Ô France, Ô désespoir !
Amputée de nombreux titulaires en puissance cet été (Parker, M.Pietrus, Noah, Turiaf), la France se savait sur un fil. Borderline jusqu'au bout des ongles. Aveuglés par ce départ tonitruant avec trois victoires dont une sur l'Espagne, certains avaient cru bon faire des Bleus un favori. C'était oublier le "passif" de cette équipe abonnée aux soubresauts et aux passages à vide. Dans les sphères oranges, on a beau avoir les yeux de Chimène pour le maillot tricolore, la métamorphose n'avait laissé place à un optimisme débordant. Dans son blog, l'ancien international Jacques Monclar est amer. "C'est de gachis... Je ne suis pas dupe, j'ai toujours dit que nous n'avions de marge surpersonne mais quand tu as trois victoires, ça doit te rendre plus dur ouplus méchant, pas l'inverse, explique-t-il. Il faut -cultiver son jardi- et non jouer comme des danseuses. On venait de loin, on l'a oublié, on le paye en allant défier la Turquiechez elle. On a perdu gros face à la Lituanie,on a dérapé contre la Nouvelle-Zélande et maintenant on est gentiment dans le mur. Quel dommage !"
Collet avait prévenu
Dans le vestiaire, on n'est pas dupe non plus. Si certains joueurs se sont vus trop beaux, leur suffisance coûte cher. A la tête des Bleus depuis mars 2009, Vincent Collet avait averti ses joueurs du danger de se relâcher, de remettre à dimanche l'intensité défensive nécessaire au bon fonctionnement de cette équipe. Mardi, après le succès étriqué face au Canada, il prévenait déjà du mal qui guettait ses joueurs. "Je n'ai jamais été défaitiste comme je ne suis pas triomphaliste aujourd'hui. Le match d'aujourd'hui montre que notre niveau n'est pas celui qu'on aurait pu penser après les deux premières journées." La suite lui a donné raison dans les grandes largeurs. "C'est une désillusion totale, disait-il hier soir. Plus que le résultat c'est surtout la façon dont on a abordé le match, en particulier ce deuxième quart-temps. On a eu une attitude laxiste, confortable. Manifestement tout le monde n'avait pas compris la difficulté de ce match. Quand on l'a fait il était déjà un peu trop tard", pestait-il, fustigeant au passage le manque de maturité de l'équipe. "Je pensais qu'on avait franchi un cap..." Si rien n'a fonctionné contre les Tall Blacks, le manque était criant au poste 5.
Des grands tout petits
Dans la raquette, on ne peut pas se cacher. C'est le rendez-vous des armoires à glace, des horloges franc-comtoises. Au grand dam de Collet, les tours jumelles Traoré et Mahinmi avaient oublié de remonter leur coucou. Indispensable à l'équilibre d'une équipe, le secteur intérieur a donc pâti d'une double absence que le vaillant Alain Koffi n'a pas réussi à combler malgré son abattage habituels aux rebonds et sa présence défensive. La France dispose de joueurs athlétiques mais a toujours eu un gros manque de pivots de métier. Un handicap quasi historique. Pas assez de taille ni de poids pour ancrer les défenses et installer des systèmes. Proclamé atout offensif N.1 des Bleus dans la peinture, Ali Traoré a d'ores et déjà raté son Mondial. 5,6 pts par match et un seul rebond en moyenne, c'est évidemment trop peu pour peser sur un match. Collet a d'ailleurs préféré stopper rapidement les frais jeudi en le faisant jouer six minutes, soit deux minutes de plus que son compère Ian Manhinmi guère mieux sur le plan statistique (5 pts et 3,4 rbds en moyenne). Difficile de faire pire... Si le shoot extérieur est lui aussi soumis aux aléas des scoreurs bleus, il a mieux tenu la route même si la fin de match contre les Kiwis a tendu les bras tricolores. Avec 12,8 pts par match, Batum a longtemps porté son équipe. Comme Parker en son temps, c'est trop de poids pour un seul homme.
Irréversibles ?
Puisque le mal est fait, qu'attendre du huitième de finale contre la Turquie ? Comme en Serbie en 2005, la France est au pied du mur contre le pays organisateur. La furie qui l'attend à Istanbul avec 15 000 spectateurs survoltés peut avoir deux effets : inhiber ou galvaniser. A Novi Sad, les Bleus de Bergeaud avait créé l'exploit en s'imposant 74-71. Seul rescapé de ce "miracle" serbe, Florent Piétrus a peut-être la clé du match. De retour dans l'équipe après deux matches de repos (problèmes aux adducteurs), l'ancien palois mise sur la motivation. "On n'a pas l'impression d'avoir joué un match à la vie, à la mort, disait-il jeudi soir après la défaite des Bleus.Maintenant il faut assumer ce qu'on a fait et aller créer l'exploitface à la Turquie. Depuis deux jours, on a vu une équipe faible mentalement et désunie collectivement. Tout le monde doit se remettre en question", a-t-il expliqué. Tout passera donc par le mental. Oublier la déception et remettre le bleu de chauffe. Mickael Gelabale ne dit pas autre chose : penser collectif ! "Tout le monde n'a pas joué ce soir, il y en a qui n'ont pas mouillé leur maillot. Je ne veux pas créer de polémique mais il faut qu'on se ressoude.On est en équipe de France là, pas en club!" En cas de défaite dimanche, il sera temps de penser à son club. Pas avant.
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