Tour de France 2017 : Dans les coulisses de la photo-finish
C'est le juge de paix des épreuves de course, et le Tour de France ne fait pas exceptions. Elle a le pouvoir de faire passer un coureur du rire au larme, comme c'est arrivé avec Warren Barguil, persuadé d'avoir remporté l'étape de Chambéry avant qu'elle ne mette son grain de sel. La photo-finish a déjà attribué deux victoires d'étapes sur ce Tour de France. Ou plutôt, elle a permis par deux fois de déterminer un vainqueur que l'oeil humain n'avait pas su voir.
"Le moment magique, c'est l'arrivée"
Dans la petite cabine de chronométrage située juste sur la ligne d'arrivée, les opérateurs de Tissot travaillent entourés d'ordinateurs. Et leur activité ne commence pas au moment du sprint final : « Pendant l'étape on gère et on envoie toutes les données liées au classement, grâce aux transpondeurs fixés sur les vélos » explique Pascal Rossier, responsable des opérations de chronométrage. « Mais pour nous le moment magique, c'est vraiment l'arrivée. » A ce moment, toute la cabine se met en branle. Il faut, en un temps extrêmement court, communiquer au protocole le nom du vainqueur d'étape. « On a une dizaine de secondes pour donner un résultat non officiel de l'étape, une vingtaine de secondes pour donner le porteur non officiel du maillot jaune. » Non officiel puisque, même si « c'est l'appareil qui est décideur », les résultats officiels doivent obligatoirement être validés par un juge.
L'appareil qui produit cette fameuse photo-finish qui détermine le classement est un dispositif de caméras : une de chaque coté de la ligne, capable de filmer à 10 000 images secondes. Mais ces caméras ne filment pas la ligne en entier : simplement une ligne extrémement fine de quelques millimètres de large. « Pour comprendre, imaginez que vous fermez les volets chez vous et vous regardez la route dehors par une toute petite fente. Vous voyez un vélo passer, petit à petit à travers la fente et c'est votre cerveau qui recompose l'image du vélo en entier. »
L'image finale, sur laquelle chacun s'est abîmé les yeux pour trouver qui de Marcel Kittel ou Edvald Boasson-Hagen avait gagné la septième étape, est donc une recomposition de ce qu'a perçu la caméra à travers son capteur si particulier. Et si, sur l'image compressée donnée aux médias, il était impossible de distinguer qui du norvégien ou de l'Allemand avait passé la ligne en premier, dans la cabine de chronométrage tout était clair. Sur les écrans HD des opérateurs, on voyait bien un petit écart de quelques pixels, qui correspondait aux six millimètres d'avance du maillot vert. « Même si à la télé les deux curseurs semblaient l'un sur l'autre, sur nos écrans et pour le juge, il n'y avait pas de débat. »
Symbole de la cruauté du sport
Quant à savoir si, lorsque le résultat est si serré, on ne devrait pas donner une égalité, la question est ouverte. « Cette question peut se trouver dans plein d'autres sports… en natation on jugeait au millième jusque dans les années 70 et on a décidé de revenir au centième. Effectivement cette décision est cruelle… mais est-ce que le sport n'est pas cruel après tout ? » En attendant la technologie de la photo-finish, qui date de 1948, continue de donner tous les résultats, même les plus serrés. Et si l'oeil humain de l'observateur au coeur tendre continue de voir des égalités après 210km de course, la machine, elle, n'est pas prête d'être prise en défaut.
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