Manifestation des auto-écoles : un syndicat craint "une ubérisation de l'éducation et de la sécurité routière"
Le président d'un des syndicats à l'origine de la mobilisation des auto-écoles appelle mardi à "une dématérialisation encadrée et maîtrisée" des inscriptions à la formation pour éviter une "ubérisation" de la profession.
Les représentants des écoles de conduites manifestent mardi 18 avril dans cinq villes de France, dont Paris, contre la dématérialisation des inscriptions à la formation, à l'appel des syndicats Unidec et CNPA. Patrice Bessone, président du CNPA-Education routière a dénoncé, sur franceinfo, une "ubérisation de l'éducation et de la sécurité routière". Il s'est toutefois dit favorable à "une dématérialisation encadrée et maîtrisée" et a demandé à rencontrer le Premier ministre Bernard Cazeneuve.
franceinfo : Que craignez-vous dans cette dématérialisation ?
Patrice Bessone : Ce qui nous fait peur, ce n'est pas la dématérialisation en tant que telle, mais l'ubérisation de l'éducation et de la sécurité routière. On est en train d'offrir un boulevard aux plateformes qui ont besoin de se refaire une santé financière. On craint une concurrence déloyale par rapport à l'école traditionnelle. Nous ne sommes pas contre la dématérialisation, nous voulons qu'elle soit encadrée et maîtrisée. Comme pour la carte d'identité et le passeport, nous souhaitons pouvoir aller en mairie pour scanner nos propres documents sur une borne numérique. Nous voulons une vérification d'identité et un aspect solennel de l'inscription au permis.
Qui donne les cours dispensés via ces plateformes ?
Justement, nous ne le savons pas nous-mêmes. Nous ne savons même pas s'ils sont diplômés. Vous imaginez un peu, la problématique ? Nous parlons de plus en plus de jeunes qui se tuent sur la route. Nous ne sommes pas sur un élément marchand, un produit de consommation courante. Nous sommes sur un enseignement pour que les jeunes ne se tuent pas. Alors arrêtons de jouer avec cela, arrêtons de dire que cela coûte cher. C'est comme si vous étiez en train de rabaisser, de dégrader l'Éducation nationale.
Y a-t-il quand même une forme de contrôle sur les formateurs ?
Non, aucun contrôle.
Ce qui veut dire que, si j'arrive à me procurer une voiture à double-commandes, je peux prendre n'importe qui dedans ?
Complètement. Une école de conduite a un agrément. D'ailleurs, les parlementaires, pendant le débat sur la loi Macron, ont refusé de libérer cela. Ils ont estimé qu'une école de conduite était quelque chose de sérieux : il faut que ce soit agréé, vérifié par l'État, que les formateurs soient diplômés, bénéficient d'une formation continue, d'un local, etc. Donc, les parlementaires ont re-sacralisé l'école de conduite. Derrière cela, lorsque l'on a un agrément, ce n'est pas une rente, pas un monopole pour l'auto-école. L'agrément veut dire qu'on est allé vérifier que les enseignants sont bien des enseignants qui ont des diplômes.
Sait-on combien de jeunes ont le permis de conduire via ces plateformes ?
Chez nous, nous sommes regardés sur le taux de réussite. Chez eux, aucune statistique n'est faite. En revanche, nous savons par l'éducation routière que la formation est totalement dégradée et que les échecs au permis de conduire sont importants. Mais ce n'est pas le plus important. Ce qui est important, c'est qu'ils n'ont pas les compétences nécessaires pour rouler en sécurité. Nous demandons au Premier ministre, Bernard Cazeneuve, de nous recevoir. Il a été le sauveur pour les jeunes, pour qu'ils puissent passer le permis plus rapidement : c'est grâce à sa réforme qu'il y a eu des places supplémentaires. On sait qu'il comprendra très vite la demande légitime des écoles de conduite de dire : "On n'interdit pas les candidats libres, mais on leur demande de se déplacer sur des bornes numériques en mairie pour qu'il y ait un premier contrôle."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.