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Ce qu'il faut savoir sur l'affaire Adlène Hicheur, physicien condamné pour terrorisme

Le tribunal correctionnel de Paris l'a condamné vendredi à cinq ans de prison, dont un avec sursis.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Dessin réalisé lors du procès d'Adlène Hicheur devant le tribunal correctionnel de Paris, le 29 mars 2012. (BENOIT PEYRUCQ / AFP)

Le tribunal correctionnel de Paris a condamné vendredi 4 mai Adlène Hicheur, un physicien détaché au Cern (Conseil européen pour la recherche nucléaire) de Genève, à cinq ans de prison, dont un an avec sursis, pour avoir participé à une "association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme". Le juge lui reproche d'avoir échangé des mails équivoques, dont certains évoquant de possibles attentats, avec un responsable présumé d'Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi).  

Hicheur a déjà accompli deux ans et demi de détention provisoire depuis son arrestation, le 8 octobre 2009 à Vienne (Isère). Lors de ces années, il n'a cessé de clamer son innocence. Un comité de soutien s'est formé et 600 scientifiques ont réclamé sa libération conditionnelle. Le 13 octobre 2011, il a reçu le soutien de la prestigieuse revue scientifique américaine Nature.

En raison du jeu des remises de peines, "il devrait sortir assez prochainement", a annoncé son avocat, Patrick Baudouin. FTVi récapitule.

• L'affaire en deux mots

Le cœur de l'accusation repose sur 35 messages électroniques échangés entre le chercheur et un certain Mustapha Debchi, responsable supposé d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La défense conteste avec vigueur l'identité de ce mystérieux interlocuteur sur lequel se base l'essentiel des charges.

En mars 2009, Adlène Hicheur avait écrit à Mustapha Debchi être prêt à proposer des objectifs "en Europe et notamment en France". Dix jours plus tard, il été allé plus loin et avait évoqué "un pur objectif militaire" : la base aérienne de Cran-Gévrier (Haute-Savoie), qui forme des soldats avant de les envoyer en Afghanistan. A l'audience du 30 mars, le prévenu avait minimisé l'importance de ce message. "Il n'y a jamais eu de dévolu sur quoi que ce soit", s'était-il emporté. La base de Cran-Gévrier, "c'est apparu une fois et ce n'est plus jamais apparu".

Il avait mis ces mails "tangents" sur le compte de son "état de santé physique et psychologique" de l'époque, où il était en arrêt-maladie pour une hernie discale. Et lors de son procès, le prévenu a épinglé à de multiples reprises des méthodes policières "malhonnêtes" et les "inexactitudes" de l'enquête menée par les juges antiterroristes.

• Ce qu'a décidé le tribunal

A l'issue de deux jours d'audience, le parquet avait requis six ans de prison ferme à l'encontre du physicien. Mais cette fois, la 14e chambre a estimé qu'il avait servi "de relais et de soutien logistiques et médiatiques à diverses structures terroristes de la nébuleuse islamiste radicale, en participant à des discussions via des flux internet avec un membre d'Aqmi parti dans le maquis algérien".

Pour le tribunal, il s'agit de "faits graves". Toutefois, il a accordé à Adlène Hicheur un an de sursis en prenant en compte la personnalité du prévenu qui, au cours des débats, "a employé plusieurs fois le terme d''humiliation' et l'on sent, à travers les messages de cet homme intelligent et fier, la douleur d'appartenir à un peuple qui a effectivement été colonisé pendant deux siècles".

• La réaction de ses proches

"C'est un Guantanamo français", a dénoncé à l'issue du délibéré le frère du prévenu, Halim Hicheur. Tout en reconnaissant les "propos parfois inquiétants et certes critiquables" de son client, Me Baudouin a dénoncé pour sa part "un scandale judiciaire", car Adlène Hicheur a été condamné "au vu de simples mots échangés sur le net".

Avocat et frère réagissent au jugement du procès d'Adlène Hicheur (FTVi / France 2)

"C'est l'aboutissement logique du rouleau compresseur de la justice antiterroriste", a conclu l'avocat, considérant que cette décision "contre-productive" était "un coup de main donné par la justice" aux "véritables terroristes" qui font "leur pain blanc des failles de la démocratie". Il ignore pour l'instant si son client compte faire appel.

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