: Vidéo "Les gens sont beaucoup plus ouverts" : cinq ans après le mariage pour tous, des couples font le bilan
Le Parlement a définivement adopté cette loi le 23 avril 2013. Cinq ans plus tard, franceinfo a interrogé des jeunes mariés pour faire le bilan.
Le Parlement a définitivement adopté le mariage pour tous le 23 avril 2013. Cinq ans après, franceinfo a interrogé des couples qui ont pu se marier grâce à cette loi. "On a toujours eu la sensation, d’être du bon côté de l’histoire. Cinq ans plus tard, ça se vérifie (...) et j’en suis bien heureux", déclare à franceinfo Vincent Boileau-Autin, qui s'est marié avec Bruno Boileau-Autin le 29 mai 2013. Ils sont devenus des symboles en étant le premier couple homosexuel à se marier en France lors d'une cérémonie largement médiatisée.
Désir ancien et réponse à La Manif pour tous
"Si on s’est mariés, c’est encore plus parce que l’opposition des réactionnaires était telle que ça devenait évident qu’on devait se marier", expliquent à franceinfo Bruno Spire et Michel Bourrelly, le premier couple à s'être marié à Bobigny (Seine-Saint-Denis). La cérémonie de ces deux militants de longue date a, elle aussi, bénéficié d'un large retentissement médiatique, car des personnalités comme l'ancienne ministre Roselyne Bachelot et la codécouvreuse du virus du sida, Françoise Barré-Sinoussi, étaient leurs témoins.
Pour Vincent Basille et Vincent Bergeon, le mariage a également été une façon de répondre à La Manif pour tous et ses soutiens. "On a été profondément meurtris par la façon dont le débat s’est déroulé à l’Assemblée et dans la rue également. On avait l’impression d’être aux Etats-Unis dans les années de la ségrégation où les Blancs manifestaient contre les droits des Noirs", estime auprès de franceinfo Vincent Bazille. Leur mariage a été "l'occasion de marquer le coup, de dire 'Voilà, on a le droit de le faire alors on le fait et on n’attend pas que ce droit nous soit retiré'", poursuit-il.
"Je fais toujours la cuisine, il fait toujours la vaisselle"
Reste que le mariage n'a rien changé au quotidien pour ces couples. "Je fais toujours la cuisine (...). Il fait toujours la vaisselle. Ça n’a rien changé. Vraiment rien", raconte Michel Bourrelly, remarquant que lui et son époux sont ensemble depuis trente ans.
Les premiers temps, des gens ont eu "un peu de mal", relatent à franceinfo Rosemonde et Myriam Zebo-Jourdan, le premier couple de même sexe à s'être marié à la Martinique. Rosemonde raconte une scène typique : "Ils me disaient : 'Comment va ta… compagne ?' 'Non, non, mon épouse'. Et puis, voilà, on en rigolait et après c’est passé très facilement."
Vincent Bazille note que le mariage n'a "absolument rien [changé] dans l’organisation du quotidien" mais qu'il a eu une incidence symbolique "par rapport à notre famille, par rapport à nos parents en particulier". Et d'ajouter : "Je crois que ça a été aussi une forme de reconnaissance, de faire rentrer le couple homosexuel dans la norme sociétale."
Je vois que le rapport de mes parents, le rapport des parents de mon mari avec notre couple s’est normalisé.
Vincent Bazilleà franceinfo
"Pour nos amis, notre couple n’a jamais été remis en question. Par contre, pour notre famille, il y a toujours une notion de difficulté d’acceptation de l’homosexualité qui est présente", avance-t-il.
"C’est devenu banal"
Les avis sur l'évolution de la société française sont assez similaires chez les couples interrogés par franceinfo. "Les gens sont beaucoup plus ouverts. [Le mariage des homosexuels] est rentré dans les mœurs, maintenant. C’est peut-être fort ce que je vais dire, mais c’est devenu banal", juge Myriam Zebo-Jourdan.
"Je suis content de voir qu’aujourd’hui, plus de 70% des Français ne souhaitent pas revenir en arrière", déclare à franceinfo Vincent Boileau-Autin, faisant référence à plusieurs sondages, dont celui-ci. Soulignant avoir reçu quelque 18 000 messages à la suite de leur union, il raconte que "rien que le lendemain de notre mariage, des gens qui avaient défilé contre cette loi nous ont envoyé des messages en disant : 'J’ai vu votre mariage et en fait j’ai oublié une chose au milieu de ces débats houleux, c’est qu’il y a de l’amour en fait. Il y a juste de l’amour'."
"On a toujours cette homophobie latente"
Vincent Bazille appelle, lui, à la vigilance. "Je trouve que ça ne s’arrange pas. On a toujours cette espèce d’homophobie latente à laquelle on ne pensait pas avant les débats du mariage pour tous", déclare-t-il. "Le mariage pour tous, c’est comme toutes les avancées sociétales. Elles se passent de façon cyclique", analyse-t-il. "La pilule ou l’IVG sont, aujourd’hui, des notions qui sont remises en cause par des mêmes groupuscules extrémistes" en Europe, rappelle-t-il.
Vincent Boileau-Autin se montre également méfiant. "En 2018, les niveaux d’agression LGBTphobes, donc qui concernent les lesbiennes, les gays, les bis, les trans, c’est une véritable explosion", faisant référence aux chiffres du rapport 2017 de SOS Homophobie. Pour cette association, "la haine envers les personnes" LGBT "s'amplifie et s'ancre toujours aussi profondément dans notre société".
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