Petit sursaut ou quatrième vague ? Comment l'épidémie de Covid-19 pourrait évoluer cet été en France sous l'effet du variant Delta
Le ministre de la Santé, Olivier Véran, estime que les contaminations pourraient remonter jusqu'à "20 000 cas quotidiens" début août "si nous n'agissons pas".
L'heure n'est plus à l'optimisme qui présidait à la levée des restrictions. "Nous sommes au départ de quelque chose qui ressemble à une vague épidémique", a averti Olivier Véran, dimanche 11 juillet, sur Radio J. Le ministre de la Santé a qualifié au passage le variant Delta d'"ennemi nouveau, parce que beaucoup plus contagieux". Voici ce que l'on sait de cette nouvelle vague qui se dessine et de sa possible progression, qui risque d'assombrir l'été et les vacances.
Où en est-on pour l'instant ?
Le nombre de cas remonte. Avec l'avancée du variant Delta, 4 256 nouveaux cas positifs au Covid-19 ont été enregistrés, dimanche, contre 2 549 une semaine plus tôt, selon l'agence Santé publique France (SPF). En moyenne glissante sur une semaine, le nombre de cas détectés chaque jour s'élève à 3 777, soit un bond de 63% par rapport à la semaine précédente.
Dans son dernier point épidémiologique, SPF avait déjà souligné la montée d'un autre indicateur, le taux d'incidence, qui correspond au nombre hebdomadaire de nouveaux cas pour 100 000 personnes. Du 28 juin au 4 juillet, "l'augmentation de l’incidence était marquée chez les 15-64 ans, et plus particulièrement chez les 15-44 ans", écrivait l'agence nationale de santé, le 9 juillet. "La proportion du variant Delta détecté parmi les cas diagnostiqués était en forte progression", soulignait SPF.
Cette poussée épidémique est encore plus flagrante pour la seule tranche d'âge des 20-29 ans. Chez ces jeunes adultes, le taux d'incidence s'élève désormais à 89, soit au-dessus du seuil d'alerte fixé à 50, comme le souligne sur Twitter l'ingénieur Guillaume Rozier.
Un bémol tout de même : la courbe des hospitalisations ne remonte pas. Ou pas encore. "Grâce aux vaccinés, il y a un décalage plus long entre la courbe des contaminations et celle des hospitalisations", remarque l'épidémiologiste Pascal Crépey. En France, plus de la moitié de la population a désormais reçu au moins une injection, et plus d'un tiers est totalement vacciné.
Vers quoi se dirige-t-on cet été ?
A la tête du site CovidTracker, Guillaume Rozier a extrapolé, samedi, l'augmentation actuelle du nombre de cas. Si celle-ci était amenée à se poursuivre sur le même rythme, la barre des 15 000 cas pourrait être franchie début août et celle des 60 000 cas après la mi-août.
À taux de croissance constant, on aurait 14 800 cas le 1er août et 63 000 le 24 août. https://t.co/xSzuvVefYU pic.twitter.com/FPtYjkellU
— GRZ (@GuillaumeRozier) July 10, 2021
Dimanche, Olivier Véran s'est montré encore plus pessimiste. Les quelque 4 700 cas enregistrés samedi "pourraient devenir 6 000 dans une semaine, 10 000 dans 15 jours et monter au-dessus de 20 000 début août si nous n'agissons pas", a-t-il estimé. La situation pourrait toutefois varier selon les décisions annoncées ou non par Emmanuel Macron, lundi, à 20 heures.
Les chiffres avancés par Olivier Véran s'appuient sur la comparaison avec le Royaume-Uni, avec lequel la France a "quatre semaines de décalage", selon le ministre. Outre-Manche, 30 000 nouveaux cas quotidiens ont été enregistrés sur la semaine écoulée. Le pays est confronté à une reprise inédite depuis l'automne dernier, comme le montre ce graphique du site Our World in Data (en anglais).
Chez nos voisins britanniques, les conséquences sont déjà tangibles. La pression hospitalière "commence à augmenter de 30-40% par semaine, avec déjà des hôpitaux qui déprogramment les soins", a décrit Olivier Véran. Dans son avis du 6 juillet, le Conseil scientifique chargé de conseiller l'exécutif en France constatait déjà une hausse de "20% des hospitalisations par semaine" en Angleterre. Une augmentation moindre que celle des contaminations (+70%), qui touchent surtout des sujets jeunes.
Pour l'épidémiologiste Pascal Crépey, l'issue dans l'Hexagone et en Corse ne fait guère de doute. "La courbe des hospitalisations va suivre celle des contaminations", assure cet enseignant à l'Ecole des hautes études en santé publique de Rennes.
Et cet automne ?
A l'automne, "un pic d'hospitalisations important est possible en l'absence de toute mesure de contrôle de l’épidémie", prévenait l'Institut Pasteur dans une modélisation mise à jour le 29 juin, à partir de plusieurs scénarios. Pour les chercheurs, ce pic pourrait être similaire à celui de l’automne 2020, avec quelque 2 500 hospitalisations quotidiennes.
Les personnes non vaccinées seraient alors surreprésentées à l'hôpital, explique le Conseil scientifique, dans son avis du 6 juillet. Dans le scénario privilégié par l'Institut Pasteur pour les derniers mois de l'année, "les personnes non vaccinées de plus de 60 ans représentent 3% de la population mais 35% des hospitalisations", analyse le Conseil scientifique.
"Le poids des adultes non vaccinés de 18-59 ans est également important : ils représentent à peu près 15% de la population mais 35% des hospitalisations", ajoute-t-il. Avant de conclure : "Parmi toutes les mesures étudiées, la vaccination est l'approche de loin la plus efficace et la moins coûteuse pour contrôler l'épidémie."
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