Comment les associations et clubs sportifs s'adaptent aux nouvelles mesures sanitaires liées au coronavirus
Depuis le 11 mai, la pratique sportive est de nouveau autorisée mais sous certaines conditions. Le ministère des Sports a détaillé pour chaque discipline autorisée - les sports collectifs, de combat et de contact sont pour l’heure toujours interdits - un protocole strict des mesures à adopter dans les clubs et associations sportives afin de limiter la propagation du coronavirus. Face à ces mesures nombreuses, ces derniers tentent de s'adapter comme ils peuvent.
Au club de l’Union athlétique de Versailles (Yvelines), la reprise s’effectue progressivement depuis cette semaine, après que la mairie a donné son accord pour la réouverture des deux stades. Le club a ainsi revu son organisation afin de respecter le protocole dicté par le ministère des Sports et la fédération française d’athlétisme. Au programme : des groupes de 10 personnes, encadrement compris, et par spécialité ont été constitués, avec un maximum de 4 groupes sur le stade en même temps. Des horaires précis d’entraînement avec des heures d’arrivée et de départ ont aussi été fixées. Les entraînements ont été repensés pour que les athlètes soient tous séparés d'un espace de 4 m2 pendant l’effort. Pendant les courses, un couloir sur deux est occupé et 10 mètres doivent séparer deux coureurs en file indienne. Courir en peloton est interdit, tout comme l’accès aux vestiaires. Enfin pour utiliser du matériel, l’athlète devra le désinfecter avant et après son utilisation.
“Pour l’accueil et l’encadrement des jeunes de 6 à 10 ans, c’est assez complexe car les enfants font du sport pour s'amuser, dans un esprit de loisir”
Un protocole certes nécessaire mais strict a appliqué. “Les consignes données ne sont pas évidentes à mettre en place. Pour l’accueil et l’encadrement des jeunes de 6 à 10 ans, c’est assez complexe car les enfants font du sport pour s'amuser, dans un esprit de loisir”, explique Olivier Meyruey, président de l’Union athlétique de Versailles (UAV). Une mise en oeuvre compliquée qui a donc poussé le président à repousser la reprise des entraînements pour les petits athlètes en herbe. “La moitié des adhérents reprennent cette semaine. En revanche, les jeunes de moins de 10-11 ans ne reprendront pas tout de suite, car il est plus difficile de leur faire respecter les consignes. Nous attendons de connaître les nouvelles mesures qui seront applicables dès le 2 juin”, poursuit le président de l'UAV.
En Eure-et-Loir en revanche, le Dreux AC Athlétisme a opté pour une reprise de l’ensemble de ses catégories d’âge, y compris des jeunes athlètes de moins de 10 ans. Mais pour Hervé Bouffinier, entraîneur et coordinateur des entraînements du club, le côté ludique des entraînements pour les plus petits est une mission complexe. “Pour éviter les contacts avec les enfants, nous avons installé deux parcours identiques qui mêlent course et sauts, avec plusieurs ateliers qui permettent de travailler différentes motricités de l'enfant. Deux enfants partiront chacun dans leur ligne en parallèle et cela sera chapeauté d'une petite compétition.”
Entre annonces des fédérations et réalités locales
Mais le Dreux AC Athlétisme est toujours en attente du feu vert de la mairie. Car même si la Fédération a donné son accord pour la reprise, ce sont aux collectivités locales de décider de la réouverture des installations sportives, comme les stades. Pourtant, le club a donné des garanties. “Nous avons décidé de montrer à la mairie que nous ne prenions aucun risque et que nous n'utiliserons aucun matériel. Nous allons reprendre principalement sur des activités de courses, de sauts et de haies”, explique Hervé Bouffinier. Une organisation pointue mais essentielle pour ne prendre aucun risque juridique. “La plus grande crainte est : qu'est-ce qui se passe s’il y a un foyer de contamination au sein du groupe, à la reprise de l'entraînement ? Les responsables sont le président du club, l'éducateur et la mairie. C'est pour cela que quand on veut mettre en place des activités, il faut être très carré pour éviter les soucis”, précise encore l’entraîneur.
Quand les vieilles habitudes ont la dent dure
Au-delà de jongler avec les autorisations et les nouvelles mesures à mettre en place, les clubs doivent parfois gérer leurs propres adhérents. Car l’adoption des consignes sanitaires se cogne parfois à leurs vieilles habitudes. C’est le cas au tennis club de Menton (Alpes-Maritimes). Depuis la réouverture du club, le comité directeur peine à faire respecter les consignes sanitaires. “Nos adhérents les plus âgés, qui représentent une bonne partie de nos membres, ont du mal à respecter les consignes. Leur club, c’est leur deuxième maison, ils y ont leurs habitudes, ils se retrouvent avec leurs amis, viennent lire leur journal. Alors, parfois on doit se battre pour que chacun respectent les consignes imposées”, raconte Gilles Perez, président du club.
Car comme pour les autres disciplines, la pratique du tennis est encadrée et soumise elle aussi à des règles strictes, comme l’autorisation de jouer en simple uniquement, de marquer ses propres balles afin de ne pas toucher celles de son adversaire, ou encore l’arrivée sur le court en tenue et seulement 5 minutes avant le début du créneau réservé.
Une ambiance de club différente
Même si ces mesures sont exigeantes dans leur mises en place, Hervé Bouffinier, entraîneur au Dreux AC Athlétisme assure que rien ne fera perdre au club sa convivialité. “Nous sommes un club familial. Bien que nous devons garder nos distances, le plus important est de pouvoir se voir et se parler. Les liens humains restent inchangés. Malgré les mesures de distanciations physiques, cela n’empêche pas les regards, les mots d’encouragement lors des entraînements. Je ne pense pas qu’il y aura une déshumanisation du sport.” Si les mesures n’affectent pas la convivialité au club de Dreux, le constat est différent à l’Union athlétique de Versailles. “Nous n’avons pas le choix, nous allons appliquer les consignes, mais nous ne sommes plus dans le même esprit du club ou dans son essence. Aujourd’hui, le côté social est très amoindri”, observe son président, Olivier Meyruey.
Au tennis club de Menton aussi, l’ambiance du club en pâtit. “Les mesures mises en place ont modifié l’ambiance du club, bien sûr, regrette Gilles Perez. Comme nous avons beaucoup de difficultés à faire accepter toutes ces règles qu'on impose à nos adhérents, nous devons faire la police, et ce n'est pas très agréable, ni pour les adhérents ni pour nous.” A tel point que le président à utiliser la menace de la fermeture du club pour enfin se faire entendre. “Voyant que les consignes n’étaient pas respectées, j’ai envoyé un mail aux adhérents en leur disant que s’ils ne mettaient pas de la bonne volonté, je fermerai le club cette semaine. S’il faut encore être vigilants, les gens ont davantage pris conscience de la situation”, poursuit Gilles Pérez.
Un impact économique relatif
Globalement, les adaptations sanitaires n’ont pas fait exploser les budgets des associations et clubs sportifs, déjà en difficultés financières. Pour limiter les coûts, l’UAV a demandé aux athlètes de venir avec leur masque jusqu’au lieu de l’entraînement et en possession de gel hydroalcoolique, même si le club met également à disposition du gel désinfectant. “Les mesures ne vont pas nous coûter plus chères. En revanche, les licenciés auront moins d'encadrement et un service moindre par rapport à ce qu'ils ont l'habitude d'avoir”, note le président de UAV.
A Menton, la facture mensuelle est un peu plus conséquente. Entre les différents produits désinfectants à fournir aux joueurs afin qu’ils nettoient, avant leur utilisation du terrain, les blancs, les manches à balai et les poignées de portes, le tennis club de Menton doit régler un facture de 400 euros pour le mois. Un budget important surtout après que tous ses tournois aient été annulés. “Avec l’annulation de nos tournois, nous avons eu un grand manque à gagner. Il ne faut pas que cette situation dure des mois”, s’inquiète Gilles Perez, le président du club. Mais ce qui pèse le plus au club de la Côte d’Azur, c’est la lourdeur du dispositif. “Pour mettre en place le processus, on a intégré les membres du comité directeur afin qu’ils viennent aider les six employés du club à surveiller le parking, ses ouvertures et fermetures, la surveillances des joueurs et des courts afin de s’assurer que chacun respecte bien les consignes”. Avant de conclure : “C’est très lourd au quotidien. Ce n’est pas viable sur du long terme.”
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