Le débat sur l'oreillette continue
Redonner l'initiative aux coureurs
En 2009, les organisateurs du Tour avaient fait de la 10e étape, entre Limoges et Issoudun (puis de la 13e entre Vittel et Colmar), un terrain d'expérimentation où les oreillettes et les liaisons radios entre coureurs et directeurs sportifs étaient interdites. Lidée ? Renouer avec une course "à l'ancienne", plus spontanée et rendue à l'intelligence des coureurs. Des voix sétaient alors élevées pour manifester leur désaccord. A limage du manager de Saxo Bank Bjarne Riis : "Nos sponsors paient très cher. Il serait inacceptable qu'un leader perde le Tour sur crevaison parce qu'il n'a pas pu prévenir à temps sa voiture d'assistance." Un an plus tard, lexpérience na pas été renouvelée et lutilisation des oreillettes divise encore au sein du peloton.
Figure de proue des anti-oreillettes, Marc Madiot, directeur sportif de la Française des Jeux, ny va pas par quatre chemins : "Il faut redonner linitiative de la course aux coureurs. Avant, il y avait plus de latence entre laction des coureurs et les réactions des directeurs sportifs. Maintenant, on est en direct live, il ny a plus de temps morts, plus de réflexion." Pour Bernard Thévenet, double vainqueur du Tour de France en 1975 et 1977, les oreillettes "ont enlevé toute spontanéité". "Dans mon temps, quand il y avait une échappée, il fallait aller à la pêche aux infos auprès des autres coureurs pour savoir qui était devant, se souvient M. Thévenet. On prenait parfois de mauvaises décisions mais on les prenait nous-mêmes. Maintenant les coureurs savent immédiatement ce qui se passe et attendent les consignes des directeurs sportifs. Loreillette est un outil qui récompense les mauvais élèves du peloton".
La sécurité avant tout
De leur côté, les pro-oreillettes pensent tenir là le meilleur moyen dassurer la sécurité des coureurs. Même si, cette année, les chutes ont été nombreuses depuis le départ du Tour de France. "Ca permet de prévenir les coureurs quand la chaussée est glissante, quand il y a un virage très serré ou encore un accident", explique Patrick Lefevere, directeur sportif de la formation belge Quick Step. Un argument qui a le don dénerver Marc Madiot : "Si lobjectif est la sécurité alors donnons une oreillette commune à tout le peloton !" Pour beaucoup, lidée serait en effet une oreillette unique où un commissaire polyglotte de lUCI donnerait à lensemble des coureurs les renseignements sur la sécurité. Le peloton a, lui, parfaitement adopté cet outil apparu au début des années 90. Comme le confirme Stéphane Augé, coureur de la Cofidis : "Au début, jétais contre loreillette mais maintenant, je suis pour. Avec tous les dangers quil y a sur la course, cest bien dêtre averti. Cest sécurisant ".
Mais rester concentré quand quelquun nous parle dans loreillette nest-il pas antinomique avec loptimisation de la sécurité ? "Je suis sûr quil y a des directeurs sportifs italiens qui narrêtent pas de parler, samuse Patrick Lefevere. Mais nous, les Flamands, nous ne parlons pas beaucoup. On se contente de dire le nécessaire pour ne pas déranger inutilement les coureurs." Et dajouter : "Cest comme dans la vie. Quand on parle trop, les gens nécoutent plus. Il faut donc être clair et bref". Dans le cas contraire, "on a parfois envie de jeter loreillette sur le bord de la route", confie Stéphane Augé. On se dit alors que le coup de la panne chez les coureurs doit être chose courante.
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