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"Ce n'est pas soutenir un candidat, c'est un barrage", explique Michaël Jeremiasz, signataire de la tribune de sportifs appelant à s'opposer à Marine Le Pen

Champion olympique de tennis fauteuil en double, il est signataire avec une cinquantaine de sportives et sportifs français d'une tribune appelant à faire barrage à l'extrême droite au second tour de l'élection présidentielle.

Article rédigé par Louise Le Borgne
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le joueur de tennis Michaël Jeremiasz, alors porte-drapeau de la délégation française lors des Jeux paralympiques à Rio en 2016. (JACQUES DEMARTHON / AFP)

Aux côtés de Clarisse Agbegnenou, Pierre Gasly, Tony Parker, Estelle Mossely ou encore Laure Manaudou, Michaël Jeremiasz a signé une tribune, mardi 12 avril, appelant à faire barrage à l'extrême-droite lors du second tour de l'élection présidentielle 2022. Entretien avec le porte-drapeau des Jeux paralympiques de Rio 2016.

Franceinfo:sport : Quelle est la genèse de cette tribune ?
Michaël Jeremiasz : La tribune est née des échanges avec plusieurs sportifs sur la base de convictions communes face à l'urgence de la situation. L’enjeu de l'engagement des sportifs est le même que pour n’importe quel citoyen. Aujourd’hui ce n’est pas un appel à voter pour une personne mais à voter contre le Rassemblement national. C’est un engagement d’opposition, de peur aussi. Nos origines ethniques et culturelles ne doivent pas être un déterminant dans quoi que ce soit. Ce n’est pas la France dans laquelle j’ai envie de vivre, pas les valeurs que je porte, que je veux transmettre à mon enfant. L'idée est de fédérer des hommes et des femmes autour de valeurs universelles de fraternité, de tolérance, pour une société plus juste et moins discriminante. Ce n’est pas non plus un soutien sans condition au président sortant.

Parmi les signataires, il y a beaucoup de sportifs à la retraite ou des grands noms du sport français, déjà très implantés dans la société. Y a-t-il eu des réticences, parmi les sportifs, à s'engager publiquement ?

Pour n’importe quelle personne qui prend position publiquement, ce n’est pas sans conséquences. Aujourd’hui, vous avez une personne sur deux qui est prête à voter pour le Rassemblement national. Se positionner, pour l’un ou pour l’autre, est forcément clivant. On sait comment ça a pu se passer dans le passé, pour un sportif, de s'engager en politique. Mais la proportion d'athlètes qui s'engagent, pas pour un parti ou pour un candidat, mais de manière générale, est aujourd’hui moins importante que par le passé. La jeune génération doit aussi s'engager. Ce n’est pas supporter un candidat, comme on avait pu le voir à l’époque avec Faudel et Nicolas Sarkozy ou Yannick Noah et Ségolène Royal. C’est un barrage. C’est une mobilisation collective, citoyenne, à ce qui pour nous, n’a pas sa place à la tête du pays.

"Le sport c’est de l’éducation et des valeurs essentielles pour tous."

Michaël Jeremiasz, porte-drapeau de la France aux Jeux paralympiques de Rio en 2016

à franceinfo: sport


Il y a 5 ans, une tribune signée par 60 sportifs appelait déjà à faire barrage à l'extrême droite. Quelles différences y a-t-il aujourd’hui ?

Ce qui a changé, c’est qu’en cinq ans le Rassemblement National est encore plus près d'accéder au pouvoir. A chacun ensuite de s’assurer que ce ne soit pas juste un barrage et que du jour au lendemain le soufflet retombe. Après très humblement, avec une tribune comme ça, il n'y a pas un sportif qui croit que notre petite notoriété va changer le monde et faire que des centaines de milliers de personne vont changer de vote. C’est du moins l’expression d’un sentiment, et les gens en font ce qu’ils veulent. Ça va plaire à certains, déplaire à d'autres. Peu importe. L’important est de défendre des convictions communes, des valeurs du sport.

Au-delà d'un barrage à l'extrême-droite, y avait-il une urgence pour le mouvement sportif à faire émerger une voix dans cette présidentielle ?
Cette tribune rappelle à Emmanuel Macron que, dans deux ans, on organise les Jeux olympiques et paralympiques à Paris, avec tout ce que cela comporte comme vecteur de changement dans une société : une réduction des inégalités, la prise en compte des enjeux de santé publique, la capacité à créer du lien social, etc. Il ne faut pas que ce soit juste un épiphénomène ou quelque chose qu'on aborde de manière cosmétique. On veut croire à une société dans laquelle chacun peut vivre en bonne intelligence mais il va falloir muscler son jeu et en faire beaucoup plus. Pas pour le sport de très haut niveau mais plus pour le sport à l’école, les fédérations, les clubs, les structures, les associations. Ce sont de formidables outils qui sont sous-exploités dans notre pays. C'est une façon de parler de sport, ne serait-ce qu’une fois, dans la campagne. C'est un sujet de société dans son ensemble, pas un truc réservé à des personnes en jogging le dimanche matin. 

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