Laurent Jalabert : « Je suis content d’être celui qui a ouvert la route à Mende »
Question : Quels souvenirs vous gardez de ce 14 juillet 1995 ?
Laurent Jalabert : « Je me souviens que c’était une longue journée et une belle journée parce que le succès était au bout. Il y avait une ambiance particulière ce jour-là. Je n’étais pas spécialement parti pour attaquer ce 14 juillet. J’étais dans les voitures au moment du départ. Au kilomètre zéro, on m’annonçait en remontant que ça attaquait à l’avant du peloton. Je me suis dépêché de doubler le peloton. Ça partait en bosse et je sentais que j’avais de bonnes jambes. Bottaro a attaqué et j’ai pris sa roue. KM 22 le coup est parti et l’aventure était lancée. »
Q : Pourtant, vous avez failli vous relevez
LJ : « Un Gewiss était dans la roue mais il n’a pas roulé pendant dix kilomètres. J’ai failli me relever mais on m’a dit d’insister. Plutôt que de me relever moi, on m’a envoyé du renfort (deux équipiers Mauri et Stephens, ndlr). Le regroupement nous a permis de prendre beaucoup d’avance. J’étais virtuel maillot jaune pendant une bonne partie de l’étape. »
Q : Ce maillot jaune que vous aviez déjà porté en début de Tour vous trottait dans la tête ?
LJ : « J’y ai cru à un moment donné mais l’écart a fini par ce réduire. On nous a expliqué que beaucoup d’équipes roulaient, même celles qui n’avaient pas intérêt à le faire. C’est la règle du jeu, c’est comme ça. »
Q : Restait la victoire d’étape ?
LJ : « A la fin, il faut conclure pour ne pas avoir fait ça pour rien. Dans la côte de la Croix-Neuve, je me suis précipité. J’ai attaqué dès le pied. Je me sentais bien mais après 200-300 mètres j’avais les jambes qui brûlaient. Je me suis dit ‘je suis parti trop vite’. Je regarde derrière et je vois que les gars avec qui j’étais échappé sont toujours là. De toute façon, ils sont toujours là. Quand quelqu’un est à 100 mètres, il est à trente secondes. La montée était dure et l’effort violent mais au bout c’était une grosse joie. »
Q : Cette victoire a marqué les esprits. C'est à ce moment là que vous devenez « Jaja » pour les Français ?
LJ : « Ce qui est marquant, c’est que tout le monde s’en souvient alors que j’ai gagné des grandes courses. Ce 14 juillet a marqué les esprits. Pourquoi ? Peut-être parce que l’année d’avant j’avais été blessé sur le Tour à Armentières. J’ai quitté le Tour et peut-être que beaucoup se sont dit qu’on ne le reverrait plus ou qu’il ne serait pas le même. En effet, je n’étais plus le même. Je suis revenu différemment. J’avais beaucoup gagné en début de saison (Paris-Nice, Milan-Sanremo, Flèche Wallonne, Tour de Catalogne) mais le Tour est l’épreuve qui place une coureur dans le cœur du public. Surtout si tu fais du spectacle. Je le vois encore aujourd’hui. C’est ce que réclament les gens. On demande toujours pourquoi il n’y a pas un Français qui part de loin ou pourquoi les coureurs du général attendent le dernier col. Je ne me considérais pas comme un gars pour le général. Je pouvais le faire. C’est sûr que ce succès a contribué grandement à ma notoriété. »
Q : Depuis, la côte de la Croix-Neuve s’appelle « La montée Jalabert ». Un bel hommage ?
LJ : « Ca m’a fait plaisir bien sûr que la municipalité de Mende ait cette idée de rebaptiser cette côte. AU départ, il voulait juste mettre une borne. Les gens prenaient un ticket en bas et le compostait en haut. Les cyclistes venaient faire la montée Jalabert. Après ça reste la montée de la Croix-Neuve sur les cartes. Quand on fait référence au vélo, mon nom ressort. C’était la première fois qu’on y montait en 1995. Depuis le Tour est revenu à deux reprises. Samedi ce sera la 4e fois. Je suis content d’être celui qui a ouvert la route. »
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