1989, Edberg bute sur Chang
A l'orée de cette édition 1989 du plus grand tournoi du monde sur terre battue, Ivan Lendl fait figure de favori incontestable. Vainqueur de l'Open d'Australie, « débarrassé » de la menace Wilander, qui n'est que l'ombre de lui-même, le Tchécoslovaque débarque à Paris sûr de son fait. A tort. Dans le bas du tableau, peu de gens avaient misé sur la demi-finale théorique prévue par le tirage. Un Edberg-Becker, ça convient davantage au gazon londonien qu'à la terre ocre. Et pourtant.
Edberg au rendez-vous
Affûté comme jamais sans doute à Roland, Stefan Edberg va se frayer un chemin jusqu'au dernier carré en éliminant notamment de redoutables joueurs parmi lesquels Goran Ivanisevic (battu 7-5 6-3 6-3 en huitièmes) et surtout Alberto Mancini. Lauréat des tournois de Monte-Carlo et Rome, l'Argentin rêve de succéder à son glorieux aîné, Guillermo Vilas, au palmarès du tournoi français. Son coup droit démoniaque se brise cependant sur la finesse du Suédois volant qui plane littéralement sur la rencontre. Vainqueur 6-1 6-3 7-6 en pratiquant un tennis d'attaque splendide et efficace, le « grand méchant mou » accède aux demi-finales pour la première fois à Paris.
Un attaquant en finale
Il y retrouve Boris Becker, son compère offensif, victorieux de Perez-Roldan en huitièmes (en 5 sets acharnés) puis de Jay Berger en quarts, l'Allemand prouve à son tour que les serveurs-volleyeurs » peuvent rivaliser avec les « crocos » de la terre battue. La demi-finale s'annonce passionnante : au jeu plus complet et puissant de Becker, Edberg répond par une incessante ruée au filet et des volées du plus bel acabit. Les deux premiers sets lui reviennent d'ailleurs logiquement (6-3, 6-4) tant son jeu d'attaque fait merveille face aux coups de boutoir de « Boum - Boum ». Le mérite du double vainqueur de Wimbledon est de s'accrocher. Rentrant enfin dans la partie, le grand Germain arrache la troisième manche 7-5 puis la quatrième 6-3. Le public s'attend à une ultime manche de feu mais Edberg s'envole et laisse son rival sur place pour gagner 6 jeux à 2. Un attaquant va-t-il gagner Roland-Garros ? Depuis Noah, John McEnroe a échoué (en 1984) et Henri Leconte en a seulement rêvé (en 1988). Cette année qui célèbre le bicentenaire de la Révolution française marquera-t-elle la revanche des joueurs de filet sur ceux qui arpentent les lignes de fond ?
Chang à l'usure
La finale débute très mal pour le Scandinave, pris à la gorge par un Chang vif et habile, comme lors des tours précédents, où il a successivement sorti Lendl, Agenor et Chesnokov, qui s'empare du premier set (6-1) en une petite demi-heure. Encouragé par le Central, Edberg sort alors de sa torpeur pour imposer son délié et brillant tennis, ce qui comble les spectateurs. Il s'adjuge les deux sets suivants 6-3 6-4. Le match devient palpitant, offrant des séquences de jeu superbes entre deux combattants aux armes diamétralement opposées. Aux volées de revers du grand blond aux chaussures blanches, Chang répond en se fendant de passings croisés et de lobs millimétrés dignes du plus grand Wilander. Le tournant du match survient à l'entame du quatrième set. Edberg manque plusieurs balles de 2-0 décisives. Il a laissé passer sa chance. L'Américain égalise (6-4) à deux manches partout. Le plus dur est fait. Edberg lâche prise dans un cinquième set qui tourne au calvaire. Les courses de Chang ont eu raison des « vieilles jambes » du Suédois, harassé par la succession d'efforts. L'ovation qu'il reçoit ne comble pas l'énorme déception ressentie. Edberg n'inscrira pas, après Borg, Wilander et Pernfors, son nom sur la coupe des Mousquetaires. Un ange est passé.
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