"Ce n'est pas un endroit pour faire ça" : un père et une mère interdits d'allaiter leur bébé dans un commissariat
Le couple s'est rendu au commissariat du 2e arrondissement de Paris pour effectuer des procurations avant la présidentielle, quand leur fils de 2 mois a exprimé sa faim.
"Pouvoir allaiter son bébé me semblait être un droit acquis. En fait, ce n'est pas le cas", s'indigne Nicolas, "un peu sous le choc" après ce qui vient de lui arriver. D'après ce père de 30 ans, des policiers du commissariat du 2e arrondissement de Paris n'ont pas laissé son épouse allaiter leur bébé dans le bâtiment. "Ils nous ont dit que ce n'était pas un endroit pour faire ça, qu'on n'avait pas à imposer ça aux autres, et qu'on était des mauvais parents", raconte-t-il à franceinfo.
"Il nous a dit que les gens n'avaient pas à voir ma femme en train d'allaiter"
Après une balade dans les rues de Paris, lundi 10 avril, ce père de famille se rend au commissariat avec sa compagne et leur fils de deux mois pour faire des procurations avant l'élection présidentielle. La petite famille fait la queue à l'extérieur du bâtiment, quand leur bébé se met à pleurer. "J'avais mon fils contre moi, maintenu dans une écharpe, et il a commencé à avoir faim, explique Nicolas. Nous avons alors demandé à une policière s'il était possible d'entrer dans le bâtiment", pour s'asseoir et allaiter le bébé. "On nous a d’abord dit que c’était pas possible parce qu’il n’y avait pas de salle disponible", explique Nicolas précisant aux fonctionnaires qu'ils peuvent encore patienter un peu à l'extérieur.
Un des supérieurs vient alors les avertir qu'il est impossible d'allaiter à l'intérieur des bâtiments : "Il nous a dit que les gens n'avaient pas à voir ma femme en train d'allaiter. On leur a expliqué qu'on pouvait bien sûr mettre un drap sur mon bébé, mais il a dit non."
Nicolas et sa compagne décident alors de rentrer chez eux. Mais quelques minutes plus tard, la mère retourne au commissariat pour demander le nom du fonctionnaire de police dans le but d'écrire une lettre racontant la situation à la préfecture. Elle s'entretient avec un troisième policier. Le ton monte, selon la famille.
Il nous a dit avec mépris qu'on était des parents indignes pour emmener un enfant dans un commissariat. Qu'on avait qu'à venir chacun notre tour pour faire notre procuration.
Nicolasà franceinfo
"C'est inadmissible que l'on puisse empêcher l'accès à un bâtiment"
Dans la loi, rien n'interdit à une femme d'allaiter son nouveau-né dans un lieu public. Pour défendre leur droit à allaiter leur enfant, le couple a lancé une pétition sur la plateforme Change.org. Vendredi midi, elle avait recueilli près de 9 000 signatures. L'ex-ministre, Cécile Duflot, s'en est fait le relais sur Twitter.
Respecter et faites respecter le droit aux femmes d'allaiter et aux bébés de téter en public. Signer là : https://t.co/TxdciX9v1e
— Cécile Duflot (@CecileDuflot) 13 avril 2017
Le couple a aussi obtenu le soutien de la mairie du 2e arrondissement. "Nous avons envoyé un courrier à la commissaire pour faire le clair sur ce qu'il s'est passé, explique-t-on au cabinet de l'édile écologiste, Jacques Boutault. C'est inadmissible que l'on puisse empêcher l'accès à un bâtiment à une maman qui souhaite allaiter. C'est tout ce qu'il y a de plus normal et de plus naturel.
"Des conditions d'intimité et d'hygiène non adaptées"
Sollicitée par franceinfo, la préfecture de police de Paris évoque une situation "exceptionelle" et "regrette de n'avoir pas pu donner satisfaction à cette famille dont la demande était bien compréhensible."
Au vu de l'affluence forte au commissariat ce jour-là du fait des procurations ainsi que des conditions d'intimité et d'hygiène non adaptées à la situation, le policier en charge de l'accueil du public a fait part à cette famille de l'impossibilité de pouvoir donner une suite favorable à leur requête.
Préfecture de police de Paris
De son côté, Nicolas espère recevoir un appel de la commissaire. "Le plus choquant, c'est la fragilité dans laquelle on se trouve, conclut Nicolas. Quand on est parent et que son enfant pleure, ça devient très important de le nourrir. Alors, lorsqu'on est face à une institution de la République qui ne peut pas le comprendre, on se sent très vulnérable."
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