Une justice d'exception dénoncée
Un projet gouvernemental envisageant de bouleverser la procédure pénale en cas de pandémie de grippe A fait débatUn projet gouvernemental envisageant de bouleverser la procédure pénale en cas de pandémie de grippe A fait débat Le Syndicat de la magistrature dénonce un "dispositif liberticide" et la "volonté de créer une justice d'exception par ordonnances gouvernementales, sans débat démocratique", dans une lettre à la ministre de la Justice.
Il s'agit "de mesures envisagées dans le cas où on serait dans une situation catastrophique", répond Mme Alliot-Marie.
Dans ce courrier, révélé par Libération, le Syndicat de la magistrature cite notamment le projet de confier les audiences pénales à un seul magistrat, "en violation du principe de collégialité". Le huis clos des débats pourrait être généralisé, et les mineurs envoyés devant le tribunal correctionnel.
Par ailleurs, le gouvernement envisagerait de ne permettre aux gardés à vue de voir leur avocat qu'à la 24e heure de détention, plutôt qu'au début, mais aussi "de prolonger les délais de détention provisoire de 4 à 6 mois sans audience ni débat devant le juge des libertés et de la détention qui statuerait sur dossier". Enfin, "tous les délais de prescription" seraient suspendus.
Dans la lettre adressée à Michèle Alliot-Marie, le syndicat assure ne pouvoir "tolérer que de telles atteintes aux principes démocratiques soient envisagées par le gouvernement" et "demande expressément" à la ministre "de renoncer à la mise en oeuvre d'un tel dispositif liberticide".
Le Syndicat de la magistrature critique en outre que les textes du plan gouvernemental aient été "transmis dans le plus grand secret" aux chefs de cour en juillet 2009.
Interrogée par l'AFP, la Chancellerie a "formellement contesté qu'il s'agisse de mesures attentatoires aux libertés", sans infirmer les informations du syndicat. "Ce mesures sont au contraire protectrices des libertés", selon Guillaume Didier, porte-parole du ministère de la Justice. "Nous avons prévu un plan équilibré, avec différents stades, établissant des mesures graduées dont les plus dérogatoires au droit commun n'auront vocation à s'appliquer qu'en cas de crise sanitaire très grave", a-t-il expliqué.
"Il s'agit d'un document de travail", a-t-il ajouté, précisant qu'aucun calendrier permettant d'aboutir à une législation par ordonnance n'était établi et qu""on ne sait même pas si la situation imposera d'adopter ce texte".
Le syndicat des avocats de France (SAF) a dénoncé mercredi comme "antidémocratiques" des mesures que le gouvernement envisagerait d'appliquer dans le cadre d'un plan de lutte contre la grippe A (H1N1).
Le syndicat de la magistrature a dit mardi avoir eu connaissance de projets de textes qui circulent dans "le plus grand secret" et qui permettraient au gouvernement de légiférer par loi d'ordonnance. Le texte, signé par Rachida Dati alors qu'elle était ministre de la Justice et par Michèle Alliot-Marie lorsqu'elle était ministre de l'Intérieur, a été diffusé aux chefs de cours et aux procureurs en juillet, dit le SAF.
La ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie, dément qu'il y ait "un plan secret" pour assurer la continuité de la justice en cas de pandémie de grippe mais le ministère a expliqué mardi qu'il s'agissait d'un "document de travail provisoire" dans l'hypothèse d'une crise sanitaire grave empêchant les juridictions de fonctionner normalement.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.