À peine ouvert, le procès des disparus du Novotel d'Abidjan a été reporté
Près de six ans après la disparition du directeur français du Novotel d'Abidjan et de trois clients, les familles attendent que justice soit faite. Mais le procès prévu mardi en Côte d'Ivoire a finalement été reporté au 21 février.
Le procès des disparus du Novotel d'Abidjan devait s'ouvrir mardi 31 janvier, en Côte d'Ivoire, mais il a été reporté au 21 février. L'affaire avait éclaté en avril 2011, en pleine crise post-électorale ivoirienne, avec l'enlèvement par un commando militaire du directeur de l'hôtel, le Français Stéphane Frantz Di Rippel et de trois clients, dont l'industriel français Yves Lambelin. Seul le corps de cet homme d'affaires a été identifié. Les familles attendent toujours que les zones d'ombres soient levées et que justice soit faite.
Une période de troubles et de combats à Abidjan
Le 4 avril 2011, la fin est proche pour le président déchu Laurent Gbagbo. Lui qui refuse la victoire à son rival Alassane Ouattara a été poussé dans ses derniers retranchements. À Abidjan, son clan contrôle encore le quartier du Plateau, où le Novotel est implanté. Une douzaine de journalistes s'y sont installés. En début d'après-midi, des hommes en treillis, armés de kalachnikov, font irruption dans l'hôtel. Michel Scott, grand reporter à TF1, fait partie des journalistes présents. Installé au 8e étage de l’hôtel, il se souvient qu'une alerte est donnée. "Il y a des intrus dans l’hôtel, il y a des soldats ou des miliciens, planquez-vous dans vos chambres." Michel Scott reste ainsi une vingtaine de minutes à l'abri. Quand il sort, il comprend que "quelque chose a eu lieu".
Le geste "héroïque" du directeur de l'hôtel
A l’étage en dessous, le directeur du Novotel, Stéphane Frantz Di Rippel, a été emmené hors de l'établissement, ainsi qu'un industriel, Yves Lambelin, et deux autres clients. Selon des témoins, les membres du commando ont demandé au directeur s'il y avait des journalistes dans l'hôtel. Il a répondu par la négative. "Il nous a sans doute sauvé la vie", estime Michel Scott. "Son geste, son réflexe à ce moment-là, est protecteur pour nous. Ne serait-ce que pour ça, il a eu une attitude héroïque", déclare le journaliste.
Pendant des semaines, personne n'obtient de nouvelles des quatre hommes, jusqu'à début juin 2011, avec la découverte de plusieurs corps dans la lagune. Ce qui s’est passé reste flou.
Des suppositions insoutenables pour les proches
La dernière fois que Karine, la compagne de Stéphane Frantz Di Rippel, a eu des nouvelles de son ami, c'est dans un mail, le 4 avril 2011, reçu vers midi. Karine est au Togo, où elle a été évacuée pour des raisons de sécurité. Deux heures plus tard, Stéphane Frantz Di Rippel est emmené par des hommes du clan Gbagbo. "Un commando d’une douzaine de personnes, armées de fusils d’assaut et de kalachnikov est rentré dans l’hôtel", relate-t-elle. "Stéphane Frantz Di Rippel, Yves Lambelin et deux de ses collaborateurs, auraient été emmenés dans le palais présidentiel, pour être interrogés, torturés et tués", déclare la compagne du dirigeant de l'hôtel.
"On ne sait toujours pas où est Stéphane, s’il a été jeté dans la lagune, s’il a été enterré", se désole Karine.
L'ombre du couple Gbagbo
Dix accusés sont renvoyés devant la justice. Parleront-ils ? Pierre-Olivier Sur, avocat de la famille de Stéphane Frantz Di Rippel, espère des réponses, en particulier sur la possible implication de Laurent et Simone Gbagbo. "Est-ce que la décision est leur décision, ou pas ? On ne le sait pas, mais c’est bien la question première", déclare l'avocat, qui énonce les autres interrogations : "Pourquoi ? Comment ? Où a été jetée la dépouille ?" Me Sur estime que pour la famille, les proches, et en particulier les deux filles du directeur du Novotel, le deuil implique des réponses.
Le procès, à peine ouvert mardi, a été renvoyé au 21 février prochain.
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