Et si les vers marins pouvaient nous sauver la vie ?
Et si les océans pouvaient nous sauver la vie ? Un chercheur breton a fait une découverte qui pourrait révolutionner la greffe d'organes, mais pas seulement. Le secret de ce ver marin, qui serait capable de prolonger la durée de vie des organes destinés à la greffe, réside dans son hémoglobine qui transporte quarante fois plus d'oxygène que le sang humain.
Un ver aux propriétés étonnantes
Depuis douze ans, Franck Zal, chercheur en biologie marine, s'interroge sur les propriétés étonnantes de ce ver marin, dont les origines remontent à plus de 400 millions d'années. "Ce ver arrête de respirer quand il est à marée basse, quand il est sur la plage. Il peut s'arrêter de respirer pendant six heures. Il vit juste avec l'oxygène qu'il a fixé sur ses molécules d'hémoglobine qui lui permettent d'attendre la prochaine marée haute", explique Franck Zal, docteur en biologie marine.
Mais quel est le secret de ce champion en apnée ? Pour percer ce mystère, Franck Zal a cherché dans son sang ou plutôt dans son hémoglobine, chargée de transporter l'oxygène. Il y a découvert des molécules 200 fois plus petites que celles de l'homme. Et surtout elles sont capables de fixer 40 fois plus d'oxygène. C'est cette énorme réserve qui permet au ver de respirer à marée basse. De quoi s'interroger sur la capacité de ces molécules à oxygéner des organes humains, comme des greffons par exemple.
Une révolution pour les greffes d'organes
Dans son laboratoire, le chercheur a testé sa découverte sur des tissus de poumons : "On a montré qu'un poumon que l'on peut conserver pendant six heures, on est capable de le garder pendant plus de 48 heures sans aucun dommage. On a une collaboration notamment avec une équipe de Toronto au Canada où ils vont aller jusqu'à 7 jours", précise Franck Zal. Ce produit pourrait donc bien révolutionner la greffe d'organes, notamment la période durant laquelle le greffon est acheminé vers le receveur. Des heures durant lesquelles l'organe souffre du manque d'oxygène.
A l'hôpital de Brest, un néphrologue a voulu en avoir le coeur net. En 2017, il entame un essai clinique sur soixante patients. La moitié a reçu un rein conservé dans des conditions classiques, l'autre un rein qui a trempé dans l'hémoglobine du ver marin. Non seulement le produit a bien été toléré mais surtout il s'est avéré très efficace comme l'explique le Pr Yannick Le Meur : "Les greffons qui ont reçu la molécule fonctionnent plus rapidement, redémarrent plus vite en quelque sorte, ils ont moins besoin de séances de dialyse après la greffe, et ils ont des fonctions rénales qui sont meilleures. On a donc pour la première fois une molécule qui pourrait agir sur cette période et donc bien sûr, cela est fondamental".
Etudes en cours
Une étude est en cours pour confirmer ces résultats. Entre-temps, le Pr Laurent Lantieri entend lui aussi parler de cette innovation et veut la tester. Le chirurgien s'apprête à réaliser sa huitième greffe de visage. Pendant les quatre heures de trajet, le greffon trempe dans l'hémoglobine du ver marin. A la fin de l'opération, au moment de rétablir la circulation sanguine, le greffon rosit immédiatement. L'expérience s'avère prometteuse. A ce jour, son patient se porte bien.
En attendant les résultats des études en cours, Franck Zal mise tout sur le ver de sable. A Noirmoutier, il a créé une ferme marine qui pourra produire dans des bassins près de 30 tonnes de vers par an. Car d'autres applications sont en projet comme des pansements cicatrisants ou de la poudre lyophilisée d'hémoglobine.
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