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Pierre-Ambroise Bosse, la parole au travail

Champion de France ces trois dernières années du 800m, Pierre-Ambroise Bosse, qui dispute la finale mondiale à Pékin (14h55 en France) n’a pas encore obtenu ses lettres de noblesse sur le plan international. Champion d’Europe espoirs puis juniors, il avait raté l’an dernier la marche à l’Euro de Zurich. A Pékin, pour ces Mondiaux, il compte bien montrer que la leçon a été retenue: "Je vais profiter de tous ces voyants au vert pour courir sans complexe", a-t-il dit après sa demi-finale. Car derrière son côté affable et parfois chambreur se cache un athlète ambitieux et lucide.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
Le champion de France du 800m, Pierre-Ambroise Bosse (JULIEN CROSNIER / DPPI MEDIA)

"J'ai compris quelques  secondes avant le départ ce qui allait m'arriver. J'ai flippé comme un cadet." Pierre-Ambroise Bosse avait lâché ces mots juste après sa 8e et dernière place à l’Euro l’an dernier. Favori du 800m à Zurich, il avait coulé dans la ligne droite. Trop de pression. Cela l’a marqué. Et avant d’aborder ces Mondiaux, il assurait : "C’est un contexte très différent quand on est outsider ou favori. La pression est moindre. Et on a vu par le passé que cette pression, il valait mieux que je la boive, sinon je ne me débrouille pas si bien que cela." L'humour, le jeune homme ne s'en sépare jamais, quelque soit le contexte.

Il l’avait encore, dimanche soir, après avoir frôlé la sortie de route en demi-finale. Ils étaient quatre pratiquement sur la même ligne à l’arrivée de sa course. Et lui était le 4e, soit celle qui conduit en enfer. "Quatre sur la même ligne, c’est une sensation exceptionnelle, que je n’avais jamais vécu, et que je souhaite à tout athlète de vivre", lançait-il avec sincérité. Pour rester en vie, il devait donc compter sur son temps pour poursuivre l’aventure. Mais avec 1’45"02 au compteur, il n’espérait plus rien : "Je n’ai pas eu la trouille parce que pour moi, je n’étais pas qualifié", glissait-il après sa course. En fait, les trois autres séries ont été moins rapides. Il s'est donc emparé, avec gourmandise, de son billet pour la finale, et pas pour le chemin du retour en France : "Beaucoup de suspense, ça fait du bien", s'enthousiasmait-il.

Vidéo: Revivez sa demi-finale

Et de raconter à sa manière un épilogue qu’il n’espérait pas : "Je remercie Rudisha d’avoir couru aussi lentement. Et Amos a sauté. Je passe et lui est éliminé. Ce sont des vases communicants qui n’auraient jamais dû arriver. Je suis choqué, sur le cul." En plus Mohammed Aman, champion du monde en titre, qui l’avait devancé d’un souffle sur la ligne, a finalement été disqualifié. Pierre-Ambroise Bosse porte les stigmates de ce combat : "J’ai des clous enfoncés dans mon tibia, et j’ai une grosse contracture dûe à un choc." Mais il ne le dit pas pour se plaindre. Pour lui, cela fait partie de la course.

Vidéo: Sa réaction à chaud juste après sa course

Pierre-Ambroise Bosse : "C’est la jouissance, des courses comme ça"

A 23 ans, ce n’est pas un athlète comme un autre. Talentueux recordman de France de la distance (1’42"53) depuis le meeting de Monaco en 2014, il a le verbe sûr et la lucidité d’un "vieux renard" qui collent mal à ce visage encore très jeune, et sa propension à "chambrer". Son discours détonne parfois, chez les sportifs où la langue de bois et les phrases aseptisées ont pris beaucoup de place. "Confiance et sérénité", répète-t-il sans cesse depuis son arrivée en Chine. Un an après sa désillusion à l’Euro, il pose un regard précis sur sa mésaventure de l’été dernier : "Je pense que tout est directement lié au record de France. Il est peut-être arrivé trop tôt. Je ne pense pas que j’avais pris la grosse tête. Jusqu’à la dernière seconde, je craignais mes adversaires. J’ai dû faire un travail sur moi-même, et je pense que c’est en train de payer désormais."

"Le 800m, tu es obligé de travailler"

Début juillet, il a conquis son troisième titre consécutif de champion de France du 800m, en plus de 1’46. Son meilleur temps, cette saison, il l’a réalisé à New York en 1’43"88, ce qui le place au 12e rang de la hiérarchie mondiale. L’an dernier, il avait la 2e marque mondiale, ce qui ne l’avait pas mené sur le podium européen. Le temps importe peu dans un championnat, seule la place compte. Les demi-finales de dimanche l’ont encore prouvé. Il fait partie du Top 8 à Pékin.

Pierre-Ambroise Bosse emmagasine de l’expérience à chaque sortie. Champion d’Europe juniors en 2011, espoirs en 2013, 7e des Mondiaux de Moscou la même année, il sait que la remise en cause doit être permanente. "J’avais été capable de gagner en jeunes. J’ai démontré que je gérais bien la pression en juniors et en espoirs. Je ne voyais pas pourquoi cela n’allait pas passer au-dessus." Il a amèrement constaté que ce n’était pas le cas. Et il a appris: "Le 800 m, tu es obligé de travailler".

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