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"The Wire", "Old M. Flood" et "Phase IV"... Trois conseils culture pour le premier jour de confinement

Tous les jours, franceinfo vous propose trois conseils culture pour se cultiver même par temps confiné, face au coronavirus. 

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Temps de lecture : 4 min
La série "The Wire" et l'un de ses héros, McNulty, devenus cultes en cinq saisons. (HBO)

Confinement, jour 1. Pour passer le temps, franceinfo vous propose trois conseils culture par jour pendant cette période particulière de lutte contre le coronavirus. Chaque jour, nous vous conseillons un livre, une série ou un film. 

Une série : "The Wire"

Comme toutes les séries mythiques, The Wire (Sur écoute, en français) a son identité musicale : son générique. Way Down In The Hole de Tom Waits, repris chaque saison par un artiste différent (The Blind Boys of Alabama pour la première). Choix pas si innocent tant il définit ce qu'est l'œuvre de David Simon : drame, désespoir et Amérique. 

De 2002 à 2008, la série ausculte la ville de Baltimore, où tous les vices sont réunis : drogue, pauvreté, corruption politique et policière... David Simon sait de quoi il parle, le créateur a longtemps été journaliste au Baltimore Sun avant d'écrire des livres, la trame de The Wire. Mais jamais il ne cède à une vision manichéenne : les flics sont aussi détraqués que les trafiquants, sous les yeux d'une mairie quasiment criminelle. Les héros sont sales, pourris parfois, les acteurs peu connus voire amateurs. Certains sont recrutés dans les rues de la ville.

Le réalisme cru de The Wire en fait une série qui ne vieillira jamais. L'histoire retient des personnages : Omar le tueur psychotique, le sénateur "Clay" Davis et son tic de langage très fleuri ("shiiiiiiiit").

The Wire époustoufle tout le monde, jusqu'à Barack Obama, fan absolu. L'atmosphère de cette série aux cinq saisons est inégalable, sa bande originale tout autant. Difficile de trouver mieux depuis. Y.B.

The Wire (HBO), 5 saisons, à retrouver sur OCS et MyCanal.

Un livre : "Old M. Flood", de Joseph Mitchell

Joseph Mitchell est né en 1908 en Caroline du Nord, où il aurait pu reprendre la plantation familiale de coton et ne jamais arriver jusqu'à vos oreilles. Après de brèves études de médecine auxquelles il préférait la lecture de Ulysse de Joyce, Joseph Mitchell s'installe à New York en 1929 où il devient reporter. Fasciné par la grande ville, il la sillonne dans tous le sens et démontre qu'un bon journaliste n'est pas forcément un grand voyageur, il lui suffit de savoir regarder.

Les règlements de compte à Harlem, la prohibition, le procès de l'enlèvement du bébé Lindbergh, Mitchell se fait un nom dans la presse. Son obsession des détails, sa capacité à faire vivre ses sujets attisent la curiosité d'un nouveau titre, qui veut pousser les frontières du journalisme. Il s'agit du New Yorker, dont les très longs articles consacrent un genre littéraire nouveau : la narration non fictive.

De 1938 à 1964, Joseph Mitchell en devient une plume admirée qui va inspirer de nombreux écrivains américains comme Paul Auster. C'est dans les bas fonds de New York qu'il trouve ses personnages. Pêcheurs, dockers, voyous, indiens bâtisseurs de gratte ciels, la faune urbaine du marché aux poissons de Fulton Street, ses salons miteux, Mitchell sublime chaque détail et évoque un monde grouillant avec un empathie non feinte pour cette partie de la ville qui échappe à la lumière.

Joseph Mitchell reste peu connu en France. Les Éditions du sous-sol qui ont déjà édité Le fond du port considéré comme son chef d'oeuvre et viennent de publier Arrêtez de me casser les oreilles et Old M. Flood. Ce dernier, personnage pittoresque du New York des années 1940, a deux particularités : il a décidé qu'il vivrait jusqu'à 115 ans et pour y parvenir, il ne se nourrit que de poissons et crustacés trouvés à Fulton Street.

Il est aussi le secret de Joseph Mitchell, car ce bon Mr Flood n'a jamais existé, ou plutôt, il est un personnage composite, fruit d'un assemblage, d'un arrangement malin avec la réalité. Ce génie du récit, un jour, se tarit et en 1964, Joseph Mitchell, qui ne reconnaissait plus sa ville, cessa d'écrire. Il meurt en 1996. T.F.

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Un film : "Phase IV" 

Paradoxalement, le climat actuel semble aiguiser l'appétit du public pour les films angoissants, proche de ce qui se passe dans la réalité. C'est le moment de revoir Phase IV, l'unique film réalisé par Saul Bass sorti en 1974 et qui ressort en DVD restaurée haute définition dans quelques jours. 

C'est l'histoire d'une équipe scientifique confinée dans sa base, au milieu d'une colonie de fourmis, très intelligentes et très mal intentionnées. Le film fait frémir avec ses gros plans d'insectes. Chaque image et chaque couleur est particulièrement travaillée et saisissante.

C'est aussi l'occasion de redécouvrir son auteur, Saul Bass, plus connu pour ses génériques et ses inventions graphiques. Il a d'abord dessiné des logos des marques Kleenex, Quaker, Warner ou encore Exxon, avant de réinventer le générique de film avec ses dessins géométriques, ses animations géniales et ses lettrages colorés et vivants qui donnent le ton de ce qui va suivre.

De L'Homme au bras d'or d'Otto Preminger à Psychose d'Alfred Hitchcock jusqu'à Steven Spielberg et Martin Scorsese, les plus grands réalisateurs ont fait appel à lui. Saul Bass a travaillé sur des centaines de films, mais il n'en compte qu'un seul à son actif comme metteur en scène. E.L.

Cette nouvelle version de phase IV ressort chez Carlotta Films. En attendant, le film est disponible en format simple DVD ou Blu-Ray. Une version de luxe avec un ouvrage de 200 pages sur ce film unique et son remarquable auteur est aussi disponible. 

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