Tour de France. Peter Sagan, ce compagnon d'échappée bien trop encombrant
Il était de loin le plus fort sur la ligne à Revel. Michael Matthews ? Non, Peter Sagan ! Pourtant comme trop souvent, le Slovaque de la Tinkoff a dû se contenter de la deuxième place à l'arrivée de l'étape. Pour la 17e fois de sa carrière (!) sur le Tour, nous y reviendrons plus tard. Jamais le maillot vert sur ses épaules - qu'il a récupéré à l'arrivée - ne lui avait donné si grise mine. Le Slovaque était visiblement touché de devoir encore se contenter d'une place d'honneur.
Que ressasse t-il au moment d'enfiler sa tunique de leader du classement par points ? Sa mauvaise gestion du sprint final ? Oui, mais pas que. L'équation est trop complexe pour Tourminator pour pouvoir se résumer à un mauvais choix de ligne, ou un sprint déclenché trop tard. Le Slovaque se demande surtout comment s'imposer sur le Tour au terme d'une échappée. Un casse-tête qui doit lui gratter jusqu'à sous le casque.
Oui, Sagan est l'un des joyaux de la nouvelle génération. Rapide au sprint, puncheur dans les petites bosses, funambule lors des descentes de cols, pas maladroit avec un VTT ou showman pour le public... Généreux dans l'effort aussi. Ah oui, et beau gosse avec ça. Mais le revers de la médaille est aussi violent que sa polyvalence est grande. A briller sur tous les fronts, il est "l'ennemi public numéro 1" du peloton. Emmener le Slovaque sur son porte-bagages dans une échappée, c'est l'assurance de se tirer une balle dans le cale-pied pour le sprint final. Comme on dit dans le jargon, Sagan a "la pancarte". Celle de l'homme à surveiller. Celle de l'homme à abattre. Il est celui que l'on marque au cuissard, ou à la culotte, histoire de filer la métaphore.
Condamné à être condamné ?
Impossible pour lui de se cacher dans une échappée. De jouer les roublards en faisant mine d'être à court de jambes. Son endurance est trop connue de tous pour faire gober de telles couleuvres. Lorsqu'il parvient à s'extirper du peloton, Sagan est rapidement ciblé par ses partenaires d'échappée. Il faut l'épuiser à tout prix, à défaut de pouvoir le distancer. Connu pour sa puissance et son explosivité, il se retrouve souvent seul contre tous. C'est à lui que l'on demande de prendre le plus de vent, les plus longs relais. C'est à lui encore qu'il revient de contrer les différentes accélérations lors des finales de chaque étape. Le Slovaque est-il condamné à être condamné ?
Les solutions existent pourtant pour s'éviter de pareilles mésaventures. S'il parvenait à s'échapper avec un coéquipier, le champion de 26 ans pourrait s'épargner ces débauches d'énergie excessives. Il n'y avait qu'à voir la stratégie d'Orica-BikeExchange ce mardi sur les routes du Tour. Avec trois membres dans l'échappée du jour, la formation australienne s'est assurée de pouvoir faire reposer au moins un de ses coureurs. Pendant que Sagan s'échinait à répondre seul aux offensives tentées. Au risque de manquer de giclette pour l'emballage final.
Cette appréhension à l'égard du champion slovaque se ressent depuis plusieurs années sur le Tour de France. Car si le coureur de la Tinkoff compte cinq victoires d'étapes - un palmarès qui ferait rougir de jalousie bien des athlètes du peloton - il s'est encore davantage distingué en accumulant un nombre de places d'honneur sensationnel. De 2012 à la 10e étape de l'édition 2016, il a terminé 17 fois deuxième et six fois troisième. D'abord parce qu'il a souvent été freiné par les sprinteurs les plus brillants de sa génération, ensuite parce qu'il lui est quasi-impossible de se ménager lors d'une échappée pour s'y imposer. Le casse-tête est désormais connu. Reste à en trouver la solution.
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