Code d’honneur ou pas, un maillot jaune ne se refuse plus
La passation de pouvoir n’a pas eu lieu officiellement. Bien que forfait, Tony Martin (Etixx-Quick Step) a gardé sa tunique jaune hier soir. En franchissant la ligne à vélo, il a sauvé son « précieux » et privé Chris Froome (Sky) d’un nouveau maillot jaune sur les épaules. Au départ ce matin, le Britannique était un leader réel avec un maillot jaune virtuel. C’est dans la soirée de mercredi que s’est prise la décision à l’issue de discussions entre Sky, l’UCI et ASO. Chez Sky, le choix était cornélien. « C’était une décision très compliquée. Si on l’avait porté, certains nous auraient dit qu’il y avait un manque de respect vis-à-vis de Tony Martin, explique Nicolas Portal, directeur sportif de la formation britannique. On est de tous cœur avec lui. C’est triste ce qui lui arrive. Du coup on est allé voir l’UCI pour demander comment ça se passait dans ces cas-là. La règle existe. Tony (Martin) a passé la ligne donc il y a un maillot jaune (en cas de chute dans les trois derniers kilomètres le coureur est crédité du même temps que le peloton s’il franchit la ligne, ndlr) et il est sur ses épaules, pas sur celles de Chris Froome. »
On ne refuse pas le maillot jaune
Pour beaucoup au village du Tour de France à Livarot et au pied des bus des équipes, on ne connaissait pas la règle et on préférait y voir une forme d’hommage à l’Allemand. Comme un code d’honneur qui régirait le peloton depuis presque toujours et qui accordent certains « pouvoirs » au maillot jaune. Martin est un coureur réservé mais très attachant. Il est très respecté par ses pairs. Toutefois, voir Froome en jaune n’aurait pas choqué grand monde. « C’est chic de sa part. On dit que les Anglais sont des gentlemen mais il pouvait démarrer avec le maillot jaune », répondait sans sourciller Patrick Lefévère, le manager d’Etixx-Quick Step et de Tony Martin. Pour de nombreuses équipes, un jour en jaune ne se refuse pas. « Dans notre équipe, on aurait demandé à le porter car ça fait partie du jeu, lance Stéphane Augé de Cofidis. On est sur le Tour de France et il a des partenaires. Il y aurait des codes d’honneur plus à appliquer que celui-là. Par exemple comme sur la grosse chute de lundi dernier où le peloton aurait dû attendre et calmer le jeu de lui-même. »
Le code d’honneur, c’était avant
Le code d’honneur du peloton est désormais à géométrie variable. Sans grand patron aux coquottes de freins et avec des contraintes économiques importantes, la notion se perd. « Les enjeux sont tellement importants par rapport aux investissements des sponsors, aux résultats, au classement mondial que le code d’honneur n’est plus celui des grandes années Merckx, Hinault, explique Vincent Lavenu, la patron d’AG2R-La Mondiale. Tout cela a disparu. Il n’y a plus tellement de grand patron qui régente le peloton. » Un peloton sans boss, c’est cependant l’espoir de courses moins cadenassées. « L’absence d’un patron, c’est aussi un bien parce qu’il n’y a pas raison que les plus petites équipes ou les plus petits coureurs ne puissent pas à un moment donné bousculer la hiérarchie établie. » Si Froome aura d’autres occasions de repasser en jaune, notamment ce soir, et d’asseoir son autorité, le public est lui privé d’un point de repère dans le peloton. « Pour les gens au bord de la route, c’est dommage, reprend Nicolas Portal. J’imagine les enfants qui ne connaissent pas tous les coureurs pros, peut-être même pas Chris Froome ou Tony Martin, mais qui veulent voir le maillot jaune. » Il faudra attendre le podium à Fougères pour le voir réapparaître.
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