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On vous explique comment des images de Kaaris et Booba ont pu fuiter de la prison de Fresnes

Des images montrant Kaaris dans la prison de Fresnes circulent sur les réseaux sociaux, dont une selfie avec un autre détenu. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Le rappeur Kaaris, le 17 mars 2017.  (MOVIESTORE / SIPA)

Même derrière les barreaux, le rappeur Kaaris continue de faire parler de lui. Et tout comme lors de sa rixe avec le rappeur Booba à l'aéroport d'Orly le 1er août, les réseaux sociaux ont un rôle à y jouer. Des images du rappeur Kaaris dans la prison de Fresnesoù il a été écroué le 3 août, circulent en effet sur les réseaux sociaux. Une enquête interne a été ouverte, et le parquet saisi, a indiqué samedi 18 août la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP). Franceinfo revient sur cette fuite.

Que montrent ces images ? 

Depuis jeudi, une photo du rappeur Kaaris a fait le tour d'Instagram et des réseaux sociaux. Ce selfie, sur lequel on voit Kaaris en second plan avec un autre détenu, a bien "été pris au centre pénitentiaire de Fresnes", a confirmé, samedi sur franceinfo, Cédric Boyer, surveillant pénitentiaire de Force Ouvrière à Fresnes. Le selfie a été pris "soit dans une cellule ou une salle d'activités", a-t-il précisé. Pourtant, Kaaris est censé être à l'isolement. 

Et ce n'est pas la seule image du rappeur en prison qui circule. Des vidéos ont également été diffusées. On peut notamment y voir le rappeur faire les cent pas dans une cour. Enfin, des captures d'écran des fiches pénitentiaires de Kaaris et Booba, provenant d'un logiciel de l'administration, ont également fuité. Ces documents comprennent des informations sur les détenus, comme leur solde de cantine, et n'ont pas vocation à circuler, souligne la DAP contactée par l'AFP.

Quel règlement pour l'utilisation des portables en prison ? 

En théorie, les téléphones portables sont strictement interdits en prison. "L'utilisation ou la détention de téléphones portables ou de tout autre appareil communiquant est interdite", précise ainsi l'article 27 des règlements intérieurs types des établissements pénitentiares

Mais dans les faits, de nombreux téléphones portables circulent en prison, et le personnel pénitentiaire ont du mal à en réguler le trafic. En 2016, plus de 33 000 téléphones mobiles ont ainsi été saisis dans les prisons françaises, qui comptaient alors autour de 68 000 détenus, indique la DAP.

Pour faire face à ce problème, la ministre de la Justice a annoncé en janvier dernier le lancement de deux chantiers. D'une part, le déblocage dès cette année d'une enveloppe de 15 millions d'euros pour "garantir un brouillage effectif" et d'autre part l'installation de 50 000 téléphones fixes en cellule, pour ne pas couper les détenus de leurs proches. 

Comment les images ont-elles pu être prises puis diffusées ?

Tout porte à croire que ces images ont été prises grâce à des téléphones portables, pourtant interdits. "La cellule (de Kaaris) a été fouillée vendredi soir", a indiqué la DAP, précisant qu'un portable y a été retrouvé. Une source syndicale indique à l'AFP qu'un téléphone a aussi été saisi dans la cellule du détenu auteur du selfie avec Kaaris. 

Pour les syndicats, ces fuites de vidéos et de photos par le biais de téléphones n'a rien d'exceptionnel. "On ne va pas caricaturer parce que cela concerne Kaaris, mais les téléphones, il y en a énormément en détention qui entrent par les parloirs et divers trafics", affirme Cédric Boyer, surveillant et membre de Force Ouvrière, interrogé par franceinfo. 

Mais comment ces images ont ensuite pu être postées sur internet ? Avec les nouvelles générations de téléphones portables, les détenus disposant de téléphones portables ont accès à la 3G, la 4G ou encore la 5G. Les brouilleurs dont disposent les prisons sont "complètement obsolètes", a indiqué au Parisien Thibault Capelle, secrétaire local de Force ouvrière à Fleury-Mérogis. Les images ont donc pu être diffusées sur Instagram, Facebook et Snapchat. "Dès que la DAP a été informée de la circulation de ces images, une enquête interne a été ouverte et le parquet saisi", a-t-elle fait savoir.

D'où viennent les fiches de Kaaris et Booba ?

En théorie, seules les personnes habilitées par l'administration pénitentiaire ont théoriquement accès à ces documents, qui proviennent du logiciel de l'administration. Il s'agit des surveillants, de la direction et également du SPIP, le service pénitentiaire d'insertion et de probation, comme le précise à franceinfo Cédric Boyer, surveillant et membre de Force Ouvrière à la prison de Fresnes. En fonction du grade de la personne, l'accès aux informations est plus ou moins élargi. Celles visibles sur les captures d'écran des fiches pénitentiaires de Booba et Kaaris sont accessibles à tous, indique Cédric Boyer.

Comment des captures d'écran ont-elles pu fuiter ? Y a-t-il des responsabilités au sein de l'administration ? Ce sont les questions, plus épineuses, sur lesquelles va sûrement se focaliser l'enquête de la DAP. "Je pense que la personne qui a fait ça a voulu faire le buzz, mais déontologiquement parlant, c'est une faute", juge Cédric Boyer. Comme le rappelle Le Parisien, l’auteur de ces fuites risque une sanction administrative, ainsi qu'une plainte de la part des détenus dont les informations pénitentiaires ont été dévoilées sur la place publique.

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