Popovich, match ultime avec les Spurs ?
Le visage buriné, le regard pénétrant et les bons mots, Gregg Popovich est unique. Il le sait et il en joue. A 65 ans, pour sa sixième finale NBA avec les Spurs, il continue de parfaire son image. Comme l'y oblige le règlement de la NBA, "Pop", 65 ans, doit se soumettre à deux reprises par match aux questions des journalistes de la chaîne de télévision qui retransmet en direct les rencontres des Spurs. L'exercice ne lui plaît guère, et il ne se prive pas de le montrer, visage fermé ou moue boudeuse, et/ou à le faire savoir avec des réponses monosyllabiques quand la question trouve, et c'est rare, grâce à ses yeux. Tous ses joueurs ont eu quelques difficultés à leurs débuts sous le maillot de San Antonio à se faire aux méthodes, au franc-parler, au sens du détail et à l'autorité d'un entraîneur qui se définit lui-même comme un maniaque.
Une légende et un savoir-faire
La légende, qu'il s'est bien gardé de dissiper, veut que Popovich, entraîneur de l'équipe de basket de l'US Air Force, ait travaillé pour les services secrets américains, en Turquie et en Europe de l'Est. "C'est quelqu'un qui est à la fois très proche des joueurs et à la fois ferme, très directif. Contrairement à l'image qu'on peut en avoir, il sait décompresser. Il est très exigeant, il a une vision bien à lui, mais il sait s'adapter", résume le capitaine de l'équipe de France, Boris Diaw, devenu si décisif lors de sa 2e saison chez les Spurs.
C'est tout cela, et aussi son flair, son entente avec son patron RC Buford, qui ont fait de son équipe un collectif hors norme, avec des joueurs de toute nationalité (un Argentin, deux Français, deux Australiens, un Canadien, un Brésilien, six Américains). En NBA, là où la performance et les statistiques individuelles sont privilégiées, il a érigé le collectif en règle absolue. Face à la 3e masse salariale de la NBA (Miami) et à ses stars incroyables (LeBron James, Dywane Wade, Chris Bosh) qui ont mené le Heat à conserver son titre l'an dernier et être encore en lice pour un troisième sacre consécutif, il a imposé ce jeu fait de passes, de joueurs interchangeables, et d'une défense intraitable.
Un destin lié à celui de Tim Duncan
Le collectif, il s'inclut dedans. Gregg Popovich le martèle depuis quelques temps déjà: son destin est lié à celui de Tim Duncan. "Mon coup de chance", comme il appelle son joueur de 38 ans, est arrivé au Texas pour éclore aux côtés de l'Amiral, David Robinson. Après les Twin Towers, l'entraîneur a pu faire évoluer sa formation pour créer le Big Three (Dunca, Parker, Ginobili). Depuis que les deux hommes se sont associés, dans le courant de la saison 1996-97, San Antonio a remporté quatre titres NBA (1999, 2003, 2005, 2007), atteint les play-offs à 17 reprises de suite et développé l'un des baskets les plus efficaces, plutôt que spectaculaires, de l'histoire de la NBA. Tony Parker et Manu Ginobili ont pris la même voie. Le point commun des joueurs qui réussissent ici ? "L'état d'esprit. Cela ne garantit pas de gagner le titre chaque année, mais ils font preuve chaque année d'un dévouement rare pour devenir la meilleure équipe possible", assure le maçon de ce bel édifice.
Les trois hommes se trouvent au crépuscule de leur carrière. Le technicien le sait. Il vient d'affirmer: "Je ne suis pas fatigué. J'aimerais continuer d'entraîner." Mais il lie son futur à celui de Duncan: "Un jour, peut-être au cours du 3e quart-temps d'un match, Tim se dirigera vers la sortie. Il dira: 'C'est fini pour moi'. Et dès qu'il aura dit cela, je serai à dix pas derrière lui, parce que je ne suis pas stupide". Il sait à qui il doit son palmarès. Mais le géant des Iles Vierges semble bien parti pour prolonger l'aventure, la saison prochaine. Par ricochet, Popovich devrait se satisfaire de la poursuite de son action, même si les rumeurs annonçaient sa possible retraite en cas de 5e bague.
Un 5e coach à 5 titres NBA et plus ?
Cette nuit, en cas de succès dans le match N.5 contre Miami et peut-être d'une nouvelle démonstration collective, il peut entrer dans un club très fermé, celui des entraîneurs couronnés de cinq titres NBA ou plus, présidé par Phil Jackson (onze avec les Chicago Bulls et les Los Angeles Lakers) et qui ne compte pour l'heure que trois autres membres: Red Auerbach (neuf avec Boston), John Kundia (cinq avec les Lakers de Minneapolis) et Pat Riley (cinq avec les Lakers de Los Angeles et le Miami Heat), actuel président du Heat.
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