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16 octobre 1968 : 50 ans après le "Black Power" des JO de Mexico

Il y a 50 ans ce mardi, a été pris le cliché le plus célèbre de l'histoire du sport. Lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968, les deux athlètes américains Tommie Smith et John Carlos brandissent un poing ganté de noir sur le podium du 200 mètres. Le symbole "Black Power" vise alors à dénoncer la discrimination raciale aux Etats-Unis. Mais cette année, c'est le troisième homme du podium qui est mis à l'honneur. L'Australien Peter Norman a soutenu le geste arborant comme eux un badge "Olympic Project for Human Rights". Longtemps, sa solidarité lui a valu d'être considéré comme un paria.
Article rédigé par franceinfo
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  (STR / EPU)

En 2012, six ans après la mort de Peter Norman, l'Australie lui présentait des excuses officielles. Il a fallut attendre 2018 pour que l'Ordre du Mérite lui soit remis à titre posthume et que soit décidée la mise en place d'une statue en bronze aux abords du stade Lakeside de Melbourne. Un hommage très en retard pour un héros de l'ombre pour qui la solidarité a coûté cher. Le 9 octobre sera désormais la "Journée Peter Norman" en Australie. Cette date est celle des funérailles du sprinteur, en 2006. Ce jour-là, parmi les porteurs du cercueil, il y avait deux anciens athlètes américains : Tommie Smith et John Carlos.

"Je me tiendrai à vos côtés", c'est par ces mots que l'Australien, 2e de la course avait affiché son soutien aux deux athlètes afro-américains avant de monter sur le podium. Norman avait décidé d'arborer le badge "Olympic Project for Human Rights" (projet olympique pour les droits de l'homme) sur le podium. Et c'est même lui, qui avait suggéré à Smith et Carlos, qui n'avaient qu'une paire de gant, de se la partager pour brandir chacun un poing ganté de noir. Les deux hommes avaient été ensuite suspendus et bannis du village olympique.

John Carlos quitte le village olympique avec sa femme, après avoir été suspendu pour le geste du "Black Power". (- / EPU)

Norman n'a pas échappé à la sanction, les autorités sportives de son pays estimant que son attitude avait sali son sport. En 1972, il n'est pas retenu pour les Jeux de Munich alors qu'il a réalisé les chronos requis, ce qui le pousse à mettre fin à sa carrière. Par la suite il devient conférencier et commentateur sportif. Mais même en 2000, plus de 30 ans après les faits, il n'est pas invité par le comité sportif australien à se rendre aux Jeux de Sydney.

Paria dans la vie, héros dans la mort

"Je crois dans les droits de l'Homme. Tous les Hommes sont nés égaux en droits et doivent être traités ainsi", indiquait Norman à des journalistes des années après Mexico, expliquant ne surtout pas regretter son choix. Il aura fallu attendre 50 ans pour que l'Australie reconnaisse enfin ce défenseur des droits humains. Il a vécu comme un paria, c'est finalement de manière posthume qu'il est érigé en héros. "Nous avons perdu Peter en 2006 mais nous ne devrions jamais perdre de vue sa courageuse position ce jour-là. Et son record australien sur 200 mètres, établi au Mexique (20.06), n'a jamais été égalé", a souligné le président de l'AOC, John Coates.

Harold (à gauche), Kaepernick (au centre) et Reid, genou à terre pendant l'Hymne nationale. (THEARON W. HENDERSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

50 ans plus tard, l'histoire semble inlassablement se répéter, le geste de l'ancien "quarterback" des San Francisco 49ers Colin Kaepernick rappelle étrangement cet épisode. Le joueur de la NFL avait provoqué un scandale national en 2016 - pour protester contre les meurtres de plusieurs Noirs abattus par des policiers blancs. Comme les trois hommes de Mexico, il a été ostracisé par le milieu du foot US, et n'a jamais re-signé un contrat pro. Pour certains sportifs Afro-Américains, l'ombre de la ségrégation plane toujours aux Etats-Unis et le combat des trois athlètes de Mexico trouve en eux ses héritiers.

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