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Cyclisme : Le 18 mars 1995, Laurent Jalabert remporte Milan-San Remo

Six jours après avoir remporté Paris-Nice, Laurent Jalabert réalise un nouveau coup en remportant Milan-San Remo. L’ancien coureur français revient 25 ans plus tard sur ce "rêve" qu’il a réalisé le 18 mars 1995.
Article rédigé par Adrien Paquier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
 

C’est ce qu’on appelle débuter une saison pied au plancher. Fraîchement vainqueur de Paris-Nice, Laurent Jalabert se présente au départ de la course qu’il a "toujours rêvé de remporter" : Milan-San Remo. "Parce que c'était la première classique de l’année, parce que l’Italie est une grande nation du vélo, parce que son histoire est riche, les plus grands champions l’ont gagnée et parce qu’elle répondait à mes caractéristiques", rappelle le vainqueur du Monument Italien en 1995. 

"J’étais en état de grâce"

A 26 ans, le Français débarque sur la Primavera avec l’étiquette de favori pour vivre "la journée parfaite". "J’ai eu cette chance d’être dans une forme comme je n’ai jamais connu ensuite, se souvient Jalabert. J’étais sur un nuage, je sentais que rien ne pouvait m’atteindre. J’étais tout simplement en état de grâce." Gonflé à bloc, le Français jouit "d’un capital confiance inébranlable". Allant même à se dire qu’il allait gagner la Primavera ? "Il y a toujours des déclics dans une carrière et quand je gagne l’étape de Roanne en solitaire sur Paris-Nice, je prends conscience de beaucoup de choses et que je peux gagner un monument", répond le Mazamétain. 

Comme à son habitude, Jalabert n’a rien laissé passer au hasard. "J’avais repéré à vélo le final pour me remettre en mémoire toutes les difficultés et tous les pièges qui pouvaient survenir sur le parcours comme je le faisais tous les ans après Paris-Nice", se remémore dans le moindre détail l’ancien champion. "Je savais parfaitement où j’allais mettre mes roues et j’avais repéré l’endroit précis où je voulais placer mon attaque, à un kilomètre du sommet environ, au niveau d’une plaque d’égout au moment où ça remonte jusqu’au virage, où ça bascule pour descendre."

Cet endroit que décrit Laurent Jalabert, c’est le Poggio, lieu mythique du Monument. Une ascension longue de quatre kilomètres avec ses 3,7% de dénivelé en moyenne. Épaulé par ses coéquipiers depuis le kilomètre zéro pour durcir volontairement la course, et éviter un sprint massif, le leader de la formation Once arrive dans le groupe de tête à l’entrée de cette dernière difficulté. "J’étais depuis le pied du Poggio dans les roues de Maurizio Fondriest. On ne s’est absolument pas marqué, on s’est retrouvé comme ça et on est entré bien placé tous les deux."

Alors à sept kilomètres de l’arrivée, maillot jaune et noir sur le dos, Laurent Jalabert saute dans la roue de l’Italien déjà vainqueur en 1993.  Il est le seul à pouvoir le suivre. "Au moment où j’allais attaquer, à dix mètres près, Fondriest place son attaque et comme j’étais dans sa roue je l’ai suivi. Et là j’ai eu très très mal aux jambes, se souvent-il parfaitement. Ç’a été un kilomètre très rapide mais à la fois très douloureux sur le plan physique parce que je me suis dit : « À quel moment il va s’arrêter, à quel moment il va s’arrêter ?». Jusqu’au sommet il est monté comme un avion. »

"J’avais le sentiment que j’allais en faire qu’une bouchée."

C’est donc à deux qu’ils vont collaborer pour se disputer la victoire de la 86e édition de la Primavera. Mais le coureur tricolore était déjà sur son nuage. "À partir du sommet j’avais en tête que le plus dur était fait. Je n’avais plus qu’un adversaire et pour les raisons que j’évoquais au début, j’étais en pleine confiance. J’avais le sentiment que j’allais en faire qu’une bouchée." Dernier virage négocié, les deux hommes déboulent sur la via Roma pour se disputer le sprint. "J’ai eu la chance de tomber sur un Fondriest qui était très nerveux ce jour là. Il se retournait beaucoup, il craignait un retour du peloton. Et moi étonnamment, étant d’un naturel plutôt pas sûr de moi et angoissé, j’étais concentré uniquement sur lui et ce qu’il restait à parcourir jusqu’à la ligne, sans jamais me retourner."

Le dossard porte-bonheur 

Ce jour là, Laurent Jalabert était trop fort. Assez pour écoeurer Maurizio Fondriest. "Sur la ligne il écarte les bras complètement dépité. Car à ce moment là il était en pleine bourre et il m’avait battu plus souvent que je ne l’ai fait, ajoute l'ancien cycliste tricolore. Il se souciait beaucoup du retour du peloton mais au fond de lui il pensait qu’il allait pouvoir me battre. Et ce geste sur la ligne c’est un peu un geste de dépit."

Six ans après le doublé de Laurent Fignon (victoire en 1988 et 1989) sur la Primavera, les planètes étaient alignées pour « Jaja » : "Mon chiffre préféré c’était le quatre et la veille de la course quand le directeur sportif est arrivé pour nous donner les dossards je me retrouve avec le 44. Là je me dis : « Ce n’est pas fait mais c’est un signe du destin. Cette course là devrait bien se passer.»" Ou plutôt se gagner.

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