: Témoignages "On dédramatise nos défauts" : les "influenceurs astrologie" à la conquête d'Instagram
Quelle aura va m’accompagner aujourd’hui ? La rétrogradation de Mercure et la nouvelle lune en Sagittaire ont-elles des conséquences sur mon quotidien ? Autant de questions auxquelles Jenny Fink, la créatrice du compte Instagram Sisters Astro répond quotidiennement.
Elle, et son équipe composée d’astrologues, de tarologues, de cartomanciennes et des numérologues, publient chaque jour des horoscopes et des conseils spirituels. Lancé en 2020, le compte de Jenny Finkelstein a très vite séduit les internautes. En deux semaines, le compte cumule "plus de 20 000 abonnés" confie l’entrepreneure. "Je l’ai d’abord fait pour moi, comme espace thérapeutique", poursuit la jeune femme de 31 ans. Diplômée en marketing, communication et commerce, Jenny Fink a créé le site et le compte Instagram après une année aux États-Unis, à Los Angeles, où elle a découvert "les arts divinatoires et les outils de développement personnels".
"Je voyais à quel point l'astrologie faisait sens dans nos conversations. On avait une autre façon de parler de soi, d'échanger. On dédramatisait aussi nos défauts", explique-t-elle. Un filon qu’il n’y avait pas ou peu en France à l’époque où la trentenaire lance ce qu’elle appelle un "média, un espace de parole et d’échange".
Un business lucratif
Depuis, le compte a fait du chemin et Sisters Astro propose "des consultations sur son site pour un montant de 50 à 100 euros" mais aussi des événements, des produits dérivés. La créatrice a également "lancé une école de spiritualité".
Plus récemment, l’influenceuse astrologue au plus de 157 000 abonnés a lancé une "hotline", une ligne d'assistance, dédiée aux questions des internautes : un "service plus accessible, plus instantané, une guidance moderne" explique Jenny Fink. Les utilisateurs peuvent écrire au numéro Whatsapp où une intelligence artificielle récolte les informations et les transmet aux tarologues et aux astrologues, par exemple. Une question coûte 20 euros, un conseil, 25 euros, les "compatibilités" sont à 45 euros et l’accompagnement est à 100 euros par mois pour dix questions. Les "messages de l’univers", eux, sont gratuits.
Le service reçoit "100 à 200 questions par jour", poursuit l'influenceuse, et le compte Instagram est suivi "à 97 % par des femmes de 24 à 35 ans", explique l’entrepreneure.
Une pratique critiquée
Reste que l'astrologie est aussi une pratique controversée. Serge Bret-Morel, ancien astrologue et auteur reconverti dans la critique de l'astrologie, fait, lui, la différence entre l’astrologie, l’étude des astres, et la pratique "populaire qui se résume à l’étude des 12 signes du zodiaque". Selon le conférencier, rien dans cette astrologie "populaire" n'a montré "la moindre pertinence" : "Les horoscopes sont une caricature technique de l'astrologie, et pour produire un horoscope, on va se limiter aux signes de naissance de la personne, c'est-à-dire la position du soleil à sa naissance", dénonce-t-il.
Pourtant, cette astrologie séduit de plus en plus de personne en France. Selon un sondage IFOP de 2020, 58% des Français déclaraient croire à au moins une des disciplines de parascience, "à savoir l’astrologie (41%), les lignes de la main (29%), la sorcellerie (28%), la voyance (26%), la numérologie (26%) et la cartomancie (23%)".
Pour Serge Bret-Morel, "il suffit de consulter différents horoscopes pour voir que c'est plus la créativité de l'astrologue qui est en jeu. Si son inspiration est bonne, il va donner des conseils qui parlent aux gens avec une sorte de bienveillance. Et quand on dit bienveillance, ça signifie un ton positif. Mais ce n'est pas forcément bienveillant de donner des conseils non pertinents à des gens", tacle-t-il.
"On a l'impression que les administrations sont un peu démunies devant ces domaines là"
Serge Bret-Morel, ancien astrologue et auteur reconverti dans la critique de l'astrologieà franceinfo
L’ancien astrologue point du doigt les risques de dérives sectaires et d’escroqueries. Des "pratiques caricaturales" dans les médias et sur les réseaux sociaux qui "ressemblent beaucoup à du divertissement". Et le conférencier de poursuivre : "Les administrations ne se rendent pas compte. Sur les réseaux, comme Instagram, TikTok, mais aussi sur YouTube, on a régulièrement des annonces de mouvements sectaires qui passent et qui sont diffusés auprès de milliers, peut être de millions de personnes et qui ne sont pas interdites".
Face à ces critiques, l’influenceuse Jenny Fink assure "comprendre" celles et ceux qui attribuent à l’astrologie surtout des vertus marketing : "On a instrumentalisé la tendance de l'astrologie à toutes les sauces, toutes les marques s'y sont mises... Donc oui, ça peut décrédibiliser un peu le message", reconnaît-elle. Avant de conclure : "Mon objectif, aujourd'hui, c'est de moderniser l'accès aux arts divinatoires et aux outils de développement personnel auprès du plus grand nombre. La spiritualité, elle, appartient à tous et qu'elle n'est plus réservée aux initiés."
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