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Cyclisme : Sorties contre home-trainer, quand le confinement divise les entraînements 

Alors que les coureurs professionnels résidant en France, Espagne ou Italie sont privés de sortie à vélo avec le confinement, d’autres ont encore la possibilité de rouler dehors, comme en Belgique ou aux Pays-Bas. Une inégalité d’entraînement légitime, qui pourrait avoir un impact si la saison reprenait rapidement. 
Article rédigé par Théo Gicquel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
 

Beaucoup aimeraient humer l’air frais du printemps sur leur selle, d’autres en ont encore la chance. En Europe, les différentes dispositions gouvernementales sur le confinement ont crée un décalage envers les conditions d’entraînement des cyclistes. En France, en Italie, en Espagne, les pays européens les plus durement touchés par le coronavirus, aucun cycliste professionnel ne peut officiellement enfourcher son vélo pour poursuivre son entraînement. A l’inverse, d’autres pays comme l’Allemagne, la Belgique ou les Pays-Bas laissent une certaine liberté à leurs citoyens et permettent donc aux coureurs d’effectuer des sorties réglementées. 

Résident à Monaco, qui a suivi le protocole de la France, Nicolas Roche (Team Sunweb) a d’abord mal accueilli la disparité des décisions, et donc ressenti une certaine forme d'injustice. "Au départ, c’est un peu frustrant. On voit qu’en Allemagne ils sont encouragés à s’entraîner, qu’ils peuvent sortir, tout comme en Belgique et aux Pays-Bas. En Irlande, c’était possible jusqu’à avant-hier. En Angleterre, il est conseillé de faire du sport mais uniquement seul", explique le coureur irlandais du Team Sunweb.

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Français habitant en Belgique, Florian Sénéchal (Deceuninck-Quick Step) a, lui, la chance de pouvoir encore oxygéner ses poumons. "C’est bien de pouvoir alterner, c’est quand même une situation avantageuse par rapport à d’autres pays. Mais j’essaye de limiter mes sorties : une journée home-trainer, une journée à l’extérieur. A part ça, je ne sors jamais, juste pour m’entraîner, maximum deux heures d’entraînement, avec des séances de sprint. ", analyse lucidement le spécialiste des classiques flandriennes. 

Injustice et impuissance

A première vue, cette possibilité permettrait de maintenir une forme supérieure, qui pourrait se répercuter sur les premières courses de reprise. Plus habitués à effectuer des longues distances, ceux qui s'entraînent dehors auraient un avantage certain sur ceux confinés. "Pour l’instant ça ne m’affecte pas trop de voir les autres rouler dans les autres pays. Il ne font pas ça pour prendre de l’avance, ils agrémentent aussi leur journée comme ça. Ceux qui font des sorties de 4-5 heures de vélo, peut être que ça va leur servir. Mais si on ne reprend qu’au début de l’été, ça n’a pas un grand intérêt de faire des bornes", explique justement Aurélien Paret-Peintre (AG2R La Mondiale), auteur d’un bon début de saison avec une 21e place à Paris-Nice. 

Tous le disent, disparité il peut y avoir, mais dans unique scénario : si les courses de reprise surviennent très peu de temps après la fin de la période de confinement. "Forcément ça aura un côté injuste le jour de la reprise. Ils auront pu travailler dans de bonnes conditions, alors qu’on n'aura fait que du home-trainer, même si les efforts seront bénéfiques", explique Simon Sellier (Direct-Energie), suivi par Nicolas Roche : "Dans un premier temps, il y aura un petit décalage, mais ça dépend surtout de la possibilité de faire des courses de préparation. Si le confinement termine mi-mai, et que la première course c’est le Tour de France (27 juin-19 juillet) ou le Dauphiné (31 mai-7 juin), on aura largement le temps."

"Physiquement, il n'y aura aucun changement"

Pour Sénéchal, la question est presque un faux problème : "Oui, on peut s’entraîner, mais ça ne sert à rien de sortir faire six heures de vélo pour être prêt en avril, là où il n’y a pas de compétition. C’est embêtant moralement quand il y a du soleil et qu’on veut aller dehors, mais physiquement il n’y aura aucun changement", ajoute le 6e du dernier Paris-Roubaix.

Fort de seize années passées dans les plus grandes formations du World Tour, Nicolas Roche ne s’en formalise pas. Au point même de trouver dans l’entraînement version home-trainer un volume presque identique. "Je m’entraîne pour 20 heures de sport par semaine actuellement, alors que sur le vélo, j’en fais 25, ce n’est pas non plus du simple au double.", observe l’Irlandais, porteur du maillot de leader trois jours sur la dernière Vuelta. Paret-Peintre positive lui complètement, y voyant une respiration bienvenue dans des saisons toujours denses : "On va avoir le temps de faire des choses qu’on a moins le temps de pratiquer le reste de la saison. J’essaye par exemple d’un peu plus travailler sur le vélo de chrono, le gainage, des choses que l’on délaisse une fois la saison lancée.".

Dans nos colonnes, Arnaud Démare (Groupama-FDJ) allait même plus loin, voyant dans cette période de confinement un moyen d’avoir un surplus de fraîcheur lorsque les fauves seront à nouveau lâchés. "Si ça repart en juin et qu’on peut rouler dans deux semaines, il n’y aura pas trop d’incidence. Si le confinement est renouvelé, là ça sera plus compliqué. Après peut-être qu’ils auront un petit coup de bambou derrière. Chacun sa stratégie.", expliquait-il il y a quelques jours.

A priori, avec un confinement amené à durer plusieurs semaines encore, la différence, notable aujourd’hui, devrait s’atténuer pour un peloton scindé entre ceux bloqués entre quatre murs et les autres. Philosophe, Nicolas Roche imagine les instances du cyclisme suffisamment prudentes pour ne pas risquer la vie des coureurs, autant que les placer à égalité au moment d’enfin reprendre le chemin de la route. "Ce ne sera pas facile car il faut garder le moral, c’est mentalement plus coûteux de rester sur un home-trainer que de rouler sur la route. Mais je pense qu’il y aura un temps d’adaptation entre la fin du confinement et les premières courses. Ce serait prendre des risques qui sont absurdes et démesurés."

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