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"Il y a une rupture d'égalité" : leurs oraux maintenus, les candidats internes aux concours de l'Education nationale crient à l'injustice

Alors que les candidats externes ne seront jugés que sur leurs écrits, les agents contractuels de l'Education nationale devront eux passer un oral supplémentaire après les vacances d'été. Ils dénoncent un problème d'équité.

Article rédigé par Guillemette Jeannot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Illustration d'une salle d'examens lors de concours de la fonction publique.  (MAXPPP)

"Colère", "sentiment d'injustice"... En raison de la crise sanitaire liée au coronavirus, le ministère de l'Education a adressé un courrier à chacun des candidats inscrits aux concours de l'Education nationale pour leur signifier une modification des modalités des examens, le 15 avril. Exit les oraux pour les candidats externes, qui n'ont plus que les écrits à passer, à partir du 16 juin et jusqu'à mi juillet. En revanche pour les candidats internes, qui ont passé les écrits entre novembre 2019 et janvier 2020, les oraux sont repoussés à septembre voire octobre. Les agents contractuels de l'Education nationale se sentent pénalisés. 

"Ils n'ont toujours pas reçus leurs résultats"

"C'est du mépris à notre égard, nous qui sommes dotés d'une solide expérience dans l'enseignement, nous ne sommes pas reconnus, ne décolère pas Clotilde, 28 ans, assistante d'éducation depuis six ans, interrogé par franceinfo. Il y a une totale rupture d'égalité avec les candidats externes." Elle prépare depuis plusieurs mois le concours de conseillère principale d'éducation et cette titularisation est sa dernière chance pour avoir un poste car elle a atteint le nombre maximum d'années possibles en tant que contractuelle.

Ce report d'oral contraint les quelque 8 000 candidats internes, selon les syndicats, à jongler entre une fin d'année scolaire complexe avec la continuité pédagogique, des révisions rendues difficiles avec des bibliothèque universitaires fermées et une inconnue totale sur la suite de leur carrière.  

D'un côté, l'Education nationale reconnaît nos compétences en nous remerciant pour tout le travail que l'on fournit depuis deux mois. Et de l'autre, on nous dit que nous ne sommes pas prioritaires alors que la plupart de mes collègues vivent dans une grande précarité.

Clotilde, assistante d'éducation

à franceinfo

"Ils n'ont toujours pas reçu les résultats de leurs écrits depuis le 18 mars, dénonce Alain Billate, le secrétaire national du syndicat Snes-FSU chargé de la formation. Ils ne savent pas si à la rentrée ils auront un poste ni où en France. Ils ne peuvent rien prévoir au cas où. C'est très déstabilisant pour beaucoup d'entre eux qui se sont investis depuis des mois pour préparer ces concours."

"Un effort budgétaire exceptionnel"

De nombreux contractuels se sont rassemblés au sein du collectif Des admissibles aux concours internes de l'Education nationale. Ce groupe a lancé une pétition en ligne dans laquelle il demande à ce que "tous les candidats admissibles soient admis sans passer les oraux (...) et qu'il n'y ait pas d'oraux pour les concours dont les écrits n'ont pas encore eu lieu". La pétition a déjà récolté déjà plus de 21 000 signatures et le collectif a plus de 1 800 adhérents, relate à franceinfo Quentin Lhuillier, porte-parole du collectif et professeur de sciences économiques dans un lycée à Nice (Alpes-Maritimes). 

L'ensemble des syndicats soutient cette proposition et demande au gouvernement de faire "un effort budgétaire exceptionnel". Car dans ce contexte sanitaire incertain, "la date de septembre pour des oraux n'est pas sure non plus", souligne Alain Billate. Si le ministère évoque devant eux un problème financier pour admettre 4 000 candidats sur deux ans, syndicats et collectif rétorquent que c'est plutôt un problème "politique" car le gouvernement se montre "capable de sauver Air France ou Renault", remarque Alain Billate. Contacté par franceinfo, le ministère de l'Education  n'a pas répondu à nos sollicitations.

La revendication des candidats aux concours internes remporte également un large soutien politique. Des élus des Républicains, de l'UDI, du Parti communiste ou encore du nouveau parlementaire Ecologie démocratie solidarité, se sont ainsi fendus de lettres adressées à Jean-Michel Blanquer, que franceinfo a pu consulter. Dans son courrier, le député Aurélien Taché écrit par exemple :

Nous sommes, face à cette mesure, confrontés à un problème d'équité et de justice sociale entre les internes et les externes. (...) C'est pour cela que je vous demande de transformer l'admissibilité des candidats aux concours internes en admission.

Aurélien Taché

dans une lettre adressée à Jean-Michel Blanquer

"Nous ne serons pas de trop pour la rentrée"

Une délégation de quatre enseignants contractuels dont Quentin Lhuillier a été reçue par le cabinet de leur ministre de tutelle, mercredi 27 mai, dans l'après-midi. Selon le professeur de sciences économiques, le ministère a fait une proposition pour résoudre ce problème : "que les dossiers des candidats en interne soient sélectionnés sur les notes obtenues aux écrits à l'instar des candidats externes". Mais la délégation n'a eu aucune information sur les modalités de cette sélection, mise à part qu'"elle serait réalisée par un jury sans la présence des candidats".

Par ailleurs, la proposition ne remporte pas l'adhésion du collectif de candidats internes, car contrairement aux candidats externes, "nous, nous apprenons les règles du jeu après avoir passés nos écrits". En face, "le gouvernement soutient que cette proposition est juridiquement fondée et peut être rendue applicable par ordonnance", rapporte Quentin Lhuillier.

Nous leur avons fait une contre-proprosition : admettre tous les candidats admissibles sur les deux prochaines rentrées de 2020 et 2021. 

Quentin Lhuillier

à franceinfo

Une solution qui a du sens dans ce contexte sanitaire, selon le porte-parole, et qui parait "tout à fait gérable à intégrer". "Nous devrons sûrement dédoubler les classes à la rentrée et éventuellement assurer des cours à distance. Nous ne serons pas de trop pour assurer", argumente le professeur de sciences économiques. Tous attendent maintenant la réponse de Jean-Michel Blanquer.

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