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La Cour de cassation reconnaît le lien de filiation entre le couple Mennesson et leurs jumelles, nées d'une GPA réalisée à l'étranger

Les magistrats ont rendu vendredi leur décision sur le cas, devenu emblématique, de la famille Mennesson, dont les jumelles sont nées par GPA en Californie il y a dix-neuf ans. Ils considèrent qu'une gestation pour autrui réalisée à l'étranger "ne peut faire obstacle à la reconnaissance d'un lien de filiation avec la mère d'intention".

Article rédigé par franceinfo
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Dominique et Sylvie Mennesson, accompagnés de l'une de leurs deux filles, Fiorella, le 5 octobre 2018 à Paris. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

Au terme de près de deux décennies de bataille juridique, leur filiation est, enfin, entièrement reconnue. La Cour de cassation a rendu, vendredi 4 octobre, une décision favorable au couple Mennesson, dont les jumelles sont nées d'une gestation pour autrui (GPA) il y a dix-neuf ans en Californie, où ce procédé est légal.

Dans sa décision, la plus haute juridiction française a autorisé la transcription à l'état civil français des actes de naissance américains de leurs deux filles, Fiorella et Valentina, ce que réclamaient Dominique et Sylvie Mennesson depuis 2000. Après de multiples recours, du couple d'une part et du parquet d'autre part, cette transcription en droit français avait été annulée en 2010 à la suite d'une première décision de la Cour de cassation.

Mais, dans ce nouvel arrêt rendu vendredi, qui s'appuie sur un changement de jurisprudence consécutif à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en 2014, la Cour de cassation considère, cette fois, qu'"une GPA réalisée à l'étranger ne peut faire, à elle seule, obstacle à la reconnaissance en France d'un lien de filiation avec la mère d'intention".

Jusqu'à présent, la jurisprudence de la Cour de cassation ne permettait pas une telle transcription des actes de naissance, s'agissant de la mère d'intention, préconisant la solution de l'adoption. Or la plus haute juridiction française estime désormais, dans cette "affaire spécifique", que la solution de l'adoption n'est pas satisfaisante, notamment "au regard du temps écoulé depuis la concrétisation du lien entre les enfants et la mère d'intention", explique-t-elle dans son arrêt. 

La reconnaissance du père biologique enfin établie

Ce dossier emblématique, pour lequel la Cour avait de nouveau sollicité l'avis de la CEDH en octobre 2018, posait donc essentiellement la question du statut, en droit français, de la mère d'intention, Sylvie Mennesson, qui a désiré et élevé les enfants mais n'en a pas accouché. Concernant Dominique Mennesson, le père biologique, sa reconnaissance de paternité n'était pas non plus établie jusqu'ici, du fait de l'annulation de la transcription des actes de naissance il y a neuf ans. Ce qui est désormais le cas, de façon irrévocable.

La question posée à la Cour de cassation était la suivante : "Le lien de filiation entre un enfant né d'une GPA à l'étranger et le père biologique, d'une part, la mère d'intention, d'autre part, doit-il être reconnu et si oui, par quel moyen ?" Dans une décision taillée sur mesure pour le "cas particulier" de la famille Mennesson, la Cour de cassation, répond, donc, "oui", "au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant". "Cette reconnaissance doit avoir lieu au plus tard lorsque le lien entre l'enfant et la mère d'intention s'est concrétisé", précise la plus haute juridiction française dans son communiqué.

"Nos enfants ne sont plus des fantômes"

"Nos enfants ne sont plus des fantômes. Ce sont nos enfants, légalement parlant", a réagi le père des jumelles, Dominique Mennesson, devant la presse au palais de justice de Paris. "C'est une immense victoire pour la famille Mennesson, la fin d'un combat de dix-neuf ans", a salué l'avocat de la famille, Patrice Spinosi.

"La GPA reste une ligne rouge infranchissable", a réagi, de son côté, la porte-parole du ministère de la Justice, contactée par franceinfo. "La prohibition de la GPA reste la règle, mais l'intérêt de l’enfant est pris en compte", précise Agnès Thibault Lecuivre. 

Pour le ministère de la Justice, cette décision "sécurise la jurisprudence antérieure", avec la transcription en droit français des actes de naissance pour le père biologique et par la voix de l’adoption pour établir le lien de filiation avec la "mère d'intention".

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