Cet article date de plus de trois ans.

MotoGP : "Fabio Quartararo a atteint un degré de maturité, de contrôle et de talent qui ne peuvent qu'impressionner", salue Christian Sarron

Deuxième vainqueur français dans la catégorie reine en moto, Christian Sarron revient sur le sacre mondial de Fabio Quartararo.

Article rédigé par Loris Belin
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Fabio Quartararo avant le Grand Prix d'Aragon sur le circuit Mortorland d'Alcaniz, le 11 septembre 2021.  (LLUIS GENE / AFP)

L'élève a fait oublier le maître. Fabio Quartararo a balayé toutes les marques historiques de la France en MotoGP, après son sacre mondial obtenu à l'issue du GP d'Emilie-Romagne, dimanche 24 octobre. Deuxième vainqueur français dans l'élite des deux roues (après Pierre Monneret) et longtemps références dans les annales, Christian Sarron ne peut que s'incliner devant son successeur. Recordman du nombre de victoires, de podiums et désormais premier champion du monde français, le Niçois force le respect.

Son aîné décrypte les mérites de Quartararo et ses progrès fulgurants qui l'ont mené sur le toit du monde, et lui promettent un avenir riche en victoires.

Franceinfo: sport : Voir un Français champion du monde de MotoGP, vous y croyiez ?

Christian Sarron : Franchement, avant Fabio Quartararo, pas trop honnêtement. Il y avait déjà un pilote dominateur, qui était Marc Marquez, que personne ne pouvait battre. Son physique s'améliore un peu, mais il n'est pas encore pas au même niveau qu'avant sa blessure (triple opération d'une fracture de l'humérus en 2020). Marquez n'ayant pas été un adversaire cette saison, Fabio a su prendre sa chance. Il était un des favoris avant le début du championnat et cela s'est confirmé au fil des Grands Prix. Il n'a jamais montré le moindre signe de faiblesse. Sa maîtrise, sa fiabilité, son pilotage sans faute, sans erreur, ça m'impressionne beaucoup. Il a vraiment progressé, il a atteint un degré de maturité, de contrôle et de talent qui ne peuvent qu'impressionner.

"Le talent, il l'a toujours eu"

Vous aviez senti très tôt que Fabio en avait l'étoffe ?

On avait vu qu'il avait énormément de talent au début de sa carrière, mais trop de jeunesse et de fougue. Il a eu des périodes de doutes, d'incertitudes, il avait besoin de mûrir en peu. En Moto2, sa première saison était incompréhensible : il était dans la meilleure équipe et il n'avait pas fait mieux que 7e de toute la saison (en 2017, il avait cumulé une sixième et trois septièmes places comme meilleurs résultats). On pouvait se poser des questions. Et puis, il a changé d'équipe et a gagné un premier GP, à Barcelone, avec un brio incroyable. Le talent s'était exprimé sans frein. On savait qu'il l'avait, mais les choses ne se mettaient pas en place comme il le fallait. Mais le talent, il l'a toujours eu. La preuve, il arrive en MotoGP sur une Yamaha dont tous les autres pilotes se plaignaient, et quand elle est arrivée aux mains de Fabio, elle se battait en tête des Grands Prix.

Fabio Quartararo lors des essais du Grand Prix de Saint-Marin 2021. (GIGI SOLDANO / GIGI SOLDANO)

Vous connaissez bien la firme Yamaha. Vous imaginiez que Fabio Quartararo puisse être aussi fort aussi vite au sein de l'écurie officielle, qu'il a rejointe en début de saison ?

Sa force, son pilotage, il l'avait déjà chez l'écurie satellite, le Team Petronas. En arrivant dans une autre équipe, mais avec la même machine et plus de moyens, il n'y avait pas de raisons de croire qu'il allait moins bien se comporter. Avec Maverick Viñales, Fabio arrivait avec un coéquipier talentueux mais irrégulier. Il était évident qu'il allait prendre le pas sur Viñales. Il a quand même complètement fait s'effondrer l'Espagnol ! Fabio était au-dessus de ça, il menait sa barque avec sérénité.

"Fabio a encore de belles années devant lui, on ne voit pas qui pourrait l'inquiéter"

Christian Sarron

à Franceinfo: sport

Si vous ne deviez retenir qu'un seul moment déterminant où vous avez compris que Fabio Quartararo pouvait être champion, quel serait-il ?

Dès le début de saison. Sur des circuits comme le Qatar où ont eu lieu les deux premières courses ou même les Grands Prix qui ont suivi, où certains pensaient que les Yamaha ne seraient pas à la fête, il était bien. À partir de là, en étant présent sur tous les circuits, on sentait qu'il n'aurait pas de rivaux. Sa force, c'est que ses adversaires n'étaient pas réguliers. Lui l'était. Il a eu tantôt Jack Miller, Johann Zarco pendant 3-4 courses, un peu Joan Mir puis Francesco Bagnaia en dernière partie de saison. Sans le réaliser, Fabio a su voir, sentir et exploiter la situation.

"Je ne comprends pas pourquoi il a tant de difficultés sous la pluie"

On a vu qu'il avait beaucoup progressé cette saison dans le mental, la gestion de la course, quand savoir attaquer, quand assurer. Quels paliers lui reste-t-il à passer ?

Si Bagnaia arrive à être régulier, il peut aller vite sous la pluie comme sur le sec. Marquez aussi. Si Marquez retrouve le physique et que Bagnaia gagne en expérience, ce seront des clients sérieux pour Fabio s'il y a des courses sous la pluie. Sur le sec, il est impressionnant. Il n'a jamais montré de signes de faiblesse cette saison, sauf sous la pluie. Il dispose de la même électronique que les autres, des mêmes pneumatiques... Je ne comprends pas pourquoi il a autant de difficultés sous la pluie, alors qu'il est aussi dominateur le reste du temps.

Marc Marquez avait 20 ans quand il est devenu champion du monde pour la première fois, Fabio Quartararo en a 22. Est-ce qu'une telle précocité peut laisser espérer une carrière aussi fructueuse que celle de l'Espagnol ?

Pourquoi pas ? (sourire) Hormis si Marquez peut retrouver son niveau d'avant, et j'ai un doute, on ne voit pas qui pourrait inquiéter Fabio. Bagnaia montre des dispositions, mais Fabio n'a pas montré de signes de faiblesse toute la saison. Quand on regarde les forces en présence, oui, Fabio a encore de belles années devant lui.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.