis 30 ans, corruption grande et petite. Le bakchich reste monnaie courante à l’hôpital tandis que le népotisme continue de placer aux postes-clés des incompétents, dénonce Oana Gheorghiu, co-fondatrice à Bucarest d’un hôpital oncologique pour enfants entièrement financé sur fonds privés.

Incompétence et corruption gangrènent le système

"Il y a la corruption et l'incompétence, explique Oana Gheorhiu. À l'heure actuelle, dans le domaine des investissements dans les infrastructures de santé, l'incompétence est encore pire que la corruption. Je pense que désormais, beaucoup de politiciens aimeraient vraiment faire quelque chose, mais ils n'y arrivent pas parce qu'ils sont confrontés à une administration peuplée de gens pistonnés, de parents, de petits enfants, d'amis qui ne sont absolument pas choisis pour leur professionnalisme." Preuve de cette impéritie, le violent incendie qui a provoqué la mort de 10 patients le mois dernier dans un hôpital du nord-est du pays. À l’origine, un court-circuit, et des normes anti-incendie négligées par les huit directeurs qui s’y sont succédé en un an, tous nommés pour leur affiliation politique.

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