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Covid-19 : "Le scénario le plus probable serait que le virus revienne à l'automne prochain", prévient un infectiologue

Face à l'optimisme du ministre de la santé, le Dr Davido craint une "ivresse de complaisance [...] Il faut très clairement réaliser qu'en réalité, ça ne va pas s'arrêter d'un coup de baguette magique". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Benjamin Davido, infectiologue, était l'invité du "8h30 franceinfo", vendredi 26 novembre 2021. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

"Très clairement, le scénario le plus probable serait que le virus revienne à l'automne prochain", a déclaré jeudi 3 février sur franceinfo le docteur Benjamin Davido, médecin infectiologue et directeur médical et référent Covid-19 à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine). Il demande "encore un peu de patience" aux Français. Selon lui, on se dirige vers "quelque chose qui va ressembler à la gestion de la grippe", alors que le ministre de la Santé Olivier Véran est plutôt optimiste, précisant que le pic des contaminations est probablement derrière nous, que celui des hospitalisations approche. Le ministre évoque même la fin possible du masque à l’intérieur au printemps.

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franceinfo : Ranger le masque au printemps, cela vous paraît possible ?

Benjamin Davido : Le faire avant le printemps semble déraisonnable pour plusieurs raisons. La première, c'est qu’on sait qu'il y a une augmentation des contaminations qui se fait de façon assez évidente en octobre et en décembre due à ce coronavirus et qu'au printemps, on va vivre un peu plus à l'extérieur et qu'on sera probablement dans une saisonnalité aidante.

"L'autre élément pour décider de pouvoir enlever le masque en intérieur, c'est qu'on espère que la population aura atteint cette fameuse immunité collective qui, jusqu'alors, semblait être une oasis."

Benjamin Davido, médecin infectiologue

à franceinfo

Quand vous avez quasiment 500 000 contaminations déclarées, c'est-à-dire environ un million quotidiennement, on voit bien qu’au bout de 60 jours, vous avez atteint l'ensemble de la population et qu'on est dans un scénario radicalement différent de ce qui se passait avant.

Y aura-t-il des lieux où il faudra continuer à porter le masque ?

D’abord, raisonnablement, une des questions qu'on peut se poser, c'est : est-ce qu'on pourra ne pas porter le masque indépendamment du nombre de personnes ? Les gens ne se rappellent pas bien, mais, en avril dernier, la Haute Autorité de santé avait autorisé les gens vaccinés à se retrouver jusqu'à 10 dans un espace intérieur pour peu que l'espace soit bien aéré. Et puis, dans des espaces à très haut risque, chez des personnes particulièrement à risque, immunodéprimées, cela ne sera pas recommandé vraisemblablement. Mais on va surtout arriver à mon sens, en fonction des données épidémiologiques de la fin de la vague, sur quelque chose qui va ressembler à la gestion de la grippe. Et donc, il va falloir voir si on est capables de supporter de vivre sans masque, comme on le fait avec la grippe en fonction du nombre de décès et surtout, si le virus se "saisonnalise", c'est-à-dire de l'absence de récidive de vagues ultérieures.

Il faudrait surveiller le nombre de décès de près ?

Au-delà du nombre de décès, il faut très clairement réaliser qu'en réalité, ça ne va pas s'arrêter d'un coup de baguette magique. Et moi, ce qui me fait le plus peur en réalité, c'est que l'on soit dans cette d'ivresse de complaisance en se disant : ça y est, la vague Omicron a eu raison de nous, comme au Danemark, comme en Angleterre. Il ne suffit pas de regarder ce que font les autres. Il faut agir, il faut anticiper et que très clairement le scénario, le plus probable serait que le virus revienne à l'automne prochain. Et donc, il faudra avoir vacciné les 15 à 20 millions de Français qui sont les plus fragiles et qui le nécessiteront de fait avec un nouveau variant adapté Omicron et les choses se passeront bien, mais ça fait quand même beaucoup d'éléments. Il faut donc rester toujours très prudent parce qu’il faut que l'hôpital soit dans les bonnes conditions, qu'on ait vidé les lits de réanimation et que les déprogrammations puissent avoir été remises comme dans le monde d'avant.

Olivier Véran a annoncé qu’une infection est égale à une injection de vaccin pour obtenir son pass vaccinal. C’est pertinent ?

Ce terme, "une infection égale une injection" avait déjà été employé. Moi, j'ai eu déjà deux doses. J'en suis à ma deuxième infection, cela fait quatre. En fait, on va arrêter de compter. La réalité, c'est qu'on va se baser sur des rappels. La bonne question, c'est de se dire en réalité : qui va avoir le plus besoin de ce vaccin à partir du moment où tout le monde aura été contaminé ? On a fait une modélisation mathématique, on estime qu'à la fin du mois de mars, on sera dans ces conditions. Mais il faut bien comprendre que le virus et des variants peuvent nous jouer des tours et qu'on n'est pas à l'abri. Il y a des gens qui n'ont jamais croisé le virus, y compris des gens, malheureusement, qui ne sont pas vaccinés et on les reçoit encore à l'hôpital, qui devront à un moment donné se faire vacciner. Il faut encore un peu de patience.

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