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Déconfinement : le calendrier peut fonctionner si "les gens continuent de prendre leurs précautions", selon l'épidémiologiste Pascal Crépey

Article rédigé par franceinfo - Propos recueillis par Marianne Chenou
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Une foule réunie dans le parc des Buttes-Chaumont, à Paris, le 30 mars 2021. (SANDRINE MARTY / HANS LUCAS / AFP)

Le plan de réouverture des activités et d'allègement des contraintes sanitaires esquissé par le président de la République peut tenir, selon l'épidémiologiste Pascal Crépey, si les Français appliquent scrupuleusement les gestes barrières.

Trois étapes : mi-mai, fin mai et mi/fin juin. Voilà les échelons envisagés par Emmanuel Macron pour rouvrir les terrasses, les lieux culturels ou encore les commerces, lieux fermés depuis parfois plus de six mois pour freiner l'épidémie de Covid-19.

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Franceinfo a interrogé Pascal Crépey, épidémiologiste et enseignant-chercheur à l'Ecole des hautes études en santé publique à Rennes (Ille-et-Vilaine), pour mieux comprendre les enjeux autour de cet allégement des restrictions sanitaires. Selon le chercheur, il faut désormais envisager des mesures plus permissives pour soulager la population, tout en maintenant un protocole strict.

Franceinfo : Que pensez-vous du calendrier de réouverture en trois étapes qui a été esquissé par le président de la République ?

Pascal Crépey : Le problème, ce n'est pas juste le calendrier mais ce qu'il y a derrière. Après plus d'un an de crise, une fatigue s'est installée dans la population : il est de plus en plus compliqué de bien respecter toutes les mesures auxquelles on doit se contraindre, notamment sur la limitation de nos activités et nos interactions sociales. La population a besoin d'espaces de liberté et de respiration. Si ces espaces ne sont pas ouverts de façon régulée et protégée, ils s'ouvriront eux-mêmes de façon incontrôlée.

Si les dirigeants concèdent un relâchement à la population, il faut que ce soit pour mieux respecter les mesures barrières. C'est le principe de la soupape : on est dans une Cocotte-minute où la pression monte, il faut donc relâcher un peu sur quelques points sécurisés. Si les protocoles sont bien faits, le risque de brassage est limité.

C'est l'enjeu des prochaines semaines : garder le contrôle sur la dynamique de l'épidémie pour rester sur cette pente descendante, qui est pour l'heure trop douce ou, du moins, plus douce que lors des précédents confinements.

Face à cette crispation, comme vous l'évoquez, comment encourager la population à garder un comportement responsable ?

Pour garder le contrôle, on a besoin de donner à respirer à la population, afin qu'elle puisse garder un comportement le plus responsable possible. Il y a des moments où l'on n'en peut plus. D'un point de vue épidémiologique, il est préférable que les gens aient la possibilité de fêter un anniversaire en nombre limité entre 16 et 19 heures, par exemple à la terrasse d'un bar, en extérieur, plutôt qu'ils soient entassés chez les uns ou les autres, faute d'alternative.

Les mesures qui ont pu être efficaces pendant un temps risquent de devenir contre-productives si on les laisse telles quelles. On est obligé de prendre en compte ce facteur-là. C'est la même problématique pour les festivals qui sont annoncés, à une date inconnue, avec des participants assis. S'ils continuent de s'annuler, on risque de générer tout un tas de fêtes clandestines, qui seront certes en plein air, avec un impact limité, mais on n'en saura rien. On va se retrouver à prendre un risque que l'on veut justement éviter en encadrant ces événements et ce sera contre-productif.

Il faut aussi faire avancer la science, pour mieux mesurer ces risques de contamination, notamment en extérieur, et s'assurer que les mesures prises sont les plus efficaces.

Pensez-vous que le fait de rouvrir les lieux culturels représente un risque supplémentaire ?

Dans les musées, par exemple, avec des jauges limitées, une aération adaptée, un sens de circulation, le risque de contamination est très limité. Néanmoins, les contaminations n'ont pas forcément lieu dans le musée lui-même, mais avant ou après : lors des déplacements, des rencontres des uns et des autres, si les précautions ne sont pas prises.

Toute ouverture de lieu crée une opportunité de contacts entre individus qui peut donner lieu à une contamination. Si ce risque-là est contrôlé, si les gens continuent de prendre leurs précautions, de faire attention et si ces réouvertures ne sont pas interprétées comme la fin de l'épidémie, alors cela peut fonctionner.

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