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"On n'est pas une usine, on travaille avec de l'humain" : le confinement ajoute des tensions dans les foyers pour mineurs

Dans les foyers de l'aide sociale à l'enfance, le confinement est une difficulté supplémentaire pour les jeunes et les travailleurs sociaux qui les encadrent.

Article rédigé par Olivier Martocq
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
 Une soixantaine d'enfants âgés de 3 à 18 ans vivent dans le foyer les Mouettes à Marseille (capture écran). (GOOGLE STREET VIEW)

Depuis le début du confinement le 17 mars dernier pour enrayer l'épidémie de coronavirus, les messages de travailleurs sociaux se multiplient pour attirer l’attention des autorités de tutelles sur la situation des jeunes qui vivent en foyer. Des enfants et adolescents pour qui la promiscuité est particulièrement difficile à vivre. Un confinement qui induit aussi une surcharge de travail pour des équipes d’encadrants réduites.

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Le foyer les Mouettes est situé dans un ancien couvent dans les beaux quartiers de Marseille, à deux pas des calanques et des plages. Le bâtiment est vaste. Il y a des espaces verts et même un mini terrain de foot. Une soixantaine d'enfants âgés de 3 à 18 ans y vivent désormais reclus. Et même si le cadre est agréable, le confinement commence à poser des problèmes. "C'est quand même compliqué d'être ensembleMalgré le terrain qu'on a, les tensions montent parce que l'on reste beaucoup plus souvent ensemble", raconte Sofiane, 16 ans.

Quand il y avait l'école, on ne se voyait pas forcément beaucoup. L'inquiétude, c'est juste de rester longtemps enfermé.

Sofiane, 16 ans

à franceinfo

Il sont 175 000 mineurs placés par décision de justice sous la protection de l’aide sociale à l’enfance, parmi lesquels 60 000 sont en foyer ou famille d’accueil. Depuis le début du confinement les messages de travailleurs sociaux se multiplient pour attirer l’attention des autorités de tutelle. Au couvent, il est difficile de faire respecter les gestes barrières entre les enfants. Le personnel fait le maximum, mais ce n'est pas simple. "On n'est pas une usine. On ne travaille pas avec des boulons. On travaille avec de l’humain", insiste Aziz M'Bathie, éducateur au foyer les Mouettes.

Proximité et enfermement

"Le contact et la proximité avec les enfants est quelque chose qui revient au quotidien, continue l’éducateur. Un exemple : ce matin, il y a un enfant qui est tombé et qui s'est fait très mal. Mon premier réflexe, ce n'est pas de mettre le masque et des gants. Je suis allé le relever, il saignait de la main et je l'ai soigné".

Les éducateurs sont aujourd'hui, comme la plupart des travailleurs sociaux, pris dans une sorte de mise en tension de nos pratiques et de ce qu'on appelle des gestes barrières. On jongle, c'est assez compliqué.Aziz M'Bathie, éducateur au foyer les Mouettes

Les éducateurs sont aujourd'hui, comme la plupart des travailleurs sociaux, pris dans une sorte de mise en tension de nos pratiques et de ce qu'on appelle des gestes barrières. On jongle, c'est assez compliqué.

Aziz M'Bathie, éducateur au foyer les Mouettes

à franceinfo

Du côté des personnels, il a fallu revoir toute l'organisation. Franck Vautrin, directeur d'Accueil enfance jeunesse (AEJ), gère les Mouettes et deux autres établissements similaires sur Marseille. "C’est très simple, on a plus de travail avec moins de monde puisque, de fait, les enfants ne vont plus à l’école. Donc cela veut dire prendre en charge 60 enfants 24 heures sur 24, avec tout ce que le confinement peut amener comme difficultés", explique-t-il.

Le confinement, pour pas mal d'enfants avec des structures psychiques un petit peu abîmées peut être pris comme de l'enfermement et c'est très compliqué à vivre.

Franck Vautrin, directeur d'Accueil enfance jeunesse (AEJ)

à franceinfo

La seule crainte dans ce foyer, c'est que malgré les mesures sanitaires déployées, l'épidémie franchisse les murs du couvent via une personne de l’extérieur. Pour se changer les idées et aussi donner une visibilité à ses foyers, AEJ organise à partir de jeudi un "Coronathon". Une piste de 60 mètres a été tracée autour de l’ère de jeux du foyer les Mouettes. Un relais entre tous les enfants doit venir à bout des 703,25 tours.

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