Pas de kiné respiratoire, lavage de nez… Les nouvelles recommandations pour soigner la bronchiolite des bébés
Des recommandations publiées par la Haute Autorité de santé déconseillent de recourir à la kiné respiratoire pour soigner les bébés atteints de bronchiolite. Cette position des experts n'est pas nouvelle, ce qui n'a pas empêché cette méthode d'être largement prescrite depuis vingt ans.
Un bébé qui tousse, respire mal et dont la poitrine siffle : la bronchiolite est la hantise des parents. Pour mieux la traiter, de nouvelles directives officielles sont publiées, jeudi 14 novembre. La bronchiolite est une maladie respiratoire fréquente, qui touche 30% des bébés de moins de 2 ans chaque hiver, soit 480 000 cas par an, selon les estimations officielles. Causée par un virus, elle est très contagieuse. Ses principaux symptômes sont une toux et une respiration difficile, qui devient rapide et sifflante. Franceinfo fait le point sur ces recommandations de la Haute Autorité de santé, qui concernent les bébés de moins de 12 mois.
Pas de kiné respiratoire
Aujourd'hui, la bronchiolite est très souvent prise en charge par des séances de kinésithérapie respiratoire. Des manipulations souvent impressionnantes, censées aider le bébé à mieux respirer en évacuant les sécrétions qui le gênent. Or "les techniques de kinésithérapie respiratoire traditionnelles comme le clapping ou la vibration sont contre-indiquées dans la bronchiolite aiguë", écrit la HAS. Cette méthode est en effet "responsable d’effets indésirables significatifs et doit être proscrite", argumente l'autorité indépendante. Une autre technique de kiné, l'augmentation de flux expiratoire, n'est, elle, pas recommandée car elle n'a "pas fait la preuve de son efficacité". Il faut "sortir de l'idée selon laquelle bronchiolite = kiné", explique à l'AFP le chef du service pédiatrie du CHU de Rouen, Christophe Marguet, qui a participé à la rédaction de ces nouvelles recommandations.
La kiné ne figurait pas non plus dans les précédentes recommandations, qui dataient de 2000. Ce qui ne l'a pas empêchée d'être massivement prescrite. "Nous sommes le seul pays avec la Belgique où la kiné est utilisée de façon large dans les cas de bronchiolite", souligne auprès de l'AFP la professeure Dominique Le Guludec, présidente de la HAS. Selon elle, il existe toutefois "des cas particuliers où cela peut être utile, par exemple chez des enfants handicapés". Le débat sur la kiné respiratoire n'est pas nouveau. En 2012, la revue Prescrire avait rapporté qu'elle n'était pas efficace contre la bronchiolite, ce qui avait provoqué les protestations des kinésithérapeutes.
Contactés par franceinfo, les représentants des kinés défendent leurs pratiques. "La kiné respiratoire, ce ne sont pas que des manœuvres de drainage bronchique, il y a toute une évaluation qui est faite, un mouchage si les voies respiratoires supérieures sont encombrées", explique Pascale Mathieu, présidente de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes. Elle relève également que certaines pratiques, comme le clapping ou la vibration, sont contre-indiquées depuis 1994 et "qu'aucun kiné ne fait ce genre de techniques". "Je ne lis pas dans ce rapport qu'il ne faut pas prescrire des soins de kiné. Cette prise en charge évite un recours massif aux urgences", insiste-t-elle.
Président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs, Sébastien Guérard pointe le manque d'études sur le sujet. "Le mal dont souffre la kinésithérapie aujourd'hui, c'est l'absence d'études étayées", assure-t-il. Dans ses recommandations, la Haute Autorité de santé souligne "la nécessité de poursuivre la recherche et de mener des études permettant de mesurer l’impact de cette technique [l'augmentation du flux expiratoire], en particulier sur le recours aux hospitalisations". Le pédiatre Christophe Marguet reconnaît au micro de franceinfo qu'"il nous manque des études en ambulatoire, pour les personnes qui ne viennent pas à l'hôpital et qui peuvent garder leurs bébés à la maison. Dans la mesure où l'on n'a pas de données, on ne peut pas recommander la kinésithérapie respiratoire."
Pas de médicaments
Le traitement médicamenteux n'est pas non plus recommandé, qu'il s'agisse des bronchodilatateurs comme la Ventoline, des corticoïdes ou des antibiotiques (réservés aux "cas rares de surinfection bactérienne").
Des lavages de nez et de la surveillance
Sans kiné ni médicaments, la prise en charge de la bronchiolite est fondée sur "le lavage de nez régulier et la surveillance des signes d'aggravation". Le lavage de nez est nécessaire pour que les bébés respirent car ils sont incapables de se moucher seuls. Pour évacuer la morve, il faut vider une dosette de sérum physiologique dans la narine du nourrisson couché sur le côté.
Facile à dire mais pas forcément à faire sur un bébé qui se débat, comme l'ont expérimenté les parents. Ce geste "les angoisse : il y a une technique, et il est important que les professionnels de santé la leur apprennent", souligne le professeur Pierre-Louis Druais, pour qui les kinés ont leur rôle à jouer dans cette formation.
La HAS détaille également les signes à surveiller. D'un côté, ceux qui nécessitent la prise de rendez-vous chez le médecin : modification du comportement, respiration plus rapide, creusement du thorax, nourrisson qui boit moins depuis plusieurs repas. De l'autre, ceux qui impliquent un appel au 15 : signes de cyanose (coloration bleutée) autour de la bouche, malaises, pauses respiratoires, nourrisson qui dort tout le temps.
Un nouveau classement selon le niveau de gravité
La principale nouveauté de ces recommandations est de classer les cas de bronchiolite selon trois niveaux de gravité, pour que les médecins puissent mieux orienter les petits patients. Les formes légères ne nécessitent pas d'hospitalisation, les formes modérées peuvent y aboutir au cas par cas et les formes graves sont dirigées d'emblée vers l'hôpital. Actuellement, 2 à 3% des nourrissons de moins d'un an sont hospitalisés pour une bronchiolite chaque année, estime l'agence sanitaire Santé publique France.
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