Comment les cadors se sont préparés à l'enfer des pavés
Les favoris du Tour sont rarement habitués à fouler les pavés. Généralement épargnés lors des grandes classiques qui font la part belle à ces secteurs chaotiques et imprévisibles, propices aux chutes et incidents mécaniques en tous genres, ils n’auront cette fois-ci pas le choix. Pour arriver en jaune à Paris, il faudra d’abord surmonter les neufs passages pavés qui ponctuent cette cinquième étape, objets de toutes les craintes.
"Il va forcément y avoir des dégâts, redoute ainsi Romain Bardet, l’un des fers de lance de la formation AG2R-La Mondiale. Sur quatre ou cinq kilomètres, avec un peu de chance, ça se passe bien, mais sur 15 kilomètres les spécialistes vont vraiment vouloir faire la différence. Eux vont vouloir gagner l’étape ; les protagonistes du général essaieront de perdre le moins de temps possible". Pierre Rolland ne s’en cache pas non plus : "Si le soir des pavés je suis à 15, 20, 30 secondes, je serai très content".
Froome en délicatesse
Christopher Froome affichera-t-il davantage d’ambitions ? Ce n’est pas du tout certain : le Britannique, tenant du titre, a chuté mardi et manque cruellement d’expérience sur les pavés (il n’a pas participé à la moindre classique cette saison). Début juin, la formation Sky l’avait emmené reconnaître l’étape : ‘Froomey’ y avait affiché la même fréquence de pédalage ahurissante qu’en montagne, mais s’était montré assez frileux, s’éloignant du milieu du passage où les secousses sont les plus violentes, et se montrant visiblement perturbé par le changement de vélo. "Ce qui sera le plus dangereux, ce ne sera pas les pavés en eux-mêmes mais comment je vais me placer avant d’aborder les pavés", redoute-t-il.
Un mois et demi plus tôt, c’est Alberto Contador qui s’était rendu dans le Nord pour prendre ses repères, s’interrogeant sur Twitter : "Dois-je utiliser un vélo de route ou un VTT pour cette étape ?". Il y a trois ans, sur le dernier épisode pavé du Tour, l’Espagnol avait bien limité les dégâts mais n’avait pas échappé à l’incident mécanique en fin de course. Treizième de l’étape, il avait perdu du temps sur deux de ses principaux concurrents (Andy Schleck et Cadel Evans).
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Pour ne pas vivre pareille mésaventure, l’actuel Maillot Jaune, Vincenzo Nibali, s’est taillé un programme sur mesure depuis la fin de l’année 2013. Le Silicien, qui a axé toute cette saison sur la Grande Boucle, a ainsi participé à toutes les classiques ardennaises qu’il apprécie particulièrement. La deuxième étape dans le Yorskhire, dimanche, où il s’est imposé en prenant la tête du général, n’était-elle pas une version light de Liège-Bastogne-Liège ?
Nibali, prudence en jaune
Le "Requin de Messine", qui aime prendre des risques, est sans doute le favori qui redoute le moins les pavés. Le fait de porter la tunique or sur ses épaules lui confère toutefois une pression supplémentaire : prudent, il voudra d’abord "rester uni (avec le reste de l’équipe Astana), faire bloc et éviter les dangers". Même crainte pour Thibaut Pinot, qui est allé faire l’étape à la fin du mois de nombre avec ses équipiers de la FDJ.fr. S’il en a gardé "un bon souvenir", car "les pavés affrontés (en hiver) ne pourront être pires au mois de juillet", le grimpeur français va surtout tenter de s’exposer le moins possible : Marc Madiot pourrait même choisir de sacrifier Arnaud Démare, candidat à la victoire d’étape, pour protéger son leader.
Autre gros candidat, souvent oublié mais capable de briller en Belgique et dans le Nord, Alejandro Valverde est probablement celui qui s’est le mieux préparé ces derniers mois. L’Espagnol, expérimenté (34 ans), est allé jusqu’à tirer un trait sur les courses d’une semaine où il aurait pu se frotter aux cadors, pour préférer participer aux classiques printanières. Il a participé à certaines Flandriennes et a même remporté la Flèche Wallonne. Avec un objectif en filigrane : prendre ses marques et organiser l’équipe Movistar en vue de cette cinquième étape. Comme Nibali, Valverde est un coureur opportuniste qui pourrait profiter de l’occasion pour prendre ses distances et s’offrir une marge qui pourrait s’avérer intéressante avant les premiers grands cols. Si un coureur comme Chris Froome ose passer à l’attaque, il sera le premier à se jeter dans sa roue.
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