Record de l'heure, un mythe qui renaît
Un mythe recherché
Il fût un temps ancien où la crème du peloton se battait pour tourner en rond pendant une heure. L'amour de la piste, du défi. L'honneur aussi. Hormis Bernard Hinault, tous les grands champions du cyclisme se sont essayés au record de l'heure. Avec plus ou moins de succès mais la piste était un passage obligé pour affirmer sa domination. Ces pionniers du chrono avaient une obsession en tête, la barre mythique des 50 km en une heure. Fausto Coppi a ouvert le bal des chasseurs de temps avec son 45,798 km mais c'est Merckx qui s'en approcha le plus (49,432 km). Dans les vélodromes, chaque tentative faisait le buzz et nourrissait les imaginaires. A l'époque, il n'y avait pas que les grands tours et quelques classiques pour faire chavirer les fans. Chacun avait son champion et pouvait le situer dans la chronologie des géants. "Les candidats utilisaient peu ou prou le même matériel et l'on pouvait comparer d'une génération à l'autre, entre Fausto Coppi, Jacques Anquetil ou Roger Rivière", abonde Eddy Merckx dans L'Equipe.
Trop vite, trop loin
En pulvérisant le record de Merckx à l'aide de toutes les préparations scientifiques et technologiques disponibles, Francesco Moser a lancé une vraie course à l'armement. Il cassait du même coup la chaîne reliant toutes les générations de rouleurs et tuait toute comparaison. Après 1984 et ces deux records successifs (51,151 km), plus rien ne sera comme avant. Avec la bénédiction de l'UCI, les vélos les plus fous ont porté des homme-machines jusqu'à des distances bien au-delà de ce qu'il est humainement possible de réaliser. Du vélo bricolé dans son garage par Graham Obree (51,596 km) à la position de "Superman" de Chris Boardman (56,375 km), la course à l'escalade a fini par achever un mythe. En 2000, les instances internationales décidaient de faire machine arrière et de redonner au record de Merckx ses lettres de noblesse. Si le record devait être tenté, ce serait avec la même machine que le Cannibale. Depuis ce retour à la marque de 1972, les tentatives ne se sont pas bousculées. Seuls Bordman (49,441 km en 2000) et l'étonnant tchèque Ondrej Sosenka (49,700) en 2005 ont devancé le Belge. Avec un matériel qui n'est plus en phase avec le cyclisme moderne, le record est délaissé par les grands prédateurs du peloton. Il faut une nouvelle réglementation de l'UCI pour dépoussiérer le mythe. "Le matériel utilisé en compétition doit pouvoir bénéficier des évolutions de la technologie lorsqu'on estime que cela est pertinent", avance le président de l'UCI, Brian Cookson. Tant pis pour la comparaison athlétique…
Voigt, l'ultime défi pour une renaissance
Depuis le 15 mai dernier, les vélos de piste sont donc acceptés, ouvrant la voie à de nouveaux conquérants. C'est un appel du cale-pied direct pour les Cancellara, Martin et Wiggins. En attendant que ces trois-là daignent jouer du braquet, un premier coureur s'est engouffré dans la brèche. Il ne s'agit pas d'un jeune premier ni d'un cador en mal de reconnaissance mais un vétéran qui tire sa révérence sur un dernier défi : Jens Voigt. A 43 ans et à l'issue de 17 saisons professionnelles, le rouleur de Trek s'attaque à un ultime défi. Voigt n'est pas à proprement parler un maître du chrono mais l'avantage technologique de son vélo peut lui permettre de battre la marque de Sosenka. Il lui faudra toutefois suivre le plus possible une trajectoire idéal et rester sur un rythme élevé même en virage. L'Allemand fera sa tentative sur la piste courte (250 m) et rapide de Granges en Suisse. "Il peut le faire mais cela ne va pas être une promenade de santé", estime Boardman. "C'est bon pour le sport qu'il s'y attaque", renchérit Bradley Wiggins qui aura un œil très attentif sur le résultat final.
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