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La parole est aux directeurs sportifs

Le tumulte de la course n’a pas encore emporté le peloton. Les portes sont closes mais l’esprit ouvert. L’heure est venue pour le directeur sportif ou le manager général de toutes les équipes du 102e Tour de France de délivrer la bonne parole à ses neuf coureurs. Un dernier briefing à l’hôtel la veille du départ, en fin de journée, pour mieux imprimer les objectifs et conclure la préparation au Tour sur une note positive.
Article rédigé par Xavier Richard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Le patron de l'équipe AG2R La Mondiale Vincent Lavenu (DE WAELE TIM / TDWSPORT SARL)

Oublions tout de suite les discours à la Fidel Castro. Pas besoin d’en faire des heures et des tonnes pour convaincre un auditoire forcément conquis des bienfaits d’une équipe solidaire comme un miroir au service de la masse silencieuse. En toute simplicité et dans l'intimité de l'équipe, le dernier briefing n’est que la dernière touche, la piqûre de rappel d’un fil conducteur déroulé depuis janvier. « Il reprend l’état d’esprit dans lequel on doit arriver, les objectifs, toutes les parties techniques et ça se termine toujours par des mots d’enthousiasme, de volonté », synthétise Vincent Lavenu, le patron d’AG2R La Mondiale qui abrite Jean-Christophe Péraud et Romain Bardet. De la pensée positive qui va rassurer le groupe et le mettre dans les meilleures dispositions psychologiques. « Le coureur cycliste est en difficulté permanente par rapport à son sport, le stress de la course, les difficultés, le risque, rappelle Lavenu. On doit leur parler en permanence avec des mots de réconfort, de soutien et d’encouragement. On est toujours sur du message positif. »

Dialogue plus que monologue

Comme AG2R, Sky fait partie du haut du panier. La causerie générale n’est pas un acte fondateur du Tour mais doit lancer l’équipe sur la voie de l’échange. « Il n’y a pas de détail, c’est juste un travail sur l’effet de groupe et comment on va aborder ces trois semaines, explique le directeur sportif Nicolas Portal. Ça reste très général sur la façon dont on doit fonctionner tous les jours, quand il y a des chutes par exemple. On aborde le plan sur les trois semaines, où est-ce qu’on aimerait prendre le maillot. L’idée est de créer un dialogue plutôt que de rester sur un monologue. Je joue le rôle de starter et après chacun peut interpeller Chris (Froome) pour savoir ce qu’il peut faire pour l’aider. » Entre Portal et le vainqueur du Tour 2013, le courant fonctionne bien. Un binôme qui n’a pas besoin de beaucoup se parler mais se complète. « Chris va me laisser mettre le ton. Un regard suffit pour qu’on se comprenne et qu’il sente que c’est à lui de prendre la parole. On a chacun nos manières de manager mais l’objectif reste le même et les gars doivent se sentir prêts. Il y a un plan mais ils doivent sentir que ça doit venir d’eux. »

Quand Bardet parle, ça porte

L’implication de chacun, c’est la clé d’un Tour réussi. Chez AG2R, la notion de partage est très forte. « Le briefing, ce n’est pas la grand-messe, reprend Lavenu. C’est très interactif. Un moment de partage entre la direction sportive et les coureurs. Parfois, le leader sur le sport n’est pas le leader dans la façon de s’exprimer. Jean-Christophe (Péraud) s’est déridé depuis quelques années. Il a pris la mesure de l’équipe et se sent beaucoup plus à l’aise pour communiquer. Romain (Bardet) ne parle pas beaucoup mais quand il le fait ça porte. D’autres sont plus prolixes. On a la chance d’avoir une équipe facile sans mec avec des égos qui viennent te plomber un peu l’ambiance. » Même son de cloche chez Sky qui a joué la carte du collectif depuis plusieurs semaines. Dans le team britannique, le discours est clair. « On a démarré au Tour de Romandie en regroupant un maximum de coureurs. Notre camp d’entraînement à Tenerife a aussi soudé le groupe. Je sens que je ne vais pas avoir besoin de beaucoup parler, ajoute Portal. Je sens une ambiance comme dans une équipe de rugby où chacun va s’entraider. Il n’y a aucun égo. L’équipe est relâchée d’autant qu’on sait que ça ne pourra pas être pire que l’an dernier. »

Un mot d'ordre : le plaisir

Invité sur le Tour par ASO, l’équipe Bretagne – Séché Environnement est moins exposée mais n’a pas moins de pression. Avec de nombreux néophytes au départ, il faut déminer le terrain avant de partir avec un discours rassurant. « A part Pierrick (Fedrigo) et Brice (Feillu), la plupart font leur premier ou deuxième Tour, explique Sébastien Hinault, l’un des directeurs sportifs. Pour bien aborder l’événement, il faut relativiser les choses. On est sur la plus grande course du monde et tout le monde est stressé mais il faut essayer d’en profiter. Le mot d’ordre, c’est de prendre du plaisir. C’est le moteur de tout. » Un message que le Breton essaie de faire passer auprès des plus jeunes. Rien n’est insurmontable, même pas un Tour de France. « Leur premier objectif doit être de finir. S’il n’y a pas de chute ou de maladie, un Tour ça se termine, même si on n’est pas grimpeur. Quand ils sont rassurés par rapport à ça, on veut qu’ils profitent de chaque occasion pour se montrer et gagner une étape. » Passé ce cap, tout est possible comme l’ont déjà prouvé Fedrigo (4 victoires d’étape) et Feillu (1 étape). « On n’a pas le coureur le plus rapide ni le meilleur grimpeur. En étant offensif et en anticipant les coups, on peut gagner », assure Hinault. Si ça sourit, la saison sera réussie. Une victoire sur le Tour vaut mieux qu’un long discours.

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