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Euthanasie : "Il y a d'autres voies" pour le député-médecin Marc Delatte, qui soulève un problème "éthique"

La proposition de loi dont vont débattre aujourd'hui les députés, "c'est simplement un droit à l'euthanasie", critique l'ancien médecin membre du Comité consultatif national d’éthique.

Article rédigé par franceinfo
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Marc Delatte, député LREM de la 4e circonscription de l’Aisne, membre du Comité consultatif national d’éthique et médecin, le 29 octobre 2019. (CHRISTOPHE MORIN / MAXPPP)

L’Assemblée nationale examine jeudi 8 avril la proposition de loi déposée par le député Olivier Falorni (groupe Libertés et Territoires) pour un droit à "une fin de vie libre et choisie". "Cela pose un problème éthique, le conseil de l'ordre [des médecins] a dénoncé cette proposition de loi", a réagi sur franceinfo Marc Delatte, député LREM de la 4e circonscription de l’Aisne, membre du Comité consultatif national d’éthique et médecin lui-même pendant trente ans.

franceinfo : Pourquoi ne voterez-vous pas cette proposition de loi ?

Marc Delatte : Il faut faire attention à la façon dont on vous sert le couvert. Le titre de la loi c'est "donnant droit à une fin de vie libre et choisie". Il faut appeler un chat un chat. C'est simplement un droit à l'euthanasie. C'est toute la problématique de l'intentionnalité de provoquer la mort. Est-ce que demander la mort quand on souffre n'est pas un choix libre ? C'est toute la problématique. On a le serment d'Hippocrate, [prêté par les médecins avant de commencer à exercer], qui dit que je ferai tout pour soulager les souffrances, je ne prolongerai pas abusivement les agonies et je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Cela pose un problème éthique en tant que personne au-delà du médecin. Le Conseil de l'Ordre [des médecins] a dénoncé cette proposition de loi. Quand on va dans les centres de soins palliatifs, on ne peut pas appeler à la clause de conscience personnelle. Chacun est dans cet esprit d'accompagnement de soin et dans le respect de la dignité de chaque personne. Ce que veulent les Français, c'est une fin de vie décente.

La société française semble de plus en plus prête à débattre sur le sujet. Qu'en pensez-vous ?

24 % de Français appellent à obtenir un droit à l'euthanasie, c'est vrai. Qu'ils en débattent pour moi cela montre la vitalité de notre démocratie. Je fais référence à un sondage de l'Ifop du 10 mars. Mais ce que veulent les Français c'est ne pas faire l'objet d'un acharnement thérapeutique, ne pas subir de douleur et être accompagné par ses proches. On a un système juridique avec la loi Leonetti qui dicte le fait qu'il faille mettre tout en œuvre pour soulager les symptômes et jusqu'à la sédation profonde et maintenue jusqu'au décès.

Cela ne suffit pas pour beaucoup de personnes. Que leur répondez-vous ?

Dans les [centres de] soins palliatifs, la demande de mort disparaît presque toujours avec une prise en charge adaptée.

"La voie de l'euthanasie est un acte violent avec des séquelles lourdes sur l'entourage familial, des deuils plus difficiles, des culpabilités, des complexités de l'annonce aux enfants. On a d'autres voies."

Marc Delatte, médecin et député LREM

à franceinfo

Il faut faire connaître la loi sur les directives anticipées, la personne de confiance. À l'heure où tous les soignants sont engagés pour sauver des vies face au virus est-ce bien raisonnable de discuter d'une proposition de loi d'une niche ? Il faut des réponses, mais cela passe par le déploiement d'une culture palliative en France et le ministre a proposé un plan où on se donne vraiment les moyens. Il faut faire attention de ne pas engendrer des souffrances pour les personnels soignants. Beaucoup m'ont dit que si cette loi passait ils reverraient leur attachement aux services de soins palliatifs.

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