L'Assemblée nationale dit "oui" au mariage pour tous : 329 députés pour, 229 contre
Après dix jours de débats houleux, les députés ont voté solennellement en faveur du projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe. Que va-t-il se passer maintenant ? Quand seront célébrés les premiers mariages ?
Une étape décisive vient d'être franchie vers le mariage pour tous. L'Assemblée nationale a voté, mardi 12 février, en faveur du projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe à une large majorité. 329 députés ont voté pour, 229 contre, et 9 députés se sont abstenus.
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a salué l'issue du vote peu après sur Twitter, se disant "fier" de sa majorité.
Vote solennel : je suis fier de cette majorité qui porte la loi sur le mariage pour tous, belle et grande avancée pour l’égalité.
— Jean-Marc Ayrault (@jeanmarcayrault) February 12, 2013
Après dix jours d'une bataille parlementaire intense menée par une poignée de députés UMP, le combat autour du texte est cependant loin d'être terminé. A quoi peut-on s'attendre maintenant ? Le projet de loi peut-il être bloqué ? Quand pourront être célébrés les premiers mariages ? Francetv info vous détaille la suite de ce long processus.
Et maintenant ?
Après ce vote à l'Assemblée, le projet de loi sur le mariage pour tous doit maintenant être examiné par le Sénat. Après des auditions d'associations, de spécialistes, de familles homoparentales, de responsables religieux, similaires à celles menées par les députés à l'automne, les sénateurs devraient plancher sur le texte à partir du 2 avril.
Deux scénarios sont possibles. Les sénateurs peuvent voter "conforme", c'est-à-dire sans modification, le texte adopté par les députés. "C'est possible à condition de bien travailler ce dossier en amont. Il faut prendre un certain nombre de garanties", a déclaré à ce sujet le président PS du Sénat, Jean-Pierre Bel, jeudi 7 février. Dans ce cas, pas de navette, le projet de loi n'est pas examiné en seconde lecture à l'Assemblée nationale.
Autre hypothèse : les sénateurs modifient le texte. Les députés examinent alors le projet de loi en seconde lecture à partir du 20 mai, explique le président de la commission des lois Jean-Jacques Urvoas sur Twitter. Si le désaccord persiste entre l'Assemblée et le Sénat après ces deux lectures, une commission mixte paritaire (composée de sept députés et de sept sénateurs) doit se mettre d'accord, le dernier mot revenant à l'Assemblée nationale. Le texte pourrair alors être promulgué en juillet.
Qu'est-ce qui pourrait bloquer le texte ?
Le Conseil constitutionnel. Après adoption par le Parlement, la loi doit être promulguée par le président de la République. Dans l'intervalle, le Conseil constitutionnel peut être saisi. Une hypothèse hautement probable, Christian Jacob, patron des députés UMP, ayant promis samedi 9 février que "le combat [allait] continuer".
Les Sages ont un mois pour statuer (ce délai peut être ramené à huit jours à la demande du gouvernement). Le Conseil constitutionnel peut-il retoquer le texte ? Dans une tribune publiée par La Croix le 8 février, deux magistrats ont soulevé un risque d'inconstitutionnalité, concernant la question de la filiation : "Cette forme d’adoption [plénière] implique la rupture de filiation entre l’enfant et ses parents biologiques contrairement à une adoption simple. L’état civil de l’enfant adopté par un couple homosexuel mentionnerait qu’il est "né de parents de même sexe". Ce qui contrevient à 'un principe essentiel du droit français de la filiation' : celui de l’altérité sexuelle."
Toutefois, le président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré, a rappelé le 23 janvier qu'une précédente décision des Sages, datant du 28 janvier 2011, indiquait que "le contour du mariage, c'est au Parlement de le définir". "C'est de la compétence du Parlement, pas de la compétence du Conseil constitutionnel", a-t-il déclaré, écartant implicitement une censure du texte.
Le Conseil économique, social et environnemental ? Les opposants au texte se mobilisent sur un autre front : le collectif "La Manif pour tous" a affirmé lundi 11 février avoir réuni plus de 500 000 signatures pour la saisine du Conseil économique, social et environnemental (Cese) afin qu'il rende un avis (purement consultatif). Si le Cese juge la pétition recevable, il se saisit de la question. Un travail qui pourrait "retarder le projet de loi", car l'attente de l'avis du Cese serait "suspensive", selon les organisateurs de "La Manif pour tous", cités par Le JDD.
Contacté par francetv info, le Cese dément formellement : "Si nous décidions de la recevabilité de cette pétition, l'attente de notre avis ne serait en rien suspensive." "Nous sommes une assembée consultative qui n'a pas pour objet d'interférer dans un processus législatif en cours", précise le Cese, ajoutant que les opposants au mariage pour tous s'y prennent "un peu tard".
Quand seront célébrés les premiers mariages ?
Si le recours devant le Conseil constitutionnel est rejeté et que le Sénat adopte le texte de façon conforme, François Hollande pourrait promulguer la loi courant avril. Il faudra ensuite attendre les décrets d'application, "qui ne devraient pas trop tarder", selon un élu de la majorité. L'objectif du gouvernement est que les premiers mariages entre personnes de même sexe soient célébrés lors de l'été 2013, "un symbole fort" et le respect d'un engagement de campagne du chef de l'Etat.
Certains évoquent la fin mai pour la célébration des premières unions, mais le mois de juin reste "beaucoup plus probable, si tout se passe bien", explique une source proche du gouvernement qui veut "rester prudente". Quoi qu'il en soit, le "texte est promulgable début juillet", tweete Jean-Jacques Urvoas.
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