Affaire Joël Guerriau : "Il y a beaucoup de gens qui sont soumis chimiquement qui n'en ont pas conscience", alerte l'avocate Caty Richard

Le sénateur Joël Guerriau est soupçonné d'avoir drogué la députée Sandrine Josso en vue d'une agression sexuelle.
Article rédigé par franceinfo
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L'avocate Caty Richard s'adresse à la presse à la cour d'assises du Val-d'Oise à Pontoise le 9 juillet 2021. (LUCAS BARIOULET / AFP)

"Il y a beaucoup de gens qui sont soumis chimiquement qui n'en ont pas conscience", a alerté Caty Richard, avocate pénaliste à Pontoise (Val-d'Oise), mardi 21 novembre sur franceinfo. La députée Sandrine Josso qui accuse le sénateur Joël Guerriau de l'avoir droguée pour l'agresser sexuellement, a pris la parole lundi dans "C à vous" sur France 5 : "On peut tous subir ce que j'ai subi", a-t-elle témoigné.

Caty Richard salue la prise de parole de la députée. "Ça peut être partout, tout le temps. Il n'y a pas de victime cible. Il faut y penser", insiste-t-elle. L'avocate conseille de faire vite quand il y a un doute : "On peut immédiatement se rendre dans un hôpital, se rendre dans un laboratoire le plus vite possible", car "il y a des choses qui sont volatiles et beaucoup de drogues qui le sont moins"

franceinfo : C'est important qu'une députée prenne la parole de cette manière ?

Caty Richard : Ce qui est important, c'est qu'on parle de la soumission chimique. Quand on parle du chiffre noir du viol, on n'imagine pas la profondeur du chiffre noir de la soumission chimique. Il y a beaucoup de gens qui sont soumis chimiquement qui n'en ont pas conscience. Il y a aussi des gens qui sont témoins de soumission chimique et qui n'en ont pas conscience. Ce qui est très important, c'est de parler.

La soumission chimique, ce n'est pas seulement le GHB en boîte de nuit. C'est aussi au quotidien. Je pense à une gamine qui est invitée à une soirée pyjama chez une copine. Le grand frère est là, il fait boire les deux et il abuse de la copine. 

"Malheureusement, ça peut être partout, tout le temps. Il n'y a pas de victime cible. Il faut y penser, il faut l'avoir à l'esprit."

Caty Richard, avocate

à franceinfo

En dehors du cadre des discothèques, on est moins prudent ?

La soumission chimique est dans la nourriture ou même dans la petite tisane du soir. Elle est souvent accompagnée d'un verre d’alcool sans que ça soit forcément la fiesta totale. On ne peut pas empêcher que des substances puissent être détournées. En revanche, il faut être très vigilant pour soi, pour les autres. J'en fais un cheval de bataille.

Il faut que les personnels de santé soient avertis. Dans deux de mes principaux dossiers, j'ai des clients qui sont allés voir des neurologues en disant : "J'ai des absences." On a cherché du côté de l'épilepsie. On a cherché du côté de tout et n'importe quoi, mais on n'a pas cherché du côté de la soumission chimique. Je le déplore.

C'est une façon de détourner la question du consentement ?

Il faut savoir que le viol et l'agression sexuelle sont définis par la loi, par un acte sexuel, avec ou sans pénétration, commis avec menaces, violence ou surprise. Clairement, la soumission chimique permet le rapport sexuel par surprise. Parfois, le souvenir n'existe même pas dans le cadre de la soumission chimique. Il faut d'abord prendre conscience d'avoir été droguée, prendre conscience d'avoir été abusée. Il faut se croire. Ça paraît aberrant de le dire, mais on peut penser : "Non, je délire. Ce n'est pas possible, il est trop bien, il est trop sérieux."

Il y a plein de femmes qui ne vont pas avoir confiance en elles se disant : "C'est peut-être moi qui étais fatiguée." Lorsqu'il y a un doute, on peut immédiatement se rendre dans un hôpital, se rendre dans un laboratoire le plus vite possible. Il y a des choses qui sont volatiles et beaucoup de drogues qui le sont moins. Donc, on peut retrouver des choses. C'est très important.

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