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500 miles d'Indianapolis - Simon Pagenaud : "Tout était écrit"

Bernard Hinault et Yannick Noah attendent toujours leur successeur. Gaston Chevrolet, lui, a enfin trouvé le sien après une longue, très longue attente. Presqu’un siècle. 99 ans qu’un français n’avait pas remporté les 500 miles d’Indianapolis. Ce 26 mai 2019, Simon Pagenaud rejoint son glorieux aîné (franco-suisse, natif de Beaune, vainqueur en 1920 sous les couleurs françaises) dans l’histoire du célèbre ovale américain. Un an après, retour avec le pilote poitevin sur l’un des plus beaux exploits du sport français.
Article rédigé par Gael Robic
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
  (PHILLIP ABBOTT / LAT PHOTOGRAPHIC)

Simon, vous avez fêté récemment votre 36e anniversaire. Mais ce 26 mai 2019 reste-t-il le plus beau jour de votre vie ? 
Simon Pagenaud : "C’est le plus beau jour de ma vie, ça c’est clair ! Le jour de la pole position, c’était mon anniversaire. Une pole à Indianapolis, c’est déjà quelque chose ! C’est un exercice de style, de la vitesse pure. Vous devenez le pilote le plus rapide du monde pendant un an ! C’est aussi symbolique, car seulement 20% d’entre eux parviennent à concrétiser. Alors oui, signer la pole et gagner les 500 miles, c’est juste incroyable !" 

Revenons sur ce dimanche particulier. En 1980, au matin de son sacre mondial à Sallanches, Bernard Hinault prévient l’hôtelier de mettre le champagne au frais pour le soir même, car il sera champion du monde. Vous vous sentiez dans cet état d’esprit ? 
SP :
"C’est peut être un peu prétentieux, mais j’avais un sentiment de confiance extraordinaire. Au réveil, j’ai dit à mon épouse : "Hailey, prépare le drapeau français et Norman (leur chien, star des réseaux sociaux, ndlr) !" Elle était surprise, car je ne dis jamais çà le matin d’une course ! Le plus dur a été de trouver un drapeau français à Indy (rires) !" 

En course, pendant 3 heures, on a le sentiment que rien ne peut vous arriver. Tout se déroule idéalement, comme dans un film…
SP : "On a pris le commandement tout de suite. J’avais le sentiment que tout était écrit. Tout s’enchaînait parfaitement : les drapeaux jaunes tombaient au bon moment, les ravitaillements étaient parfaits…Quand on avait besoin d’un petit coup de pouce, ça arrivait. Les gars ont fait du super boulot. C’est un de mes meilleurs jours en sport automobile. On a fait une course parfaite. Aucune erreur. Oui, rien ne pouvait nous arriver."

"Pris dans un tourbillon"

Vous vous souvenez de l’après ? 
SP : "C’est une folie !!! Comme si j’étais pris dans un tourbillon. Un sacré tourbillon ! Je suis sorti de la voiture, j’ai regardé la foule…C’était flou.  Il y avait tellement d’émotions, je ne savais plus où j’habitais ! Comme un trou noir. J’ai réalisé avec la bouteille de lait (trophée traditionnel offert au vainqueur des 500 miles). J’ai compris que ça venait d’arriver ! Je venais de gagner ! Sentir ce lait sur mon visage, c’était un véritable électrochoc ! Ensuite, je suis passé d’interviews en interviews. Je ne m’appartenais plus." 

Et le réveil, le lendemain matin ! 
SP : "C’était vraiment un matin incroyable : je me suis levé en pleine forme ! Je n’ai pas beaucoup dormi ! On a bien fêté çà ! Mais le réveil a été facile. J’étais heureux. Comme si c’était fait. Je me sentais totalement libéré, plus frais, plus jeune (rires) !! Comme si c’était fait. Le reste de ma carrière, c’est du bonus. Gamin, gagner Indianapolis, c’était un rêve impossible. Je suis impatient d’y revenir en août pour défendre mon titre." 

Depuis, votre vie n’est forcément plus vraiment la même ?
SP : "Forcément, les choses ont un peu changé… C’est un sentiment particulier. J’ai accompli le plus grand objectif de ma carrière, c’est…(il marque une pause). La reconnaissance extérieure est énorme. Cette victoire a eu un gros impact en France (après un courrier de félicitations d’Emmanuel Macron, Simon Pagenaud a été élevé au grade de Chevalier de l’Ordre national du Mérite). Tiens, je viens de signer le papier d’adhésion au club des vainqueurs ! C’est un club très restreint ! C’est important pour moi, ce respect de la tradition. La bague (bijou offert au vainqueur chaque année) ? Je la porte tous les jours ! Enfin, la petite. La grosse, la vraie, est au milieu de mes trophées !" 

Vous êtes récemment retourné à Indianapolis pour les besoins d’une émission TV. Un moment particulier…
SP : "J’ai démarré le moteur, j’ai de nouveau roulé sur la piste ! Un moment hyper sympa. Ce circuit est une telle légende ! Toutes ces photos des vainqueurs, sur le bâtiment principal…Pour NBC (diffuseur des 500 miles aux Etats Unis) je re-commentais la course avec Alexander Rossi (2è en 2019). Il m’a fait un compliment vraiment sympa…"

Le fameux "coup du dragon"… (dans le dernier tour, Simon Pagenaud effectue un double mouvement de gauche à droite pour casser l’aspiration de ses adversaires, ndlr)
SP : "Oui ! Il m’a avoué qu’il n’avait jamais vu çà, que ça l’avait sacrément perturbé !"

Evoquons la saison 2020 : elle doit normalement débuter au Texas, le 6 juin, plus de huit mois après votre dernière course ! Une éternité ? 
SP : "Je compte les jours ! J’ai eu la chance de courir les 24h de Daytona en février, mais je n’ai pas roulé en monoplace depuis la séance d’essais collective organisée début mars. Je suis prêt. Physiquement, je suis au top ! J’ai effectué hier une séance de simulateur chez Chevrolet. Les choses se précisent. Je visionne les anciennes courses, pour revoir certaines manœuvres et penser à la stratégie à mettre en place. Il faudra être agressif d’entrée, marquer de gros points. Car la saison sera très compacte, avec beaucoup de courses en peu de temps." 

La Nascar a montré la voie. Cela vous a rassuré ? 
SP : 
"Oui. Je regarde toutes les courses, de chaque championnat. Il y a toujours à apprendre. L’avant et l’après course, c’était particulier. Même le vainqueur avait un sentiment étrange. L’absence des fans, c’est particulier. Moi, j’ai besoin du public, de le sentir me "pousser". Le huis clos, il va falloir faire avec. Mais le principal, c’est de pouvoir à nouveau faire notre métier." 

Les 24 heures du Mans " virtuelles" auront lieu les 12 et 13 juin prochains. Ça vous tente ? 
SP : "Il n’y pas de concordance de dates avec l’Indycar. On regarde si c’est faisable…"

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