Violences gynécologiques : "On recommande que le consentement soit explicite", insiste la vice-présidente du comité national d'éthique
"On recommande que le consentement soit explicite", estime mercredi 29 mars sur franceinfo Karine Lefeuvre, professeure à l'École des hautes études en santé publique au département des Sciences humaines et sociales, vice-présidente du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), co-rapporteure de l'avis 142 du CCNE. Le Comité consultatif national d'éthique recommande une attention renforcée de savoir-être à chaque étape des examens gynécologiques, dans un avis publié mercredi. Il faut "Un consentement exprès et non pas tacite", insiste Karine Lefeuvre.
franceinfo : A qui s'adresse cet avis ? Que signifie une attention renforcée de savoir-être ?
Karine Lefeuvre : Cet avis s'adresse aux professionnels de santé, mais aussi à l'ensemble des citoyens et des patients et patientes qui sont concernés par ces questions.
"Avec cette saisine de la Première ministre, sur un sujet particulièrement sensible, on a senti qu'il fallait apaiser les choses et rapprocher de part et d'autre sur la considération et l'écoute mutuelle. Il concerne tous les examens de la zone que l'on a qualifiée "d'extrême intime" c'est-à-dire tout ce qui touche à la sphère uro-génitale et anneau-rectale."
Karine Lefeuvre, vice-présidente du Comité consultatif national d'éthiqueà franceinfo
. Ces examens sont pratiqués par des professionnels de nature très différentes et pas uniquement des gynécologues et obstétriciens. À partir du moment où on touche à l'intimité, on a senti, par rapport à cette zone vraiment très particulière de l'extrême intime, qu'il fallait redoubler d'attention, y compris d'ailleurs, et peut être encore plus vis-à-vis des personnes les plus vulnérables. Et on a vu des associations, des ordres et collèges professionnels qui ont rédigé des chartes, des recommandations, par exemple vis-à-vis des mineurs, en disant que pour une première consultation, il est recommandé de ne pas procéder à l'examen mais expliquer les choses et lui demander de revenir pour qu'elle ou qu'elle comprenne bien. Il y a une intention aussi particulière vis à vis des personnes en situation de handicap par exemple.
Jusqu'à présent, le consentement était tacite ?
Dans certains États, notamment aux États-Unis, un consentement écrit est exigé. On a insisté sur le fait que le consentement devait être non pas écrit, parce qu'on a considéré que ça renforcerait de façon trop draconienne la procédure et nuirait à la relation de confiance. Mais on recommande un consentement qui soit explicite, différencié, qui se recueille en plusieurs temps. Donc un consentement exprès et non pas tacite.
"Quand une patiente franchit le seuil du cabinet médical, pour une consultation gynécologique, elle ne consent pas forcément à tout. Elle n'a pas forcément toutes les données. Donc il faut lui expliquer de façon très précise chaque étape."
Karine Lefeuvre, vice-présidente du Comité consultatif national d'éthiqueà franceinfo
Qu'est-il ressorti de ces auditions ?
Alors, le premier constat qu'on a fait, c'est qu'il y avait des colères de part et d'autre, à la fois du côté des professionnels qui se sentaient acculés, mis en question de façon globale, alors que la grande majorité d'entre eux s'investissent et font tout leur possible pour soigner mieux. Et une colère d'associations de patientes qui estimaient ne pas être suffisamment entendues. Et ce qu'on a retenu finalement, c'est qu'il fallait ne surtout pas minimiser la souffrance évoquée par certaines patientes qui ont pu aller jusqu'à des qualifications pénales, telles que le viol, en des choses anormalement graves. Donc, il a fallu apaiser et essayer de mieux comprendre les arguments des uns et des autres. De façon très pragmatique, on peut considérer que les professionnels qui ont déjà rédigé des chartes et des recommandations vont s'appuyer aussi sur l'avis du CCNE pour que chaque professionnel s'approprie ces nouvelles pratiques, même s'il y a déjà eu de réelles avancées.
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