Basket : comment le Paris Basketball, novice en Euroligue, en est devenu le leader inattendu

Le club parisien, fondé en 2018, s'impose cette saison comme l'un des meilleurs d'Europe pour sa toute première participation à la compétition.
Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Nadir Hifi (Paris Basketball) se fraye un chemin au milieu de la défense du Virtus Bologne, le 28 novembre 2024, en Euroligue. (MOHAMMED BADRA / AFP)

En battant le Maccabi Tel-Aviv (93-81) à Belgrade, mardi 3 décembre, le Paris Basketball a remporté plus qu'une victoire. La nouvelle coqueluche du basket français a décroché sa neuvième victoire consécutive en Euroligue, ce qu'aucun club tricolore n'était parvenu à accomplir avant elle. En prime, les joueurs de Tiago Splitter sont devenus les seuls leaders de la compétition, profitant de la défaite de Fenerbahçe à Vitoria.

La performance était d'autant plus remarquable que le jeune club parisien vit sa toute première campagne d'Euroligue, pour laquelle il est invité. Avant l'entrée dans la cour des grands, le président David Kahn avait expliqué au Figaro [article payant] que la décision d'accepter ou non cette invitation avait été "difficile" à prendre, car y prendre part introduit une part de risques financiers. C'est d'ailleurs pour cette raison que Gran Canaria, vainqueur de l'Eurocoupe 2023, avait décliné l'invitation la saison passée.

"On aspire évidemment à être compétitif, [mais] je pense que nos fans, nos supporters, nos partenaires comprennent qu'on est jeunes et qu'aura des soirs où ce sera un peu compliqué", prévenait ce dernier, ne souhaitant pas nourrir d'attentes disproportionnées. "Avoir des ambitions en Euroligue c'est vendre du rêve, appuyait en même temps Alex Requena, le vice-président en charge de la stratégie du club, au micro de RMC Sport. Ce ne serait pas réaliste de dire que l'on veut jouer les playoffs de l'Euroligue".

Budget multiplié par deux

Il faut dire que le Paris Basketball évoluait encore en Pro B lors de l'exercice 2020-2021 et n'existe en tant que club professionnel que depuis 2018. Sa trajectoire a de quoi surprendre, mais la croissance est linéaire. Pour sa première saison en Betclic Elite, l'équipe parisienne a obtenu son maintien avec une 15e place, puis est montée à la 9e place la saison suivante, avant de disputer la finale de la saison 2023-2024, perdue contre Monaco.

C'est avec un budget multiplié par deux (passant de 9,2 à 18,8 millions d'euros) que Paris a entamé cette saison, dans une salle flambant neuve, l'Adidas Arena (8 000 places). Une progression significative qui ne suffit pourtant pas à expliquer le bond effectué cet automne. "La masse salariale est nettement plus élevée que l'an dernier, d'au moins 70% de plus. Mais certains clubs paient un seul joueur plus cher que l'ensemble de notre effectif", souligne au Figaro David Kahn, ex-président des Minnesota Timberwolves en NBA (2009-2013).

"Notre style de jeu de la saison dernière, c'est celui qu'on veut tous les ans, il ne changera pas. On veut un basket rapide, excitant et féroce sur le plan défensif."

David Kahn, président du Paris Basketball

au Figaro

Malgré le départ inattendu à l'intersaison du coach finlandais Tuomas Iisalo, devenu assistant chez les Memphis Grizzlies en NBA, la continuité du projet sportif a été assurée. Pour Pape-Philippe Amagou, ex-champion de France de basket et consultant pour France Télévisions, cela joue pour beaucoup dans la réussite du club. "Même s'il apporte sa patte, Tiago Splitter a eu l'intelligence de ne pas tout changer. Il s'est appuyé sur un groupe qui vivait bien et sur un noyau dur de joueurs, sur les anciens vainqueurs du championnat allemand. Il a gardé un rythme up tempo, avec beaucoup d'intensité et des changements à la volée", observe-t-il.

Nadir Hifi et TJ Shorts en têtes d'affiche

Le Paris Basketball propose en effet un jeu frénétique, fait de prises de risques. S'il a collé plus 103 points au FC Barcelone, c'est tout sauf un hasard. Après les 13 premiers matchs de la saison régulière d'Euroligue, il trône à la première place du classement des rebonds offensifs pris par match (12,8) et à la troisième de celui des tirs à trois points tentés (29,3 par rencontre). Pour mieux gérer les conséquences de ce style de jeu énergivore, Tiago Splitter a recours à de très nombreuses rotations. Face au Maccabi Tel-Aviv, 11 des 12 joueurs alignés sur la feuille de match ont joué plus de 10 minutes.

L'acteur français Omar Sy reçoit le maillot de Bandja Sy, joueur du Paris Basketball, sous les yeux du directeur sportif Amara Sy, le 1er novembre 2024, à l'Adidas Arena. (JULIEN MATTIA / EPA)

16 minutes de jeu ont suffi au meneur international français Nadir Hifi pour tenter neuf fois sa chance à trois points (trois convertis). Celui qui espérait rejoindre la NBA cette saison, ayant participé à la Summer League, est resté l'une des têtes de gondole de l'équipe aux côtés de TJ Shorts. Ce meneur de poche (1,75 m) américain, naturalisé macédonien en 2022, est le facteur X du Paris Basketball depuis que Tuomas Iisalo l'a apporté dans ses valises depuis Bonn en 2023.

Nommé joueur du mois de novembre en Euroligue, Shorts tourne à 18,4 points et 7,8 passes par match cette saison. "C'est un leader naturel, avec un charisme incroyable. Il rayonne sur l'ensemble du groupe et s'il y a une individualité à ressortir, c'est lui", note Pape-Philippe Amagou, conquis. Gare cependant à ne pas trop individualiser la réussite du Paris Basket : "Le groupe est incroyable, souligne le consultant. Il est à la fois concerné, engagé, rigoureux, et en même temps, on sent de la légèreté et de la décontraction. On le voit à la manière dont ils se checkent [se saluent] avant les matchs. Dès que le gong sonne, ils passent tous en mode 'guerrier', tous prêts à faire les efforts pour les autres".

"Le club est ambitieux, structuré, avec un top management qui n'a jamais caché ses ambitions. Il y a quelques années, quand il était en Pro B, on nous parlait d'Euroligue et cela faisait sourire tout le monde, mais le club a une vraie stratégie."

Pape-Philippe Amagou, ancien joueur quatre fois champion de France

à franceinfo: sport

"On est en pleine bourre mais il ne faut pas qu’on se prenne pour les maîtres du monde. On peut dire ce qu’on veut, mais notre priorité reste le championnat", tempère le directeur sportif Amara Sy dans les colonnes du Figaro [article payant]. Lui-même "n'y aurait pas cru" si on lui avait dit que le Paris Basketball occuperait au moins temporairement la première place de l'Euroligue dès cette année. "C'est normal qu'il soit si prudent dans sa communication, mais on dit que l'appétit vient en mangeant, analyse Pape-Philippe Amagou. Vu les résultats, ce serait une sacrée déception de ne pas faire les playoffs. Cela n'arrive pas toutes les saisons" d'être en si bonne position.

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