Camps de harkis : "Il faut que le gouvernement mène une politique de réparation à la hauteur", rappelle un fils de harkis après la condamnation de la CEDH

La justice européenne estime insuffisantes que les réparations prévues par la France pour ces familles, rapatriées d'Algérie après son indépendance et enfermés dans des camps. Une reconnaissance pour leurs enfants.
Article rédigé par Thomas Séchier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Rassemblement de harkis et de leurs descendants au mémmorial du camps de Rivesaltes, le 19 mars 2022. (NICOLAS PARENT / MAXPPP)

La justice européenne donne raison aux quatre enfants de harkis qui l'avaient saisie. En 1962, leurs parents font partie des rapatriés. Les Tamazount échappent au massacre en Algérie et se retrouvent dans des camps du sud de la France. Rivesaltes d'abord, Bias ensuite.

C'est l'une des pages noires de l'histoire de France : le sort réservé aux harkis après la guerre d'Algérie. Ces musulmans, qui ont combattu aux côtés de l'armée française en Algérie, dont une grande partie a été oubliée par la France, laissée en Algérie. D'autres ont été rapatriés en France, mais dans des conditions déplorables. Aujourd'hui, la France est condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme, qui juge que les conditions de vie dans ces camps étaient incompatibles avec le respect de la dignité humaine.

Les membres de la famille Tamazoult passeront 13 ans enfermés, sans aucune liberté, rappelle Charles Tamazount, président du comité Harkis et vérité, et cinquième enfant de la famille. "Ils ne pouvaient pas sortir du camp, raconte-t-il. Ils n'avaient pas le droit d'accéder à l'école de la République, puisque la scolarisation se faisait au sein même du camp, entre enfants de harkis. Le courrier qu'ils pouvaient recevoir était censuré, ouvert par l'administration du camp. Et enfin, leurs prestations sociales étaient détournées, spoliées par l'État français pour faire fonctionner la structure du camp."

"Les harkis ont vécu dans le dénuement le plus total pendant plus de 15 ans."

Charles Tamazount

à franceinfo

Au total 40 000 harkis et leurs enfants sont passés par ces camps. Certains ont perdu la vie faute de soins. L'insalubrité récurrente et plusieurs soulèvements conduisent l'État à faire fermer les camps à partir de 1975, mais il faut attendre 2001 pour que Jacques Chirac exprime la reconnaissance de la France aux harkis. En 2021, Emmanuel Macron leur demande pardon. En 2022, une loi portant reconnaissance de la nation est votée et prévoit une réparation des préjudices subis.

Des réparations jugées insuffisantes

C'est une autre victoire pour les associations de harkis qui dénonçaient le barème fixé par le gouvernement. La Cour européenne estime que les 16 000 maximum prévus pour 13 ans passés dans les camps ne sont pas suffisants. Des miettes, dénonce même Charles Tamazount : "On ne peut pas avoir une action de réparation des pouvoirs publics aussi ridicule et qui se résume à quelques milliers d'euros. Il faut que le gouvernement mène une politique de réparation à la hauteur de la gravité des préjudices endurés par ces familles de harkis."

Le comité Harkis et vérité réclame, lui, 10 à 15 000 euros par année passée dans les camps, au titre de la détention arbitraire. Il espère de nouvelles décisions de justice favorables. Une dizaine de dossiers similaires sont sur le bureau de la Cour européenne des droits de l'homme et de nombreux contentieux sont aussi entre les mains de la justice administrative en France.

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