Rapport sur "l'échec" de l'EPR de Flamanville pour EDF : "On a le sentiment d'une véritable impasse", estime l'association négaWatt
Selon Yves Marignac, il n'y a, économiquement et d'un point de vue énergétique, plus de place à l'avenir pour de nouveaux projets nucléaires.
Un rapport concernant l'EPR de Flamanville, particulièrement critique envers EDF, a été remis lundi 28 octobre au gouvernement. L'EPR est un "échec" pour EDF, alors que le réacteur nucléaire de nouvelle génération n'est toujours pas mis en service, après des années de report du chantier. "On a le sentiment d'une véritable impasse", regrette lundi sur franceinfo Yves Marignac, directeur de l'agence d'études Wise-Paris et porte-parole spécialiste du nucléaire à l'association négaWatt.
Cet EPR sera-t-il bel et bien mis en service un jour ?
On peut se poser la question. Le constat que viennent enfin de tirer EDF et le gouvernement, et il était temps, de l'échec de ce projet, le puits sans fond du coût de ce projet et le risque de nouveaux problèmes et déboires techniques tant que le projet n'est pas achevé, permet de douter de la suite et de douter que ce réacteur entre en service un jour. Ce que le gouvernement et le rapport dessinent en creux, c'est la volonté de revenir à ce que j'appellerais un nucléaire régalien, le nucléaire tel qu'on l'a connu à l'époque du développement du programme, où l'Etat avait toutes les cartes en main, imposait son programme indépendamment des réalités de marché, favorable ou défavorable. C'est ce qu'on nous promet comme conditions de la réussite d'un nouveau programme de construction, sauf que ces conditions-là sont complètement obsolètes, elles ne sont plus compatibles avec le marché de l'électricité tel qu'on le connaît en creux. On a le sentiment d'une véritable impasse.
Le nucléaire pour produire de l'électricité est-il la forme d'énergie d'avenir, aujourd'hui, en France ? Il est souvent présenté comme tel, car il n'émet pas de CO2 par exemple.
Le nucléaire, dans le monde, n'a jamais fourni plus de 3% de l'énergie consommée mondialement. Il n'y a pas de perspective pour que cela s'inverse. Au contraire, les énergies renouvelables sont aujourd'hui en pleine croissance. Dès lors qu'on sort de la focale française et qu'on regarde notamment le marché de l'électricité en Europe, c'est une évidence que les énergies renouvelables, y compris avec le stockage qui est nécessaire au système électrique lorsqu'on s'appuiera davantage sur l'énergie solaire, l'énergie éolienne, apparaissent de plus en plus comme la filière la plus compétitive pour l'avenir. Il n'y a, économiquement, d'un point de vue énergétique, plus de place à l'avenir pour de nouveaux projets nucléaires. La seule raison de poursuivre dans cette voie, c'est la grandeur économique de la France, le rêve de puissance industrielle.
Pourtant, avec le parc automobile français, qui réduit la part de diesel, d'essence et qui cherche de plus en plus à développer les voitures électriques, la France aura besoin d'une grande quantité d'énergie électrique. Aujourd'hui, les énergies renouvelables ne sont-elles pas capables de fournir une telle quantité ?
Comme tous les pays du monde, la France a intérêt à maîtriser sa consommation d'énergie, en particulier d'électricité. Oui, il y a devant nous des transferts d'usage : plus d'électricité dans les transports, plus d'usage de l'électricité dans les bâtiments, même si ça doit être de façon beaucoup plus performante que le chauffage électrique actuel. Evidemment, les renouvelables ne peuvent pas, du jour au lendemain, fournir toute cette électricité. Mais si on se projette à l'horizon 2040-2050, c'est-à-dire à un horizon où le parc nucléaire actuel ne sera plus en service quoi qu'il arrive, et où de nouveaux moyens de production devront avoir été développés, il est beaucoup plus réaliste de parier sur le développement des énergies renouvelables, que de parier sur la reproduction du modèle que la France a construit dans le 20e siècle, un modèle du tout nucléaire, du tout électrique.
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