Montigny-lès-Metz : le feuilleton judiciaire se poursuit
Un procès
qui n'aura duré que deux jours. Décidément, tout est hors norme dans l'affaire
du double meurtre de Montigny les Metz. Le tueur en série Francis Heaulme devait être
jugé un mois à Metz, pour le meurtre en septembre 1986 de Cyril et Alexandre, deux
petits garçons de huit ans. Mais son procès a été renvoyé mardi en fin de
journée. Cela devait être le 4è procès, dans cette affaire synonyme de l'une
des plus graves erreurs judiciaires. Patrick Dils a passé 15 ans derrière les
barreaux avant d'être acquitté en 2002.
Découvrez en cliquant sur la photo ci-dessous les lieux, les personnages et les faits marquants de l'affaire de Montigny-lès-Metz
Ce qui a
conduit à ce renvoi ce sont de nouveaux éléments sur Henri Leclaire, un homme
qui avait avoué le crime avant de se rétracter et d'être disculpé. Samedi, deux
jours avant l'ouverture du procès, dans le secret du bureau du président de la
Cour d'assises, Gabriel Steffanus, une femme d'une cinquantaine d'année se
présente. Elle est mariée à un avocat réputé en droit social du barreau de
Metz. Son nom : Marie-Christine Blindauer.
Elle demande
à être entendue par la justice pour raconter une scène qui la hante. Il y a un
an et demi, dans sa cuisine, Henri Leclaire, qui livre ses courses, lui fait de
surprenantes confessions sur ce dimanche 28 septembre 86. Il dit qu'il était près du talus,
et qu'il a corrigé Cyril et Alexandre, qui le gênaient dans son travail. A
cette époque, il ramasse les papiers qui traînent autour de la benne. Ce
témoignage considéré comme solide, s'ébruite dès le premier jour du procès. Les avocats sont interloqués, le président de la Cour d'assises est obligé de bouleverser
le calendrier de l'audience pour entendre cette femme et la confronter à Henri
Leclaire.
A REVIVRE |
Montigny-lès-Metz : le 1er jour surprenant du procès Heaulme
Leclaire à
la barre
Deuxième
jour du procès, Henri Leclaire, homme robuste de 65 ans, retraité, avare de
parole, est à la barre. Très vite, l'audition de cet homme qui n'est encore
qu'un simple témoin devient un interrogatoire. Le président le crible de
questions et Henri Leclaire s'enferre : "Je ne sais pas, je ne m'en
souviens plus, je n'ai pas dit ça, je l'ai dit mais c'est pas vrai <".
Francis
Heaulme n'existe plus, lui que tout le monde attendait somnole dans son box, ce
n'est presque plus son procès. Henri Leclaire, lui, semble bien seul face à la
Cour, jusqu'à ce que l'avocate de Francis Heaulme prenne d'une certaine façon
sa défense : "On est dans commissariat là ", s'insurge Liliane
Glock, "je refuse de l'interroger dans ces conditions ". Le
renvoi semble inévitable, trop de questions, de zones d'ombres et cet homme qui
a le droit d'être défendu, rappelle son avocat thomas Hellenbrand, qui parle
d'une "parodie de justice ".
Mardi
après-midi, après ces témoignages, toutes les parties sont donc d'accord :
avocat général, famille des victimes, défense de Francis Heaulme, il faut renvoyer
ce procès. "Pour que ", souligne le président, "lorsqu'il
rend sa décision, qu'il n'y ait pas d'autres catastrophes judiciaires après
celle vécue par Patrick Dils ".
A REVIVRE |
Notre live sur le 2 e jour du procès de Francis Heaulme qui a abouti
sur un renvoi
Vers un 5e procès
Au moment
de l'annonce du renvoi, la maman d'Alexandre est en larmes, le père de Cyril
aussi. L'impression d'un gâchis, que la justice qui avait prononcé un non lieu
pour Henri Leclaire aurait dû faire différemment. Même si, Me Moser, l'avocat
du père d'Alexandre, estime qu'il y a désormais peut-être l'espoir de savoir
enfin ce qui s'est passé ce jour-là.
Même espoir
pour Chantal Beining, la maman de Cyril. Ce renvoi est peut-être le bout de
notre tunnel. "Ce sera pas fait en six mois ", sait-elle, mais
elle est prête car elle a fait la promesse à son fils de découvrir la vérité.
Au niveau
de la procédure judiciaire, le procureur de Metz va être saisi par le parquet général
sur les nouveaux éléments de l'affaire. Il va ensuite choisir, ou pas, d'ouvrir
une information judiciaire contre Henri Leclaire. Si c'est le cas, un juge
d'instruction sera saisi, ce qui permettra une mise en examen jusqu'à son
éventuel renvoi devant une Cour d'assises. Il serait alors jugé aux côtés de Francis
Heaulme. Tout cela prendra au minimum un an et demi mais comme l'a souligné
hier le président de la Cour : "L'entière vérité est à ce prix ".
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