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Le vélo a-t-il perdu de son panache ?

Sur les routes de Liège-Bastogne-Liège dimanche, comme sur celles de la Flèche Wallonne quatre jours plus tôt, la course s'est résumée à un calcul d'apothicaire entre ses différents acteurs, et à une ennuyeuse caravane plongée dans l'ennui, avant le final, seul moment devenu intéressant. Ceci à cause d'un scénario verrouillé mais hélas prévisible. Dans la quête obsessionnelle de points (réservés aux 10 premiers) pour le classement par équipes établi en fin de saison, les coureurs et leurs responsables semblent se satisfaire des places d'honneur.
Article rédigé par Christian Grégoire
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3min
L'Australien Simon Gerrans (Orica GreenEdge)

"Hormis le podium magnifique, c'est incroyablement décevant pour la 100e édition d'une si grande course", a regretté l'organisateur et directeur du Tour  de France, Christian Prudhomme, au soir de l'arrivée de Liège-Bastogne-Liège . "La période intense est beaucoup trop courte, 10 kilomètres sur 263, ça ne fait pas envie". Et ce n'est pas le directeur du Tour qui parle, c'est l'amoureux du vélo. Et le moins que l'on puisse dire c'est que son discours n'était pas feint.

Une prudence excessive

En effet, une fois encore, après quelques velléités de coureurs de seconde zone qui, sauf miracle, n'avaient que peu de chance de rallier l'arrivée en vainqueurs, lors des dernières grandes courses du calendrier, le but n'est plus de l'emporter et d'inscrire son nom au palmarès, mais avant tout de bien figurer. A l'instar des courses par étapes d'une semaine du calendrier mondial  (WorldTour), quasiment robotisées, les coureurs limitent la prise de risques. Aucun des favoris ne s'est exposé dans la dernière heure de Liège -Bastogne-Liège , hormis l'Irlandais Dan Martin qui a tenté le tout pour le  tout, sous la flamme rouge du dernier kilomètre. Les autres ont assuré, un  accessit le plus souvent.

 "C'est la faute aux points pour le classement", accusait avant même le  départ de Liège Marc Madiot, le manager de l'équipe FDJ.fr, en prenant  l'exemple de sa formation: "Si je veux être en première division l'an prochain, j'ai besoin de points. Je comprends que le spectateur ne se passionne pas...  mais je n'ai pas le choix."

Un nivellement des valeurs

L'autre raison principale, avancée moins ouvertement dans l'entourage des équipes, serait assurément plus réjouissante. Faute de carburant extérieur, autrement dit d'apport médicamenteux, les coureurs géreraient mieux leurs efforts et tenteraient  d'économiser l'énergie le plus longtemps possible. Dans le final, ils ne disposeraient plus que d'une seule cartouche, une seule tentative."Comme la course est dure, on attend le dernier moment", relève Valerio  Piva, directeur sportif de BMC. En parallèle, la préparation de plus en plus pointue (programmation, entraînement,) est reconnue par tous. "Le niveau  des coureurs a augmenté, celui des équipes aussi, ce qui a tendance à donner des courses verrouillées", confirme Allan Peiper, manager sportif de la même  équipe.

"Le niveau du peloton est de plus en plus homogène, vers le haut", constate lui aussi Christian Prudhomme qui sait les possibilités limitées des organisateurs: "On le voit au Tour de France, on peut avoir une course formidable ou terriblement terne. J'ai toujours en mémoire l'attaque d'Alberto Contador dans le col de Manse (du Tour 2011), où il n'y avait jamais eu quoi que ce soit auparavant." "Tout est possible", estime cependant l'organisateur de la Doyenne qui  n'entend pas rajouter d'autres difficultés, à l'évidence un faux remède. Valverde a déjà répondu à ce sujet: "Une course plus dure ? Mais il y a déjà plus de 4000 mètres de dénivelé !"

Alors faut-il durcir la course ? Créer d'autres émulations dans le peloton ? Ou sortir de ce système de classement qui bride l'esprit d'aventure des attaquants du vélo ? Personne n'a pour l'instant la solution. Pourtant le spectacle y gagnerait. 

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