Doha 2019 - Rénelle Lamote ambitieuse : "Il faut entrer en finale, après, tout est possible"
Qu’avez-vous ressenti après avoir réalisé les minimas pour les championnats du monde ? Le meeting de Paris constituait votre dernière chance, et vous avez terminé la course lessivée …
Rénelle Lamote : "C’était un énorme soulagement. Un poids s’est enlevé, malheureusement assez tard, parce que j’ai mis du temps à faire ces minimas, mais c’était très important pour la suite de ma saison. Je m’entraîne bien plus sereinement depuis que je sais que je suis qualifiée. Après les championnats de France, je savais qu’il ne me restait que trois courses, trois chances d’y arriver. C’était compliqué à gérer et finalement c’est la dernière qui a été la bonne. Mais à quel prix... J’étais épuisée, je n’arrivais plus à me lever et je ne savais plus où j’étais à l’arrivée".
Dans quel état d’esprit êtes-vous avant d’entrer en lice ? Conquérante ?
RL : "Oui, bien sûr. Je sais que cette dernière course était trop rapide pour moi mais elle m’a aussi beaucoup apporté. Je sens qu’à l’entraînement, c’est de mieux en mieux. Je suis confiante car j’ai beaucoup progressé. J’ai aussi fait une belle course aux Europe par équipes alors que je n’avais quasiment pas d’entraînement derrière moi. Donc je ne peux que positiver avant ces Mondiaux".
Quel est votre objectif personnel pour ces Mondiaux ?
RL : "Même aux Europe, quand j’étais potentiellement médaillable, l’objectif était de passer en finale. Sur le 800, c’est tellement indécis. Tout peut arriver et je pourrais très bien sortir en demi-finale en courant à mon meilleur niveau. L’objectif premier c’est de passer en finale, et après on verra. Je ne peux pas me projeter au-delà mais tout est possible".
Vous n’êtes pas descendue sous les deux minutes cette saison mais il faudra sans doute le faire pour entrer en finale ?
RL : "Oui, ce sera obligatoire. Et je pense que je vaux largement les moins de deux minutes. A Paris, si je n’avais pas eu cette pression des minimas, je n’aurais pas fait un départ inconsidéré, et j’aurais sans doute fait moins de deux minutes. Si j’étais passé dans mes allures de course habituelles, c’était largement jouable. Je sais ce que je fais à l’entraînement et ça ne m’inquiète pas pour la suite".
On se souvient de Pierre-Ambroise Bosse qui avait tenté le tout pour le tout en partant comme une fusée aux 400m à Londres il y a deux ans, avant de décrocher l’or. Est-ce que vous seriez capable d’un tel coup de folie ?
RL : "Non, ce n’est pas ma façon de courir. Quand Pierre-Ambroise a fait son incroyable retour, il a senti à l’instinct que c’était comme ça. Mais on ne peut jamais prévoir un 800m avant de le courir. C’est de l’improvisation. Tous les plans de course sont envisageables. Peut-être que je chercherai à mener la course de bout en bout, comme à Berlin, ou peut-être que j’attaquerai à la fin. Je m’entraîne pour savoir m’adapter à chaque situation".
Quelles adversaires craignez-vous le plus avant d’aborder les séries ?
RL : "Il y en a une qui sort vraiment du lot, c’est Ajeé Wilson. Elle est vraiment très forte. Quand je vois toutes ses courses cette saison, c’est clairement la favorite. Après, derrière elle, ça reste assez ouvert. Très sincèrement, si je passe en finale, je ne dois pas me mettre de barrières, tout est possible et il faut y croire. Sur le papier, je suis une outsider. Je ne pense pas que mes adversaires me craignent cette année mais justement, c’est beaucoup plus simple pour moi d’être dans cette position".
Ces Mondiaux se dérouleront sans la tenante du titre, Caster Semenya. Que pensez-vous de sa situation et plus généralement du débat qui entoure les athlètes hyper androgènes ?
RL : "C’est compliqué. J’ai couru plusieurs fois avec elle, nous avons de très bons rapports, mais je n’arrive pas à me faire une vraie opinion. Je pense que ce n’est pas juste pour nous, les athlètes, mais ce n’est pas juste pour elle non plus. Je ne pense pas que devoir prendre des produits soit la bonne solution, mais elle est tellement au-dessus. Je me dis que c’est peut-être autre chose que le talent. Pour moi, aucune athlète au monde ne peut la battre, c’est impossible. De toutes mes adversaires, je ne connais personne qui peut la battre".
Qu’avez-vous changé dans votre préparation depuis l’échec des Jeux Olympiques de Rio ? Vous disiez récemment vous sentir plus en confiance …
RL : "J’ai beaucoup travaillé sur le plan psychologique. Si je n‘avais pas connu un tel échec au JO, je n’aurais jamais rencontré ma psy. Ça m’a permis de travailler différemment, et de mettre l’accent sur ça à l’entraînement. J’ai pris conscience que la tête était aussi importante que les jambes. J’ai toujours eu le même entraîneur. Nos rapports ont dû évoluer. Avant, j’étais tout le temps stressée, je me mettais énormément de pression. Aujourd’hui, j’ai appris à avoir plus de lucidité par rapport à mon sport. Tout cela s’est fait assez naturellement".
Vous avez déjà une médaille continentale avec l’argent décroché aux championnats d'Europe à Berlin en 2018. Il vous manque la médaille mondiale. C'est l'objectif de votre carrière ?
RL : "J’aurais eu une magnifique carrière si j’arrive à ramener une médaille mondiale un jour. C’est l’objectif de ma carrière, évidemment. Ce serait mentir que de dire que je ne vise que la finale. Je vais avoir 26 ans, j’espère être au top de ma forme cette année et pour les Jeux Olympiques. C’est un peu maintenant ou jamais. L’année prochaine sera décisive".
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