Raphaël Tronché s'en prend violemment à Tony Yoka : "En incitant les jeunes à la haine, il casse tout le travail des éducateurs"
Les mots sont tranchants, acerbes, violents. A certains moments, on se demande même si on est pas revenu quelques dizaines d'années en arrière, à une époque où les boxeurs aimaient se défier en affichant dans la presse leur haine de l'autre. Raphaël Tronché n'est pas le plus connu des boxeurs de la planète. En septembre dernier, il s'est emparé de la ceinture mondiale IBO des poids lourds, et pointe au 90e rang mondial selon le classement BoxRec, 5e Français loin derrière le leader du camp tricolore, Tony Yoka (25e mondial). Mais il a pris la parole, dans L'Equipe, pour s'opposer aux propos tenus par Tony Yoka sur ses réseaux sociaux, à la suite de la mort de George Floyd.
"Il a posté sur ses comptes Instagram et Twitter "brûlez tout, niquez tout" après l'assassinat de George Floyd. C'est scandaleux ! Ce mec est un porte-voix grâce à sa notoriété médiatique, mais il s'en sert pour délivrer un message de haine. En incitant les jeunes à la violence, il casse tout le travail de fond des éducateurs, bénévoles et médiateurs. Qui ira éteindre les incendies que Yoka incite à allumer ? C'est lui qui ira réparer les arrêts de bus fracassés ? Lui qui ira calmer les jeunes des quartiers ? Ce sont tous ces valeureux gens de terrain qui iront réparer les pots cassés du fait du tweet de Tony Yoka", clame-t-il dans cette interview.
"Casser n'a jamais rien réparé"
Le boxeur du Nord se veut à l'opposé de cet appel : "J'essaye de faire passer des messages forts auprès des jeunes. Je suis l'un d'eux. Je suis passé par toutes les étapes. J'ai tout connu : les coups de feu, les tribunaux. Je sais ce que c'est. Encore aujourd'hui, à 30 ans, je dois me soumettre à des contrôles au faciès. (...) La colère de Yoka, elle est légitime, normale. Je suis en colère autant que lui, peut-être même plus. Mais la vérité, c'est que casser n'a jamais rien réparé. Et même si on cassait tout et si on brûlait tout, on fait quoi ensuite ? On demande à Yoka 'c'est quoi le plan ?' Son tweet va trouver écho chez des petits jeunes en train de se chercher. (...) Moi j'ai mis en place un concept 'Boxe avec les mots', des dictées dans les quartiers. Les vainqueurs gagnent de l'argent. On se bat pour faire entrer l'instruction et la réflexion dans les cités. Et derrière, voilà un imbécile qui leur dit de 'tout niquer'."
Mais cette colère, Raphaël Tronché avoue la porter également contre un homme qu'il n'apprécie pas : "Je ne l'aime pas. C'est clair", tranche-t-il avant de dire un peu plus loin : "Ce mec-là, je ne peux plus le voir. Ni discuter avec lui." Pourtant, il lui lance un appel au combat : "Mon offre tient toujours : 250 000 euros. (...) Yoka me dénigre, mais si je suis si nul que ça, il n'y a aucun risque. Viens me boxer. Tu repartiras les quatre fers en l'air."
Yoka plaide "le droit au coup de sang"
Dans cette même double page de L'Equipe, interrogé sur son tweet, Tony Yoka assume et nuance : "Je n'ai jamais voulu lancer un appel à la haine. j'ai réagi à chaud. J'avais les nerfs. (...) Je suis quelqu'un qui ne mâche pas ses mots. J'ai parlé sous le coup de l'énervement. Ce que je voulais dire, c'est qu'à partir du moment où l'on vit dans ce climat-là, il faut tout niquer. A tête reposée, je ne m'exprimerais pas pareil, surtout devant des millions de personnes. Je ne voudrais pas être mal compris. (...) J'habite aux Etats-Unis, mes enfants vont grandir là-bas. Il faut comprendre ma position. Je suis directement confronté à ça. Je me suis fait arrêter quelques fois en voiture. Dans ces moments-là, on a chaud. On met ses mains bien en évidence, en dehors de l'habitacle. On essaie de se faire comprendre dans un anglais limité." Et de conclure : "Si demain je devais m'exprimer dans une conférence face à des jeunes, je structurerais ma pensée autrement. Maintenant, je me dois d'assumer mes propos. Je ne vais pas faire de vidéo d'excuses. Et je ne dirais pas aux gamins de baisser la tête. Je plaide le droit au coup de sang."
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