Décrochage scolaire : la France a-t-elle été moins touchée que ses voisins pendant le confinement, comme l’affirme Jean-Michel Blanquer ?
Avec 4% d’élèves sortis des radars scolaires, la France serait le pays européen à avoir perdu le moins d’élèves pendant le confinement, selon le ministre de l’Education nationale.
"La France a un taux de décrochage, le meilleur ou le moins mauvais, si je puis dire, d'Europe", a affirmé le ministre de l'Éducation, lundi 22 juin sur France Inter. Jean-Michel Blanquer estime à 500 000 le nombre d’élèves ayant perdu le contact avec leurs enseignants. La France est-elle un exemple en la matière ? C’est plus compliqué que cela. La Cellule Vrai du Faux vous explique pourquoi.
Des chiffres difficilement vérifiables
Ce n’est pas la première fois que le ministre de l’Education nationale affiche de très bons résultats dans sa lutte contre le décrochage scolaire depuis la mise en place du confinement. Le 29 mai, il a estimé que la France a "fait plutôt mieux que les autres pays", où selon Jean-Michel Blanquer, le taux de décrochage monte jusqu'à 10 ou 15%. Cette comparaison est le fruit "d’échanges informels" avec certains de ses homologues européens, indique le ministère de l’Education nationale. Ils ne sont donc pas vérifiables.
Aucune enquête n’a été publiée pour établir cette comparaison. D’après les services de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), il n’existe pas de données fiables pour l’instant. "Les taux réels de décrochage seront seulement disponibles en 2022", indique l'Unesco en France. Des estimations sont en cours, mais ne seront pas disponibles avant la rentrée de septembre 2020.
Une estimation sur déclaration des établissements
En France, le chiffre de 500 000 élèves "décrocheurs" pendant la fermeture des écoles est une estimation selon le ministère de l’Education : "Il s’agit d’une remontée de terrain, par rapport aux observations des professeurs." Pendant le confinement, les enseignants et chefs d’établissements ont comptabilisé les élèves avec lesquels ils n’avaient plus aucun lien et les ont fait remonter au ministère, confirme ce dernier. Ce sont donc des estimations qui demandent à être confirmées et actualisées dans les semaines, voire les mois qui viennent.
Plusieurs associations syndicales de professeurs estiment que cette proportion de 4% est sous-estimée, mais surtout qu’elle efface les disparités territoriales. Elle représente en effet la proportion des 500 000 élèves absents sur 12 millions d’élèves. Cela ne permet pas d’évaluer les difficultés propres à certaines régions ou quartiers, notamment dans les établissements des réseaux d'éducation prioritaire.
Les chiffres observés concernent les élèves sortis des radars scolaires pendant le confinement. Le décrochage scolaire n’est pas une problématique née avec la crise sanitaire liée à la Covid-19. En 2016, le Centre national d’études des systèmes scolaires (Cnesco) estimait que 450 000 jeunes de 18 à 24 ans n'avaient pas de diplômes (sauf diplôme national du brevet) et n’avaient pas suivi de formation sur les quatre dernières semaines (Depp-Insee).
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