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Championnats européens 2022 : entre excitation et déception, le récit de la finale du 110 m haies dans le clan de Sasha Zhoya

Le Français, meilleur performeur européen cette saison, est tombé en fin de course lors des Championnats européens, mercredi soir. 

Article rédigé par Louise Gerber, franceinfo: sport - De notre envoyée spéciale à Munich
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le Français Sasha Zhoya à la fin de sa demi-finale sur 110 mètres haies, lors des Championnats européens d'athlétisme, le 17 août 2022 à Munich (Allemagne). (MUSTAFA YALCIN / ANADOLU AGENCY / AFP)

Chuter pour mieux se relever ? Sasha Zhoya, considéré comme l’un des grands espoirs de l’athlétisme mondial, a terminé dernier de la finale du 110 m haies des Championnats européens de Munich, mercredi 17 août. Sous les yeux de sa mère et de son staff, le prodige a payé cher son apprentissage du haut niveau. 

Depuis des mois, les attentes sont hautes quand il s'agit du jeune hurdleur, tant sa progression s'avère fulgurante. Champion d'Europe et champion du monde juniors, détenteur des records du monde cadets et juniors, il a dominé sa spécialité chez les jeunes.

Pour sa première année chez les seniors, Zhoya a donné le ton aux championnats de France en juin, battant deux fois son record personnel pour s'offrir la meilleure performance tricolore, la sixième de l'histoire française (13"17) et le titre national. Tout ça le jour de ses 20 ans, s'il vous plaît. "C'est un talent brut", résumait avant la course Stéphane Diagana, champion du monde du 400 m haies et consultant pour France Télévisions.

Sous les yeux de maman

Eliminé en demi-finale des Championnats du monde à Eugene (Etats-Unis) en juillet, Zhoya voyait Munich comme une bonne opportunité de rebondir. Arrivé avec la meilleure performance européenne de la saison (à égalité avec Asier Martinez), le jeune athlète était ambitieux, tout en soulignant que sur les haies "rien n'est jamais gagné".

Mercredi, vers 20 heures, sa mère, Catherine Zhoya-Larbiose arrive dans les tribunes. La Clermontoise, qui gère une partie de la carrière de son fils, ne tient pas en place : "J'ai pris deux billets dans deux tribunes différentes", raconte-t-elle en cherchant la meilleure place possible. Après de courts échanges avec les représentants de la fédération d'athlétisme, Catherine Larbiose-Zhoya se pose quelques minutes pour regarder les deux premières demi-finales, encourageant les deux Français en lice, Just Kwaou-Mathey et Pascal Martinot-Lagarde. 

Catherine Zhoya-Larbiose, mère du hurdleur Sasha Zhoya, dans les tribunes du stade olympique de Munich (Allemagne) le jour de la finale du 110 m haies aux Championnats européens, le 17 août 2022.  (LOUISE GERBER / FRANCEINFO: SPORT)

Direction la tribune centrale pour la demi-finale de son fils, prévue à 20h52Les volontaires de la compétition, présents pour vérifier les billets sont intrigués. "Qui est cette dame ?" Quand le nom Zhoya est prononcé, l'interrogation laisse place aux sourires un brin intimidés et admiratifs. 

Un ballet bien réglé en demi-finale 

Juste avant la course, les deux entraîneurs de son fils, Dimitri Demonière, l'ancien sprinteur, et Ladji Doucouré, ex-champion du monde de la discipline, la rejoignent. Si personne dans son entourage ne se hasarde à des pronostics, tous le savent capable de briller, comme à Monaco une semaine plus tôt, où il a  couru en 13"21. Lors de la présentation des athlètes, Zhoya fait le show, à l'américaine, avec ses cheveux blonds péroxydés et sa chaînette. S'élançant du couloir 6, il obtient sans grande difficulté son ticket pour la finale avec une deuxième place. Sa course rassure. Grand sourire aux lèvres, Catherine Zhoya-Larbiose esquisse même quelques pas de danse, qui rappellent ceux de son fils, passionné notamment de ballet. 

Après l'euphorie de la qualification vient le temps du débrief. "Il a pris un mauvais départ, il était tendu au début, mais il s'est repris. Le chrono (13"46) n'est pas important, ce qui compte, c'est qu'il se qualifie", glisse-t-on dans son clan. "Il s'est économisé sur la fin, il savait qu'il avait de la marge quand il a jeté des coups d'œil autour de lui sur les derniers mètres. Il fait ça depuis qu'il est tout petit", lâche sa mère, qui a coaché l'athlète aux trois passeports (français, australien et zimbabwéen) jusqu'à ses 12 ans.

Les pieds dans les haies, les têtes dans les mains

Il faut attendre près d'une heure et demie avec que les haies ne soient remises sur la piste. Dans le clan Zhoya, amputé de Ladji Doucouré, parti en bord de piste, les visages sont tendus. Arrive l'horaire tant attendu : 22h22. Les portables sont de sortie pour immortaliser la première finale internationale "chez les grands" du hurdleur, qui a choisi de concourir pour la France début 2020. Un jeu de lumières rouges et bleues annonce l'installation des athlètes dans les starting-blocks. Toute la tribune se lève, le silence gagne le stade olympique de Munich.

Le départ est donné. Zhoya s'élance au couloir 7. Très vite, l'athlète ne semble pas en mesure de jouer une médaille, les haies tremblent, certaines tombent. Son entourage s'époumone en sautant sur place : "Allez Sasha allez !" Ce ne sera pas suffisant. Distancé, le Français chute même à quelques mètres avant l'arrivée. Il termine huitième et dernier. Dans la tribune, tous se prennent la tête dans les mains.

Un obstacle encore trop haut

L'ambiance contraste avec celle sur la piste, où le hurdleur ne montre pas une grosse déception et court enlacer ses deux compatriotes, "PML" et Kwaou-Mathey, respectivement médaillés d'argent et de bronze. "Je suis très content et je l'avais dit avant la semaine, ça montre qu'on est forts sur les haies, que c'est notre épreuve, explique-t-il au micro de France Télévisions.

interview Sasha Zhoya

Au final, les haies semblaient presque trop hautes pour le natif de Perth, mercredi soir. Entre les compétitions juniors et seniors, la hauteur des obstacles augmente de sept centimètres (99 cm contre 106). "Il était bas, ça se voyait qu'il allait en faire tomber", souligne sa mère déçue. Installé plus bas dans les gradins, Kevin Mayer, accompagné de compère décathlonien Baptiste Thierry, vient à la rencontre du clan du hurdleur. "C'est dommage, il ne lui manquait pas grand-chose. Ça va venir", assure le double champion du monde. 

Alors que les tribunes se vident petit à petit, Dimitri Demonière et Catherine Zhoya-Larbiose font le bilan de la course. "Ce sera pour la prochaine fois", leur disent certains. Le coach répond par un petit sourire et les doigts croisés. Il reste deux meetings suisses, à Lausanne (26 août) et Zurich (8 septembre) pour conclure la Diamond League. Il sera temps ensuite de penser aux Mondiaux de Budapest, en août 2023, où Zhoya voudra être celui que ses compatriotes félicitent. 

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